Les condamnations de particuliers contestant abusivement un permis de construire sont (heureusement) rares. En voici une, appliquant l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
"Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 6 avril, 21 juillet, 13 septembre, 29 septembre et 17 novembre 2023 et le 12 septembre 2024, M. D F et Mme A F, représentés par Me Masson-Bettati, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2022 par lequel le maire de Neuilly-sur-Marne a délivré un permis de construire à M. B C et à Mme H C pour la réalisation, sur une parcelle située 25 bis rue d'Avron, d'un pavillon individuel à usage d'habitation, ensemble la décision du 10 février 2023 par laquelle le maire de Neuilly-sur-Marne a rejeté leur recours gracieux dirigé contre cet arrêté ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 avril 2023 par lequel le maire de Neuilly-sur-Marne a délivré un permis de construire modificatif à M. et Mme C afin de modifier l'implantation du pavillon projeté ;
3°) de rejeter les conclusions de M. et Mme C présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Neuilly-sur-Marne et de M. et Mme C une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les arrêtés attaqués sont entachés d'incompétence ;
- les dossiers de demande de permis de construire initial et modificatif sont entachés d'omissions, d'inexactitudes et d'insuffisances ;
- le projet méconnaît les dispositions de l'article UR 7 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ;
- il méconnaît les dispositions de l'article UR 11.1 du règlement du PLU et les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ;
- il méconnaît les dispositions de l'article UR 12.1.2 du règlement du PLU ;
- il méconnaît les dispositions de l'article UR 13 du règlement du PLU ;
- les conclusions présentées par M. et Mme C sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont infondées.
Par un mémoire du 28 avril 2023, M. et Mme F ont refusé la proposition de médiation qui leur a été adressée le 14 avril 2023 par le tribunal.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 et 25 mai, 14 septembre, 29 octobre et 28 novembre 2023, M. B C et Mme H C, représentés par I, concluent, dans le dernier état de leurs écritures, au rejet de la requête et demandent au tribunal, d'une part, de condamner les demandeurs à leur verser une somme totale de 70 996,52 euros en réparation de leurs préjudices financier et moral, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme, et, d'autre part, que soit mise à la charge des requérants une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent, à titre principal, que la requête est irrecevable, faute pour les requérants de disposer d'un intérêt pour agir ; subsidiairement, qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé, et que leur requête présente un caractère abusif.
Par des mémoires en défense et une pièce complémentaire, enregistrés les 28 juillet, 10 août, 14 septembre et 9 octobre 2023, la commune de Neuilly-sur-Marne, représentée par
Me Bougassas, conclut au rejet de la requête et demande au tribunal de mettre à la charge des requérants une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable, d'une part, en raison de sa tardiveté, et, d'autre part, faute pour les requérants de disposer d'un intérêt pour agir ; subsidiairement, qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.
Par une ordonnance du 16 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 octobre 2024 à 12 heures.
Un mémoire en défense, enregistrée le 17 septembre 2024 pour la commune de Neuilly-sur-Marne, n'a pas été communiqué.
Un mémoire en réplique, enregistré le 3 octobre 2024 pour les requérants, n'a pas été communiqué.
Vu :
- les arrêtés attaqués,
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hardy, rapporteure,
- les conclusions de M. Löns, rapporteur public,
- et les observations de Me Laval, substituant Me Masson-Betati, représentant M. et Mme F, et de I, représentant M. et Mme C.
Considérant ce qui suit :
- Par un arrêté du 28 octobre 2022, le maire de Neuilly-sur-Marne a délivré un permis de construire à M. et Mme C pour la réalisation, sur une parcelle située 25 bis rue d'Avron, d'un pavillon individuel à usage d'habitation. Par une décision du 10 février 2023, le maire a rejeté le recours gracieux de M. et Mme F dirigé contre cet arrêté. Par un arrêté du 26 avril 2023, le maire de Neuilly-sur-Marne a délivré aux pétitionnaires un permis de construire modificatif afin de modifier l'implantation du pavillon projeté. M. et Mme F demandent l'annulation de ces deux arrêtés, ensemble la décision du 10 février 2023 portant rejet de leur recours gracieux dirigé contre l'arrêté du 28 octobre 2022.
Sur la recevabilité du mémoire en défense du 25 mai 2023 présenté par M. et Mme C :
- Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête (). Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ".
