Cet arrêt retient l'obligation de résultat de l'installateur du poêle à pellets.
"FAITS ET PROCÉDURE
Suivant devis en date du 11 septembre 2013, M. Frédéric T. et son épouse Mme Sandrine D. ont commandé à la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN la fourniture et l'installation d'un poêle à granulés de marque Palazetti modèle Denise d'une puissance de 7,4 kw pour le prix de 5 161,31 € TTC pour équiper leur domicile situé [...]. Ils ont intégralement réglé la facture du 17 décembre 2013 d'un montant de 5 185,73 TTC.
En février 2014, un début d'incendie s'est déclaré à partir de ce poêle, nécessitant l'intervention des pompiers. Puis, en mars 2015 et en novembre 2015, un embrasement s'est également produit dans le foyer dégageant une épaisse fumée noire. Depuis cette dernière date, les époux Frédéric T. n'ont plus utilisé ce poêle.
Après plusieurs interventions sans succés de la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN, les époux Frédéric T. ont déclaré le sinistre auprès de leur assureur qui a fait diligenter une expertise amiable le 6 juillet 2016 selon laquelle la responsabilité de la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN était susceptible d'être engagée.
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Les époux Frédéric T. ont donc fait assigner cette dernière en référé devant le président du tribunal de grande instance de Limoges, qui, par ordonnance rendue le 29 mars 2017, a ordonné une expertise judiciaire confiée à M. Hubert B.. Ce dernier a rendu son rapport le 5 janvier 2018, mettant en cause la responsabilité de la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN.
Se fondant sur ce rapport, les époux Frédéric T. ont fait assigner la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN devant le tribunal d'instance de Limoges aux fins de voir reconnaître la responsabilité contractuelle de la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN et obtenir des dommages et intérêts.
Par jugement rendu le 17 avril 2019, le tribunal d'instance de Limoges a :
- déclaré la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN responsable des préjudices subis par les époux Frédéric T. ;
- condamné cette dernière à leur payer les sommes de :
- 3 311 € en réparation de leur préjudice matériel
- 2 500 € en réparation du préjudice de jouissance
- 1 000 € en réparation du préjudice moral
- 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens y compris les frais d'expertise judiciaire.
La SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 16 décembre 2019, la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN demande à la cour de :
la dire et juger recevable et bien fondée son appel ;
infirmer le jugement en cause ;
débouter les époux Frédéric T. de l'ensemble de leurs demandes ;
les condamner à lui payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Notamment, elle conteste les conclusions de l'expert judiciaire et elle met en cause la responsabilité des époux Frédéric T. pour défaut d'entretien du poêle et défaut de ventilation de leur habitation.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 10 septembre 2019, les époux Frédéric T. demandent à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de condamner la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN à leur payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La demande des époux Frédéric T. est fondée sur les dispositions de l'article 1147 ancien du code civil applicable à l'espèce, le contrat ayant été conclu avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016'131 du 10 février 2016 (article 9).
À ce titre, la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN était tenue à une obligation de résultat quant à la pose du poêle litigieux, ainsi qu'à une obligation de renseignement et de conseil envers les époux Frédéric T..
L'expertise judiciaire réalisée par M. Hubert B., qui n'est contredite par aucune pièce produite par la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN, met en exergue non seulement différents dysfonctionnements de ce poêle, mais des manquements aux règles de l'art.
Ainsi, l'expert judiciaire a noté :
- une incohérence entre la pose d'un conduit concentrique pour poêle étanche dans les combles, alors que ce poêle de marque PALAZETTI modèle Denise n'est pas un poêle étanche ; ainsi, selon lui, 'L'ensemble ne peut pas fonctionner de cette façon' ;
- une absence d'entrée d'air permanente complémentaire venant de l'extérieur (ou au moins d'une pièce adjacente), pourtant obligatoire;
- que la ventouse sur le toit n'était pas posée verticalement et qu'elle présentait un décalage d'environ 4 centimètres ;
- que le conduit posé sur la toiture ne la dépassait que de 28 centimètres, alors que, selon le DTU 24-1 et la norme NF EN 15287-1, cette distance doit être supérieure à 40 centimètres.
La SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN conteste ces conclusions :
1) Elle prétend en premier lieu que les grilles d'aération présentes dans le séjour peuvent suppléer l'absence d'entrée d'air extérieur permanente et complémentaire.
