Il incombe au constructeur de maison individuelle avec fourniture du plan de s’assurer de la nature et de l’importance des travaux nécessaires au raccordement de la construction aux réseaux publics : c'est que juge cet arrêt.
"Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Amiens, 2 avril 2019), M. D... et Mme X... ont conclu avec la société Sogesmi SAS (la société Sogesmi) un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture du plan comprenant une condition suspensive d’obtention par le constructeur de la garantie de livraison dans le délai de douze mois à compter de la signature de l’acte.
2. Le constructeur n’a pas obtenu la garantie de livraison sollicitée auprès de deux établissements.
3. Les maîtres de l’ouvrage, soutenant que le constructeur était responsable de ce refus de garantie, l’ont assigné en paiement de diverses sommes.
Examen des moyens
Sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. D... et Mme X... font grief à l’arrêt de rejeter leur demande de dommages-intérêts, alors « que le constructeur est tenu à l’égard du maître de l’ouvrage d’un devoir de conseil lui imposant de vérifier la situation matérielle du terrain sur lequel sera implanté la construction ; qu’en écartant tout manquement du constructeur à son devoir de conseil portant sur la nature et l’importance des travaux nécessaires au raccordement de la construction au réseau public au motif inopérant qu’il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir pris en compte l’existence de servitudes dont il n’avait pas été informé, quand celui-ci était tenu de vérifier sur place l’existence de canalisations sur le terrain ou à tout le moins à proximité, permettant un raccordement de la construction au réseau public, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, ensemble les articles L. 231-2 et R. 231-4 du code de la construction et de l’habitation. »
Réponse de la cour
Recevabilité du moyen
5. La société Sogesmi conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que le moyen, pris en sa première branche, est nouveau et mélangé de fait et, partant, irrecevable.
6. Toutefois, le moyen est né de l’arrêt.
7. Il est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, et les articles L. 231-2 et R. 231-4 du code de la construction et de l’habitation :
8. Selon le premier de ces textes, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution.
9. Il résulte des deuxième et troisième que le contrat de construction de maison individuelle avec fourniture du plan doit comporter les énonciations relatives à la consistance et les caractéristiques techniques du bâtiment à construire comportant les raccordements aux réseaux divers. Est annexée à ce contrat une notice descriptive qui mentionne les raccordements de l’immeuble à l’égout et aux distributions assurées par les services publics, notamment aux distributions d’eau, de gaz, d’électricité ou de chauffage, en distinguant ceux qui sont inclus dans le prix et, s’il y a lieu, ceux dont le coût reste à la charge du maître de l’ouvrage.
10. Pour rejeter la demande de dommages-intérêts pour manquement du constructeur à son devoir de conseil, l’arrêt retient que le coût du raccordement au réseau public a été pris en compte lors de la signature du contrat, le 30 novembre 2012, puisque celui-ci, fixé à la somme de 6 000 euros, était stipulé réservé par le maître de l’ouvrage au titre des travaux dont il conservait la charge, comme cela résultait de la notice descriptive signée le même jour que le contrat, d’autre part, il ne peut être reproché au constructeur de ne pas avoir pris en compte la bonne configuration de la parcelle, dès lors qu’il n’était pas informé de la servitude qui devait servir au passage des canalisations à destination du réseau public, laquelle n’avait été créée que le jour de la signature de l’acte authentique de vente de la parcelle sur laquelle la construction devait être édifiée, soit le 29 août 2013, par conséquent près de neuf mois plus tard ;
11. En statuant ainsi, alors qu’il incombe au constructeur de maison individuelle avec fourniture du plan de s’assurer de la nature et de l’importance des travaux nécessaires au raccordement de la construction aux réseaux publics, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’infirmant le jugement, il rejette la demande de dommages-intérêts de M. D... et Mme X..., l’arrêt rendu le 2 avril 2019, entre les parties, par la cour d’appel d’Amiens ;
Remet, sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Douai ;
Président : M. Chauvin
Rapporteur : Mme Georget, conseiller référendaire
Avocat général : M. Brun
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret - SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer"