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Interdiction d'une vidéo réalisée sans autorisation du proriétaire

Cet arrêt juge qu'un propriétaire peut s'opposer à la diffusion, par un tiers, d'une vidéo réalisée sur sa propriété, y compris par la voie d'une action en référé lorsque cette diffusion lui cause un trouble manifestement illicite.

 

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"Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 8 septembre 2022), rendu en référé, l'association Vegan impact (l'association), qui a pour but la protection des animaux, a mis en ligne, sur son site internet, une vidéo tournée, sans autorisation, dans les locaux de la société La Ferme du pré (la société), laquelle élève des poules.

2. Le 27 octobre 2021, cette dernière a assigné en référé l'association afin d'obtenir le retrait de la vidéo, l'interdiction de son utilisation et une provision à valoir sur la réparation de son préjudice. L'association a opposé la nullité de cette assignation.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident, qui est préalable

Enoncé du moyen

3. L'association fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'annulation de l'assignation, alors « que les abus de la liberté d'expression prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur un autre fondement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société La Ferme du pré reprochait à l'association, dans l'assignation délivrée le 27 octobre 2021, d'avoir mis en ligne une vidéo tournée dans ses locaux d'exploitation dans laquelle « il est indiqué, à plusieurs reprises, qu'il s'agit de l'élevage de la Ferme du pré dans lequel se trouveraient quarante mille poules en détresse », ce dont il résultait qu'il lui était reproché un abus de la liberté d'expression ; qu'en énonçant ensuite que l'assignation ne faisait pas état du contenu de la vidéo ni ne mentionnait l'existence de faits qui pourraient relever de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 tel qu'un fait de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la société La Ferme du pré ou de ses dirigeants et n'y faisait pas référence, et que l'action engagée n'était pas soumise aux dispositions d'ordre public contenues dans la loi du 29 juillet 1881, mais était fondée sur l'existence d'un trouble manifestement illicite résultant de la violation du droit de propriété de la société la Ferme du pré, du droit à la protection de son domicile et de la mise en péril de ses intérêts par l'atteinte aux règles sanitaires applicables à son élevage, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881, ensemble l'article 53 la loi du 29 juillet 1881. »

Réponse de la Cour

4. Ayant constaté que l'action de la société était fondée sur un trouble manifestement illicite résultant de la violation de son droit de propriété, de la protection de son domicile et de la mise en péril de ses intérêts par l'atteinte aux règles sanitaires applicables à son élevage, qu'il n'était pas fait état du contenu de la vidéo dans l'assignation et que celle-ci ne mentionnait pas d'allégations ou d'imputations de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la société, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que cette action ne relevait pas des dispositions de la loi du 29 juillet 1881.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen relevé d'office

6. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu les articles 544 du code civil et 835, alinéa 1, du code de procédure civile :

7. Il résulte de ces textes qu'un propriétaire peut s'opposer à la diffusion, par un tiers, d'une vidéo réalisée sur sa propriété, y compris par la voie d'une action en référé lorsque cette diffusion lui cause un trouble manifestement illicite.

8. Peut caractériser un tel trouble la diffusion d'une vidéo, tournée à l'intérieur de ses locaux sans son autorisation, peu important qu'elle l'ait été ou non au cours d'une intrusion et que son auteur soit ou non identifié.

9. Pour dire n'y avoir lieu à référé, l'arrêt retient qu'il n'est produit aucun élément permettant d'établir, avec l'évidence requise en référé, la preuve que les membres de l'association se sont introduits de façon illicite dans les locaux de la société et qu'ils ont violé le droit de propriété de cette dernière, ni que les règles sanitaires applicables à cette exploitation n'ont pas été respectées à l'occasion du tournage de la vidéo et que le fait qu'elle ait été tournée à l'intérieur de ces locaux, sans autorisation, ne peut en soi constituer la preuve du trouble manifestement illicite invoqué, tiré de la violation du droit de propriété et des règles sanitaires, dès lors que la vidéo a pu être réalisée par une personne habilitée à pénétrer dans les lieux.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute l'association Vegan impact de sa demande d'annulation de l'assignation délivrée à son encontre, l'arrêt rendu le 8 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne l'association Vegan impact aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille vingt-quatre."

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