- Si les requérants soutiennent que le premier mémoire en défense des pétitionnaires, enregistré le 25 mai 2023, est irrecevable, dès lors qu'il ne fait état d'aucun exposé de moyens et conclusions, les dispositions invoquées sont toutefois relatives aux requêtes dont le tribunal administratif est saisi, et non aux mémoires en défense. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par les requérants, tirée de l'irrecevabilité du mémoire en défense du 25 mai 2023, doit être écartée.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
- En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est : / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme () ". Aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints () ". Aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " I.- Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'ils ont été portés à la connaissance des intéressés dans les conditions prévues au présent article et, pour les actes mentionnés à l'article L. 2131-2, qu'il a été procédé à la transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement prévue par cet article. / Le maire peut, sous sa responsabilité, certifier le caractère exécutoire d'un acte. () / III.- Les actes réglementaires et les décisions ne présentant ni un caractère réglementaire, ni un caractère individuel font l'objet d'une publication sous forme électronique, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, de nature à garantir leur authenticité et à assurer leur mise à disposition du public de manière permanente et gratuite. () ". Aux termes de l'article L. 2122-29 du même code : " Les arrêtés du maire ainsi que les actes de publication et de notification sont inscrits par ordre de date. / Dans les communes de 3 500 habitants et plus, les arrêtés municipaux à caractère réglementaire sont publiés dans un recueil des actes administratifs dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. / La publication au recueil des actes administratifs des arrêtés municipaux mentionnés au deuxième alinéa est assurée sur papier. Elle peut l'être également, dans des conditions de nature à garantir leur authenticité, sous forme électronique. La version électronique est mise à la disposition du public de manière permanente et gratuite ".
- Par un arrêté n° 2022-77 du 1er mars 2022, transmis au contrôle de légalité du préfet le 2 mars 2022, et dont il est constant qu'il a été publié sous forme électronique, sur le site internet de la commune de Neuilly-sur-Marne, le maire a donné délégation de fonction à M. E G, quatrième adjoint au maire, pour l'instruction et la délivrance de l'ensemble des autorisations et actes relatifs à l'occupation ou à l'utilisation du sol au titre du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés attaqués doit être écarté.
- En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants () ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : / () c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain () ".
- La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
- D'une part, la notice architecturale décrit de manière suffisamment précise l'état initial du terrain, à l'état de " friche ", et exempt de toute construction, ainsi que de la végétation existante, composée de quelques plantations. Les abords y sont également décrits, la notice indiquant que le bâti environnant, qui relève du secteur pavillonnaire, comporte des constructions réalisées en enduit, comprenant des toitures en pente de 35° à 45° recouvertes de tuiles de teinte rouge, et implantées en retrait vis-à-vis de la voie publique.
- D'autre part, s'il est constant que le document graphique d'insertion ne comporte qu'une représentation de la façade principale du projet, depuis la voie publique, cette vue unique, qui matérialise les pavillons individuels implantés sur les parcelles contiguës au terrain d'assiette du projet, est toutefois suffisante pour apprécier son insertion dans l'environnement bâti existant, dans la mesure où il emporte la réalisation d'un pavillon individuel à usage d'habitation de faible gabarit, en R+1+combles. En outre, l'association du document graphique d'insertion avec le reportage photographique a également permis au service instructeur d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement bâti.
- Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées des articles R. 431-8 1° et R. 431-10 c) du code de l'urbanisme doivent être écartés.
- En troisième lieu, aux termes de l'article UR 7 du règlement du PLU de la commune de Neuilly-sur-Marne : " Nonobstant les dispositions du présent article UR 7, l'implantation d'une construction en limite séparative peut être refusée si elle a pour effet de porter gravement atteinte aux conditions d'habitabilité d'un immeuble voisin ou à l'aspect du paysage urbain, et notamment à l'insertion de la construction dans le bâti environnant ".
- L'atteinte grave aux conditions d'éclairement suppose une obstruction significative de la lumière qui ne saurait se réduire à une simple perte d'ensoleillement.
- En l'espèce, les requérants soutiennent que l'implantation de la construction projetée, sur les limites séparatives, et en retrait vis-à-vis de la voie publique, engendre une perte d'éclairage naturel au niveau de leur salle à manger ainsi qu'une perte d'ensoleillement de leur terrasse, implantée dans leur jardin. Si l'étude d'ensoleillement qu'ils versent aux débats établit que le projet, eu égard à son implantation, est à l'origine d'une perte d'ensoleillement au niveau de leur terrasse et de leur jardin, et d'éclairage naturel au niveau de leur salle à manger, il n'entraîne toutefois aucune obstruction significative de la lumière. Ces pertes d'ensoleillement et d'éclairage naturel demeurent en outre très limitées, dans la mesure où, d'une part, la façade latérale de leur pavillon est aveugle, et où, d'autre part, le jardin et la terrasse demeurent ensoleillés une partie de la journée. Dans ces conditions, de simples pertes d'ensoleillement et d'éclairage naturel, pertes très limitées, et alors, au demeurant, que l'implantation de la construction projetée a été modifiée par le permis de construire modificatif délivré le 26 avril 2023 afin de réduire la distance de retrait vis-à-vis de la voie publique de 4,69 mètres, permettant ainsi de réduire encore la perte d'ensoleillement et d'éclairage naturel subie par les requérants, le projet n'a pas pour effet de porter gravement atteinte aux conditions d'habitabilité de leur pavillon, et le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UR 7 du règlement du PLU doit être écarté.