Mais, l'expert judiciaire indique expressément qu'elles sont insuffisantes car elles sont éloignées du poêle, amovibles et obturables (page 29 du rapport d'expertise).
En outre, cela ne serait pas conforme à la notice d'installation du poêle qui prévoit précisément un conduit de 100 cm3 percé dans le mur, absent en l'espèce (page 31 du rapport d'expertise).
L'avis technique 12/08-1476 invoqué par la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN n'est pas applicable car le conduit de fumée est ici situé en zone 2 et non en zone 1 (pages 28 et 30 du rapport d'expertise). De plus, selon cet avis, il est nécessaire d'installer un poêle étanche pour les zones 2 et 3, ce qui n'a pas été réalisé par la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN pourtant en zone 2.
2) En ce qui concerne la hauteur du conduit de 40 centimètres sur la toiture, contrairement à ce que la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN prétend, il ne peut pas être fait exception à la règle posée :
* par le DTU 24'1 :
- article 5.4.7, car il n'est pas établi que la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN se soit assurée de l'absence de risque de surpression (page 28 du rapport d'expertise),
- article 5.4.8, car aucun dispositif anti-refouleur n'a été installé;
* par l'arrêté du 22 octobre 1969 : l'exception à la règle des 40 centimètres prévue à l'article 18 est en effet combattue par l'article 19 qui prévoit qu'en cas d'arrêt du système (panne par exemple), l'installation doit fonctionner en tirage naturel afin d'évacuer les fumées, ce qui suppose là aussi un conduit d'une hauteur de 40 centimètres.
En conséquence, en l'absence d'un quelconque avis technique qui aurait permis de déroger à cette règle, le conduit extérieur aurait dû dépasser de 40 centimètres le faîtage.
3) Par ailleurs, si la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN reproche aux époux Frédéric T. l'obturation des entrées d'air dans au moins trois chambres, ce qui rend effectivement hermétique la maison, il appartenait à cette société, au titre de son devoir d'information et de conseil, de les en informer et de les mettre en garde sur la nécessité de les déboucher.
Par ailleurs, si le système de ventilation (VMC) des époux Frédéric T. n'est pas conforme pour être coudé (expertise page 24), il n'est pas démontré que ce seul élément soit à l'origine du dysfonctionnement du poêle, au regard des différents manquements aux règles de l'art commis par la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN énoncés ci-dessus.
4) Enfin, la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN ne peut pas reprocher aux époux Frédéric T. un défaut d'entretien du poêle alors qu'elle ne leur a pas fourni la notice précise d'utilisation de ce matériel, notamment les consignes d'entretien.
Au surplus, elle ne peut pas dire que le poêle a fonctionné correctement pendant deux ans, cela étant démenti dans les courriers produits, le rapport d'expertise amiable et par le début d'incendie survenu seulement quelques mois après l'installation du poêle.
En tout état de cause, il n'est nullement démontré la réalité de ce défaut d'entretien, et encore moins qu'il ait été la cause du fonctionnement défectueux du poêle.
En réalité, les manquements principaux commis par la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN que sont la fourniture d'un poêle non étanche au lieu d'un poêle étanche avec pose d'un conduit concentrique ne dépassant pas suffisamment le faîtage ainsi que l'absence d'entrée d'air complémentaire ont été en premier lieu et directement à l'origine du dysfonctionnement du poêle, les problèmes liés à la ventilation et à l'entretien n'ayant fait qu'augmenter les problèmes de combustion (expertise judiciaire page 25 § 4).
Le lien de causalité n'est donc imputable à l'origine qu'à la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu l'entière responsabilité de la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN.
De même, ce jugement sera confirmé en ce qui concerne la réparation du dommage, son principe étant indéniable et la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN ne discutant pas les quantum retenus par le tribunal.
- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
La SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN succombant à l'instance, elle doit être condamnée aux dépens et il est équitable de la condamner à payer aux époux Frédéric T. la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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PAR CES MOTIFS
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LA COUR
Statuant par décision contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal d'instance de Limoges le 17 avril 2019 ;
CONDAMNE la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN à payer à M. Frédéric T. et à Mme Sandrine D., pris ensemble, la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SARL POÊLES ÉCCO ARÉDIEN aux dépens, y compris les frais d'expertise."