Cet arrêt rappelle que tout copropriétaire est en droit de contester la conformité de son compte individuel à la répartition des charges stipulée au règlement de copropriété.
"Vu l'article 45-1 du décret du 17 mars 1967 ;
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris 16e, 4 mai 2018), rendu en dernier ressort, que, se prévalant d'erreurs du syndic dans la répartition des charges, M. et Mme D..., propriétaires de lots dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, ont assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] en répétition de charges indûment versées ;
Attendu que, pour rejeter la demande, le jugement retient que cette contestation a été inscrite à l'ordre du jour d'une assemblée générale au cours de laquelle il a été proposé une refonte intégrale du règlement de copropriété, mais qu'une note adressée aux copropriétaires ayant expliqué que cette refonte serait difficile à faire voter, le syndic s'était engagé à ventiler l'intégralité des dépenses en application du règlement, de sorte que M. et Mme D... ne peuvent pallier l'absence de contestation exercée dans le délai de deux mois en assimilant la procédure en rectification de simples erreurs de compte à la contestation des charges et qu'en remettant en question la clé de répartition appliquée par le syndic, ils tentent d'obtenir, sous couvert du remboursement de charges indues, une modification de la répartition des charges ;
Qu'en statuant ainsi, alors que tout copropriétaire est en droit de contester la conformité de son compte individuel à la répartition des charges stipulée au règlement de copropriété, le tribunal a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 4 mai 2018, entre les parties, par le tribunal d'instance de Paris 16e ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Paris ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] et le condamne à payer à M. et Mme D... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. et Mme D...
Il est reproché au jugement attaqué d'avoir débouté M. et Mme D... de leurs demandes en paiement de diverses sommes contre le syndicat des copropriétaires du [...] ;
Aux motifs qu'en application de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entrainés par services collectifs et les équipent d'éléments communs, dites charge spéciales, en fonction de l'utilité de ces services à l'égard de chaque lot ; qu'ils sont tenus de participer aux charges relative à la conservation, à l'entretient et à l'administration des parties communes, dénommées charges générales, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives ; que lorsque les comptes ont été approuvés, les copropriétaires n'ayant pas contesté l'assemblée générale ayant voté cette approbation ne sont plus en droit de refuser de régler leur quote-part de charge, qu'ils doivent notamment s'acquitter chaque trimestre d'une provision égale au quart du budget prévisionnel voté par l'assemblée générale des copropriétaires , rapporté à leur quote-part, sauf modalités différentes décidées par cette même assemblée ; que par ailleurs, l'approbation des comptes du syndic par l'assemblée générale rend certaine, liquide et exigible la créance du syndicat des copropriétaires relative à chaque quote-part de charges laquelle est déterminée par le règlement de copropriété, de même que la répartition des charges ; que le syndic doit procéder à la répartition des charges entre les copropriétaires en tenant compte des clés de répartition prévues dans le règlement de copropriété ; que toutefois l'approbation des comptes de la copropriété par l'assemblée générale ne constitue pas une approbation du compte individuel de chaque copropriétaire puisqu'elle ne portait pas sur la répartition des charges entre les différents copropriétaires et partant, sur la tenue des comptes individuels des copropriétaires ; que les époux D... pouvaient donc invoquer, outre d'éventuelles erreurs matérielles de leur relevé de compte individuel, des répartitions non conformes au règlement de copropriété et qu'il leur appartenait alors de justifier des paiements intervenus non imputés sur leur relevé de compte ou des erreurs dans la répartition des charges ; que les époux D... contestaient certaines charges en faisant valoir, en premier lieu, que le syndic avait opéré une confusion entre les charges imputables aux différents bâtiments formant la copropriété en imputant aux lots appartenant au bâtiment B des travaux et charges d'entretien correspondant à des charges spéciales du bâtiment C ; qu'à cet égard, les demandeurs ne produisaient pas les procès-verbaux des différentes assemblées générales ni d'élément de nature à justifier que les décisions votées n'avaient pas été correctement appliquées par le syndic de sorte qu'ils ne rapportaient pas la preuve des erreurs alléguées ; qu'en second lieu, les époux D... alléguaient que le syndic avait inventé une clé de répartition des charges qui n'existerait pas dans le règlement de copropriété ; que cette dernière contestation, notamment sur l'affectation des dépenses et la répartition des charges, avait été mise à l'ordre du jour de l'assemblée générale du 22 novembre 2016 et à cette occasion, avait été proposée une refonte intégrale du règlement de copropriété avec le concours d'un géomètre et d'un notaire ; qu'une note avait été adressée aux copropriétaires le 20 avril 2017 expliquant que la refonte du règlement de copropriété et des tantièmes évoqués à l'assemblée générale du 22 novembre 2016 serait difficile à faire voter puisque cela nécessiterait un vote avec 100 % des copropriétaires ; que le syndic s'était engagé à ventiler l'intégralité des dépenses en application de l'article premier paragraphes 1 et 2 du règlement de copropriété ; qu'il en résultait que les époux D... ne pouvaient pallier l'absence de contestation exercée dans le délai de deux mois imparti par le texte précité en assimilant à leur convenance la procédure en rectification de simples erreurs de compte à la contestation des charges ; qu'en remettant en question la clé de répartition appliquée par le syndic, les époux D... tentaient d'obtenir, sous couvert du remboursement de charges indues, une modification de la répartition des charges ;
Alors 1°) que l'approbation des comptes de la copropriété ne fait pas obstacle à la contestation par un copropriétaire des modalités de répartition des charges qui lui sont appliquées ; qu'en interdisant par principe aux époux D... le droit de contester la clé de répartition des charges en raison de la mise à l'ordre du jour de cette contestation lors de l'assemblée générale du 22 novembre 2016, le tribunal a violé l'article 45-1 du décret du 17 mars 1967 ;
Alors 2°) que l'approbation des comptes de la copropriété ne fait pas obstacle à la contestation par un copropriétaire des modalités de répartition des charges qui lui sont appliquées ; qu'en refusant de se prononcer sur l'application aux époux D... d'une clé de répartition incorrecte des charges de copropriété, inventée par le syndic et dénommée « charge escalier B », en raison de la difficulté à faire voter une refonte intégrale du règlement de copropriété, difficulté expliquée dans une note adressée aux copropriétaires le 20 avril 2017, le tribunal a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l'article 45-1 du décret du 17 mars 1967 ;
Alors 3°) qu'il appartient au syndicat qui poursuit le recouvrement des charges d'en justifier le montant ; qu'en déboutant les époux D... de leur contestation parce qu'ils n'avaient pas produit les procès-verbaux des différentes assemblées générales ni tout autre élément de nature à justifier que les décisions votées n'avaient pas été correctement appliquées par le syndic, le tribunal a renversé la charge de la preuve et violé l'article 1353 du code civil."