- En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Aux termes de l'article UR 11.1 du règlement du PLU : " L'autorisation de travaux peut être refusée u n'être accordée que sous réserve de prescriptions si la construction, () par sa situation, son architecture, ses dimensions, son aspect extérieur ou sa coloration, est de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives et des sites remarquables ".
- Pour apprécier si un projet de construction porte atteinte, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-27 et de celles du règlement d'un plan local d'urbanisme qui ont le même objet et dont les exigences ne sont pas moindres, au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales, il appartient à l'autorité compétente d'apprécier, dans un premier temps, le caractère et l'intérêt des lieux avoisinants sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur ce secteur.
- Il ressort des pièces du dossier que le projet consiste en la réalisation, sur un terrain nu, d'un pavillon individuel à usage d'habitation en R+1+combles, d'une hauteur de 9,40 mètres au faîtage, en retrait vis-à-vis de la voie publique, et dont le traitement architectural consiste en la réalisation d'une toiture en pente, recouverte de tuiles de terre cuite de teinte ardoisée, de façades traitées par enduit projeté de finition grattée, ton pierre, avec des encadrements d'ouvertures en enduit de teinte grise, ains que des menuiseries extérieures en aluminium gris anthracite. L'environnement immédiat du projet, qui s'implante en zone UR, secteur à dominante résidentielle comprenant un habitat majoritairement pavillonnaire, est principalement constitué de pavillons individuels à usage d'habitation en R+1 ou R+2, qui, s'ils révèlent une unité s'agissant de leur gabarit, présentent toutefois des façades et des toitures au traitement architectural hétérogène, tant au niveau des matériaux que des couleurs utilisés. Par ailleurs, la seule circonstance que la construction projetée soit nouvelle, et qu'elle s'intègre dans un bâti environnant " de facture ancienne ", construit notamment au cours de la première moitié du XXe siècle, ne suffit pas à démontrer que le projet porte atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté en litige est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des règles fixées par l'article UR 11.1 du règlement du PLUi précitées.
- En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 151-33 du code de l'urbanisme : " Lorsque le règlement impose la réalisation d'aires de stationnement pour les véhicules motorisés, celles-ci peuvent être réalisées sur le terrain d'assiette ou dans son environnement immédiat. / Lorsque le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition à une déclaration préalable ne peut pas satisfaire aux obligations résultant du premier alinéa, il peut être tenu quitte de ces obligations en justifiant, pour les places qu'il ne peut réaliser lui-même, soit de l'obtention d'une concession à long terme dans un parc public de stationnement existant ou en cours de réalisation et situé à proximité de l'opération, soit de l'acquisition ou de la concession de places dans un parc privé de stationnement répondant aux mêmes conditions () ". Aux termes de l'article UR 12.1.2 du règlement du PLU : " Modalités de calcul du nombre de places de stationnement : / () - Les places commandées ou enclavées ne sont pas prises en compte dans le calcul du nombre minimum de place de stationnement. - Lorsque le nombre de place de stationnement exigé est exprimé par tranche de surface de plancher, toute tranche de surface de plancher entamée est prise en compte dans le calcul du nombre minimum de place de stationnement. - Pour le calcul du nombre minimum de place de stationnement nécessaire à une opération, le nombre obtenu par l'application des normes ci-dessous est, dans tous les cas, arrondi au nombre entier immédiatement supérieur () ". Aux termes de l'article UR 12.1.4 : " En cas d'impossibilité d'aménager sur le terrain d'assiette de l'opération ou sur un autre terrain situé dans son environnement immédiat, le nombre d'emplacements nécessaires au stationnement, le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition à une déclaration préalable peut être tenu quitte de ces obligations en justifiant, pour les places qu'il ne peut réaliser lui-même, soit de l'obtention d'une concession à long terme dans un parc public de stationnement existant ou en cours de réalisation et situé à proximité de l'opération, soit de l'acquisition ou de la concession de places dans un parc privé de stationnement répondant aux mêmes conditions ". Aux termes de l'article UR 12.2.2.1 : " Normes applicables selon la destination des constructions : / - Constructions destinées à l'habitation : / Logements non financés par un prêt aidé par l'Etat : / - : Il doit être réalisé au moins une place de stationnement par tranche de 70 m² de surface de plancher, avec au moins 1,36 places par logement, dont une place close et couverte () ".
