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Bail commercial, obligation de délivrance et consignation des loyers

La consignation des loyers est possible si les locaux loués sont impropres à l'usage auquel ils étaient destinés.

 

Quelle est la durée du renouvellement d'un bail d'habitation non meublé ? |  L'immobilier par SeLoger

 

"Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 10 mars 2022), le 1er mars 2002, la société civile immobilière du Pavillon de Flore (la bailleresse) a donné en location à Mme [Z] (la locataire) un local à usage commercial situé dans un immeuble soumis au statut de la copropriété.

2. Au motif de divers manquements de la locataire à ses obligations contractuelles, la bailleresse l'a, le 16 août 2017, assignée en résiliation du bail, expulsion et paiement d'une indemnité d'occupation.

3. Invoquant l'inexécution par la bailleresse de son obligation de délivrance à raison d'infiltrations d'eau dans les locaux loués, la locataire a conclu au rejet des demandes dirigées contre elle et a reconventionnellement sollicité l'autorisation de procéder à la consignation des loyers.

Sur le moyen du pourvoi incident

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable.

Mais sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La bailleresse fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à prononcer la résiliation du bail, de la débouter de ses prétentions tendant à voir ordonner l'expulsion de la locataire et fixer l'indemnité d'occupation et d'ordonner la consignation du montant des loyers, alors « que le non-respect de ses obligations par le bailleur ne dispense le locataire de remplir les siennes que lorsque ce manquement rend impossible la jouissance des lieux loués ; qu'en affirmant, pour décider que Mme [Z] était fondée à se prévaloir de l'exception d'inexécution et à retenir les loyers, qu'il existe des infiltrations affectant le local loué et concernant le clos et le couvert, qu'il a laissé perdurer des désordres sans demander de travaux à la copropriété, qu'il refuse de laisser réaliser des travaux par la copropriété, et qu'il a manqué à une obligation essentielle du bail de procéder aux réparations exigées par l'état des lieux et de garantir la jouissance d'un local conforme à celui loué, la cour d'appel qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si le manquement du bailleur à ses obligations rendait impossible la jouissance des lieux, a violé l'article 1728 du code civil, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 16 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1184, alinéa 1, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1719 du code civil :

6. Aux termes du premier de ces textes, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

7. Selon le second, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée, d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.

8. Pour rejeter les demandes de la bailleresse et ordonner la consignation des loyers, l'arrêt retient que, peu important que l'exploitation ne soit pas totalement impossible, l'exception d'inexécution est justifiée par le manquement du bailleur à une obligation essentielle du bail.

9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les infiltrations alléguées avaient rendu les locaux loués impropres à l'usage auquel ils étaient destinés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi principal, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;

Condamne Mme [Z] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [Z] et la condamne à payer à la société civile immobilière du Pavillon de Flore la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-trois."

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