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Opposabilité des restrictions au droit de propriété grevant les lots d'un groupement d'habitations

Cet arrêt juge que les restrictions au droit de propriété grevant les lots d'un groupement d'habitations ont un caractère réel et s'imposent aux acquéreurs des lots de ce groupement, même si elles ne figurent pas dans leur acte de vente, dès lors que les documents qui les contiennent ont été publiés au fichier immobilier.

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"Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 14 décembre 2021), la société civile de construction vente [Adresse 5] (la SCCV) a obtenu l'autorisation de construire dix maisons sur un terrain dont elle était propriétaire, qu'elle a divisé et vendu par lots en l'état futur d'achèvement, notamment à M. et Mme [T] et à M. [K].

2. Se plaignant d'une violation, par la SCCV et M. [K], de règles contractuelles du groupement d'habitations, M. et Mme [T] les ont assignés aux fins de démolition de la maison de M. [K] et paiement de dommages-intérêts.

3. La SCCV a été mise en liquidation judiciaire par jugement du 16 avril 2021 et la société MJ [V] a été désignée en qualité de liquidateur.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. et Mme [T] font grief à l'arrêt de rejeter leur demande en démolition des ouvrages appartenant à M. [K] et leurs demandes indemnitaires, alors « que les documents afférents à un groupe d'habitations, dès lors qu'ils ont donné lieu aux formalités de la publicité foncière, sont opposables à tout propriétaire d'un lot au sein du groupe ; qu'en retenant que les documents intitulés Règlement de l'ensemble résidentiel "[Adresse 5]" et Plan de composition n'étaient pas opposables à M. [K], dès lors que son acte d'acquisition du 17 août 2016, qui les mentionnait à titre d'informations préalables, ne les reproduisait pas, ni ne les mentionnait comme figurant en annexe, quand pourtant ils constataient que les documents afférents au groupe ont donné lieu aux formalités de la publicité foncière, les juges du fond ont violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et les articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 :

5. Il résulte de ces textes que les restrictions au droit de propriété grevant les lots d'un groupement d'habitations ont un caractère réel et s'imposent aux acquéreurs des lots de ce groupement, même si elles ne figurent pas dans leur acte de vente, dès lors que les documents qui les contiennent ont été publiés au fichier immobilier.

6. Pour rejeter la demande de démolition des ouvrages construits sur le lot vendu à M. [K], fondée sur la violation du règlement du groupement d'habitations et de son plan de composition, l'arrêt retient que ces documents ne peuvent pas être considérés comme figurant dans l'acte notarié d'acquisition du 17 août 2016 à titre de clauses contractuelles opposables mais uniquement à titre d'informations préalables, dans la mesure où leur contenu respectif n'est ni directement reproduit dans l'acte authentique d'acquisition, ni mentionné comme étant annexé dans ce même acte d'acquisition.

7. Il ajoute que la mention de ces documents dans l'acte de vente a un caractère informatif, résultant de son intitulé même et que leur dépôt aux minutes du notaire instrumentaire ne permet leur consultation que par une démarche totalement dissociée de la formalisation de l'acte authentique.

8. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le règlement du groupement d'habitation et son plan avaient été publiés au service de la publicité foncière, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

9. M. et Mme [T] font le même grief à l'arrêt, alors « qu'interdiction est faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en retenant que le Règlement de l'ensemble résidentiel "[Adresse 5]" ne fixent pas les modalités et conditions constructives propres à chacun des lots privatifs, quand, en son article 2.07 intitulé Implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, il prévoit : "Les constructions seront réalisées suivant le plan de composition", les juges du fond ont dénaturé le Règlement de l'ensemble résidentiel "[Adresse 5]". »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

10. Pour rejeter la demande de démolition fondée sur la violation du règlement du groupement d'habitations et de son plan de composition, l'arrêt retient que les articles 1.01 et 1.02 du règlement de l'ensemble résidentiel « [Adresse 5] » limitent le périmètre de compétence des dispositions de ce document aux seules règles et servitudes d'intérêt général de cet ensemble résidentiel ainsi qu'au respect des règles d'urbanisme applicables sur le territoire de la commune d'[Localité 4], à l'exclusion des modalités et conditions constructives propres à chacun des lots privatifs, qui relèvent sur un plan général du plan local d'urbanisme.

11. En statuant ainsi, alors que le règlement litigieux prévoyait des règles de dimension, d'aspect et d'implantation des constructions sur les lots privatifs, en renvoyant, s'agissant des distances à observer par rapport aux limites séparatives, au plan de composition, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de cet écrit, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. et Mme [T] de leur demande en démolition de la maison en cours de construction appartenant à M. [K] et en ce qu'il les déboute de leurs demandes subsidiaires d'indemnités en allégation de préjudices de perte de vue et d'ensoleillement ainsi que de valeur vénale de leur maison d'habitation, l'arrêt rendu le 14 décembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne M. [K] et la société MJ [V], prise en sa qualité de liquidateur de la société civile de construction vente [Adresse 5], aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum M. [K] et la société MJ [V], prise en sa qualité de liquidateur de la société civile de construction vente [Adresse 5], à payer à M. et Mme [T] la somme de globale de 2 000 euros et rejette la demande de M. [K] ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille vingt-trois."

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