- En l'espèce, le projet consiste en la réalisation d'un pavillon individuel à usage d'habitation d'une surface de plancher de 110 m². Dès lors, il résulte des dispositions citées au point précédent que deux places de stationnement pour véhicules motorisés, dont l'une, close et couverte, doivent être créées, soit sur le terrain d'assiette du projet, soit sur un autre terrain situé dans son environnement immédiat. Toutefois, le pétitionnaire peut être tenu quitte de ses obligations en termes de stationnement, pour les places qu'il ne peut réaliser lui-même sur le terrain d'assiette du projet ou sur un autre terrain situé dans son environnement immédiat, en justifiant, soit de l'obtention d'une concession à long terme dans un parc public de stationnement existant ou en cours de réalisation et situé à proximité de l'opération, soit de l'acquisition ou de la concession de places dans un parc privé de stationnement répondant aux mêmes conditions.
- Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire initial, délivré le 28 octobre 2022, prévoyait deux places de stationnement commandées en extérieur, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article UR 12.1.2 du règlement du PLU. Le permis de construire modificatif délivré le 26 avril 2023 ne prévoit, quant à lui, qu'une seule place de stationnement, située sur la parcelle, en extérieur. Toutefois, les pétitionnaires ont conclu, le 22 mars 2023, pour une durée de 120 mois à compter du 3 avril 2024, soit dix ans, un contrat de location de place de stationnement close et couverte dans un parc de stationnement privé situé 20 rue Jacques Brel à Neuilly-sur-Marne, qui, contrairement à ce que soutiennent les requérants, existe réellement, soit à une distance de 800 mètres et à 10 minutes de marche à pied du terrain d'assiette du projet. Un avenant à ce contrat de location a ensuite été signé, afin de modifier la durée de location, d'une durée de 180 mois à compter du 3 avril 2024, soit 15 ans. Dans ces conditions, M. et Mme C doivent être regardés comme étant tenus quittes de leurs obligations en termes de stationnement, pour la place qu'ils ne peuvent réaliser eux-mêmes sur le terrain d'assiette du projet, dès lors qu'ils justifient d'un contrat de location à long terme d'une place de stationnement dans un parc privé existant et situé à proximité de l'opération, et les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le projet méconnaît les dispositions de l'article UR 12.2.2.1 du règlement du PLU.
- En sixième et dernier lieu, aux termes de l'article UR 13.1.2.1. du règlement du PLU : " Dispositions générales : / - Les espaces libres doivent présenter une superficie au moins égale à 60 % de la superficie du terrain () ". Le règlement du PLU définit les espaces libres comme : " () les espaces hors voies libres de constructions en élévation ", desquels sont exclues " les surfaces surplombées par des éléments de construction ". Il précise que " sont comptés dans les espaces libres : / Les voies de desserte interne et les aires de stationnement () ".
- Il ressort des pièces du dossier que la parcelle terrain d'assiette du projet est d'une superficie de 177 m², et que les accès et cheminements, ainsi que les espaces verts de pleine terre, qui constituent des espaces libres, sont d'une superficie totale de 115,92 m², soit 65,50 % de la superficie totale du terrain. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le projet méconnaît les dispositions de l'article UR 13.1.2.1 du règlement du PLU.
- Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que la requête de M. et Mme F doit être rejetée.
Sur les conclusions indemnitaires de M. et Mme C :
- Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en œuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts ".
