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Une réponse du ministre sur la notion de cabanisation.
Question de M. GROSVALET Philippe (Loire-Atlantique - RDSE) publiée le 28/12/2023
M. Philippe Grosvalet attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les difficultés rencontrées par les collectivités locales dans le cadre de leurs plans de lutte contre le phénomène de cabanisation des terrains agricoles littoraux. En effet, l'attractivité de l'espace littoral encourage le développement illégal d'espaces d'agrément sur des zones agricoles et naturelles, entrainant une augmentation de la pollution des sols, ainsi que des nappes phréatiques et de la mer.
Afin d'y remédier, certaines collectivités tentent de se porter acquéreuses de ces parcelles lorsqu'elles sont mises en vente afin de les reconvertir à leur destination d'origine. Elles sollicitent alors les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) pour des demandes de préemption en révision de prix. Cependant, les prix proposés par ces dernières, impactés par la prise en compte de l'attractivité touristique des territoires littoraux, sont exorbitants. Ainsi, récemment, la SAFER des Pays-de-la-Loire a fixé le prix à 12,65 euros par mètre carré pour un foncier situé à La-Plaine-Sur-Mer, en Loire-Atlantique, alors que celui moyen d'un terrain agricole est fixé à 0,20 euro par mètre carré.
Par ailleurs, lorsque des candidats à l'acquisition d'une parcelle demandent que la SAFER engage une procédure accélérée, les délais raccourcis empêchent les collectivités de mener à bien leurs démarches de préemption préalables.
Dans ce contexte, il lui demande quels sont les moyens envisagés par le Gouvernement pour permettre aux collectivités de lutter efficacement contre le phénomène de cabanisation des territoires agricoles littoraux.
Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 29/02/2024
Les installations et constructions illicites en zone naturelle ou agricole, aussi désignées sous le vocable de « cabanisation », constituent un phénomène complexe qui revêt des contours extrêmement variés, de l'habitat léger de loisirs à l'extension illégale de constructions existantes en passant par des problématiques d'habitat précaire. L'exercice, par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER), de leur droit de préemption, au titre des articles L. 143-1 et suivants et R. 143-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime (CRPM), leur permettant d'acheter en priorité un bien agricole ou rural pour le revendre à un agriculteur, est en général adapté au cas d'espèce. Dans leurs zones d'intervention (terrains situés dans une zone agricole, à l'intérieur des périmètres de protection des espaces agricoles et naturels périurbains protégée, dans une zone agricole ou une zone naturelle et forestière délimitée par un document d'urbanisme), cet outil leur permet notamment de contribuer à maintenir la vocation agricole du bien, mais également à protéger l'environnement et, dans de nombreux cas de figure, à éviter la surenchère des prix. Lorsque les SAFER préemptent avec révision des prix, l'estimation de la valeur vénale doit tenir compte des prix pratiqués dans l'environnement immédiat du bien, en faisant appel à l'estimation des services des domaines. La valeur vénale est la valeur du marché local constatée au travers des cessions de biens comparables. Cet effet de bordure entre parfois en contradiction avec la volonté de ramener les prix de préemption à un niveau acceptable pour la collectivité et donc proche des prix de marché pour des terres à vocation agricole. Il est alors susceptible de limiter l'efficacité de l'intervention des SAFER. Le rôle des services des domaines est donc de fournir une estimation du bien uniquement sur la base des cessions de biens comparables, a priori indépendamment des éventuels contentieux qui les grèveraient. Toutefois, si une procédure a été engagée, le service du domaine peut en tenir compte et pratiquer un abattement sur la valeur comme l'a considéré la Cour de cassation dans un arrêt du 9 novembre 2023 (Cour de cassation, troisième chambre civile, 9 novembre 2023, 22-18.545). Dans cet arrêt, la Cour de cassation a considéré que la prescription de l'action en démolition des constructions irrégulières ne fait pas obstacle à l'application, par le juge de l'expropriation, d'un abattement sur la valeur du terrain délaissé, pour illicéité d'une partie des constructions qui y sont édifiées. Il est possible à une collectivité de demander à la SAFER, sur un périmètre donné, de l'informer des transactions dès réception par la société de la déclaration d'intention d'aliéner pour que la collectivité puisse disposer du temps nécessaire à la formulation auprès de la SAFER d'une éventuelle demande de préemption, par exemple dans le cadre de la mise en oeuvre du concours technique prévu à l'article L. 141-5 du CRPM. Il est cependant rappelé que d'autres moyens d'action sont à la disposition des collectivités. Ainsi la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, a ouvert des moyens à l'autorité compétente en matière d'urbanisme, bien souvent le maire, afin de compléter utilement les dispositifs pénal et civil prévus respectivement par les articles L. 480-1 et L. 480-14 du code de l'urbanisme. C'est ainsi que les articles L. 481-1 à L. 481-3 du code de l'urbanisme, entrés en vigueur depuis le 29 décembre 2019, prévoient un mécanisme de mise en demeure de régulariser sous astreinte les constructions, travaux et installations réalisés en infraction au code de l'urbanisme. Dès lors que le procès-verbal d'infraction au code de l'urbanisme est dressé, l'autorité compétente a la faculté de mettre en demeure l'auteur de cette infraction de procéder aux travaux nécessaires à la mise en conformité de sa construction ou de déposer une demande d'autorisation visant à les régulariser a posteriori. Cette mise en demeure peut être assortie d'une astreinte d'un montant de 500 euros maximum par jour de retard dont le produit revient à la collectivité compétente en matière d'urbanisme. Il s'agit donc là d'un moyen simple et rapide à disposition des collectivités pour traiter les constructions illégales.