- Il résulte de l'instruction que M. et Mme C étaient auparavant les propriétaires de la parcelle dont M. et Mme F sont les propriétaires actuels, qui incluait alors la parcelle contigüe, terrain d'assiette du projet, avant sa division en deux lots, l'un comportant un pavillon individuel à usage d'habitation, et l'autre, vierge de toute construction. Les pétitionnaires souhaitant vendre leur pavillon individuel implanté sur le premier lot, et construire un pavillon individuel sur le second lot, ont mis en vente leur pavillon, dont M. et Mme F se sont portés acquéreurs. Ces derniers ont alors négocié le prix de vente du pavillon individuel à la somme de 442 000 euros, alors que le prix de vente initial était de 460 000 euros, au motif que les pétitionnaires avaient d'ores-et-déjà pour projet de réaliser un pavillon individuel à usage d'habitation sur le second lot, contigu au premier, et qu'ils subiraient des nuisances et des désordres liés à la réalisation des travaux. Pourtant clairement informés du projet des pétitionnaires avant même d'acquérir le bien, qui, contrairement à ce qu'ils soutiennent, d'ailleurs avec une particulière mauvaise foi, n'a pas évolué entre le moment où la vente a été conclue et où la demande de permis de construire a été déposée, M. et Mme F n'ont toutefois eu de cesse que d'empêcher sa réalisation, alors que le projet porté par les pétitionnaires est de faible envergure, qu'il ne créée aucune vue directe sur leur propriété, et qu'il s'inscrit pleinement dans le cadre pavillonnaire du quartier, tout d'abord, par l'exercice de leur recours gracieux du 16 décembre 2022, puis par l'introduction de leur requête, le 6 avril 2023, qu'ils ont maintenue et largement développée par la production de six mémoires, en dépit de la délivrance, le 26 avril 2023, en cours d'instance, à la demande de M. et Mme C, d'un permis de construire modificatif modifiant l'implantation du pavillon projeté, et dans leur intérêt exclusif, afin de préserver au mieux l'ensoleillement de leur terrasse. Les requérants ont également refusé, sans la moindre explication, le 28 avril 2023, la proposition de médiation qui leur a été adressée le 14 avril 2023 par le tribunal. Dans ces conditions, et en dépit de leur qualité de voisins immédiats du pavillon projeté, le droit de M. et Mme F à former un recours contre les permis de construire litigieux a été mis en œuvre, au cours de la présente instance, dans des conditions qui traduisent un comportement abusif et que leur recours pour excès de pouvoir excède la défense de leurs intérêts légitimes.
- M. et Mme C demandent la condamnation des requérants à leur verser une somme totale de 70 996,52 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'ils estiment avoir subi en raison du comportement abusif que traduit l'action contentieuse engagée par eux devant le tribunal contre les permis de construire qui leur ont été délivrés, qui a retardé la réalisation des travaux.
- Si les pétitionnaires établissent qu'ils ont réglé des loyers au titre de la location d'un appartement situé à Deauville, et des frais de location de container et de carburant dont ils indiquent qu'ils sont liés à des déplacements entre Deauville et Gonfreville-L'Orcher, il ne résulte toutefois pas de l'instruction que ces sommes auraient été exposées en raison de l'exercice du recours contentieux de M. et Mme F et du retard pris, par conséquent, dans la réalisation des travaux, et de l'impossibilité, pour eux, d'habiter le pavillon projeté. Par ailleurs, le risque d'expulsion de l'appartement situé à Deauville ainsi que la perte de revenus liée aux difficultés financières de l'entreprise de M. C ne sont pas établis, et, en tout état de cause, ne découlent pas de l'exercice du recours contentieux de M. et Mme F et du retard pris dans la réalisation des travaux. Enfin, l'augmentation du coût du chantier alléguée n'est pas démontrée, et il n'est pas établi que les problèmes de santé de M. C seraient liés à l'exercice du recours contentieux de M. et Mme F.
- En revanche, eu égard au contexte décrit au point 24, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par M. et Mme C, et découlant directement de l'exercice du recours contentieux de M. et Mme F et du retard pris, par conséquent, dans la réalisation des travaux, et de l'impossibilité, pour eux, d'habiter ou de mettre en location le pavillon projeté, en l'évaluant, dans les circonstances de l'espèce, à la somme de 2 000 euros.
Sur l'amende pour recours abusif :
- Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". Il résulte de ce qui a été dit au point 24 que la requête de M. et Mme F présente un caractère abusif. Il y a lieu de les condamner à payer une amende de 2 000 euros.
Sur les frais liés au litige :
- Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme C et de la commune de Neuilly-sur-Marne, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que réclament M. et Mme F au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. et Mme F, et sur ce même fondement, respectivement, une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Neuilly-sur-Marne et une somme de 1 500 euros à verser à M. et Mme C.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme F est rejetée.
Article 2 : M. et Mme F sont condamnés à verser à M. et Mme C une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Article 3 : M. et Mme F sont condamnés à payer une amende de 2 000 euros en application des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.
Article 4 : M. et Mme F verseront, respectivement, une somme de 1 500 euros à M. et Mme C, et une somme de 1 500 euros à la commune de Neuilly-sur-Marne en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent jugement sera notifié à Mme A F, à M. D F, à Mme H C, à M. B C, et à la commune de Neuilly-sur-Marne."