Cette décision juge bonne et valable la clause par laquelle le cessionnaire d'un fonds de commerce est garant des sommes dues par le cédant au bailleur.
"Attendu, selon l'arrêt déféré (Bordeaux, 14 juin 2010), que, par actes notariés du 27 octobre 1994, la SCI Fondecave fils et la SARL Central presse quatre pavillons (les bailleurs) ont donné à bail commercial à la SARL presse vidéo rive droite des locaux leur appartenant ; que cette dernière ayant été mise en liquidation judiciaire le 21 juillet 2006, le juge-commissaire a, le 18 octobre 2006, autorisé la vente de gré à gré du fonds de commerce au profit de M. X... (le cessionnaire) ; que l'acte de cession a été dressé le 16 mars 2007 et notifié aux bailleurs par M. X... agissant au nom de la SARL Les Dernanes (la SARL) ; qu'un jugement du 9 janvier 2008 a fixé le loyer annuel, à compter du 1er avril 2004, à la somme de 60 000 euros HT ; que les bailleurs, motif pris du non-paiement du loyer révisé, ont, le 6 février 2008, fait délivrer au cessionnaire et à la SARL deux commandements de payer visant la clause résolutoire, auxquels ces derniers ont fait opposition ;
Attendu que la SARL et M. X... font grief à l'arrêt de les avoir condamnés in solidum à payer aux bailleurs la somme de 159 734 euros au titre du rappel de loyers, du 1er avril 2004 au 1er janvier 2008, avec "intérêts de droit" et anatocisme, alors, selon le moyen :
1°/ que l'acquéreur d'un bien appartenant à un débiteur placé en liquidation judiciaire ne saurait être tenu d'exécuter d'autres obligations que celles fixées par l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente de gré à gré de ce bien ; qu'en jugeant, pour condamner la SARL et M. X... à payer aux bailleurs la somme de 159 734 euros au titre du rappel des loyers du 1er avril 2004 au 1er janvier 2008, que les acquéreurs du fonds de commerce ayant appartenu au débiteur étaient responsables du paiement des sommes dues par ce dernier, à la date de la cession, quand l'ordonnance du juge-commissaire du 18 octobre 2006 autorisant la vente de gré à gré du fonds de commerce se bornait à prévoir que l'acquéreur serait tenu de payer le prix d'achat du fonds de commerce du débiteur et qu'il avait pris l'engagement de faire son affaire personnelle de la procédure pendante relative à la fixation des loyers, sans mettre à sa charge le paiement de la dette constituée du solde de l'arriéré des loyers non payés par le débiteur, la cour d'appel a violé l'article L. 642-19 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 ;
2°/ que, en cas de cession du bail d'une société en liquidation judiciaire, toute clause imposant au cédant des dispositions solidaires avec le cessionnaire est réputée non écrite ; qu'en se fondant, en l'espèce sur des clauses aux termes desquelles "en cas de cession régulière, le preneur restera, sauf le cas où le bailleur aurait usé de son droit de préférence, garant et conjoint avec son cessionnaire et tous cessionnaires successifs, du paiement des loyers et charges échus ou à échoir et de l'exécution des conditions du présent bail" et "le cessionnaire sera dans tous les cas, du seul fait de la cession, garant du paiement par le preneur de la totalité des sommes dues au titre du présent bail par ledit preneur à la date de la cession" pour condamner les repreneurs d'un bail à supporter le montant des loyers échus avant la date à laquelle ils ont repris le bail, la cour d'appel a violé les articles L. 622-15 et L. 641-12 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;
Mais attendu qu'il résulte de la combinaison des articles L. 641-12 et L. 642-19 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008 et 1134 du code civil, qu'en cas de liquidation judiciaire, la cession du droit au bail se fait aux conditions prévues par le contrat à la date du jugement d'ouverture, à l'exception de la clause imposant au cédant des obligations solidaires avec le cessionnaire ; qu'ayant relevé que les deux baux annexés à l'acte de cession du fonds de commerce, prévoient que "le cessionnaire sera dans tous les cas, du seul fait de la cession, garant du paiement par le preneur de la totalité des sommes dues au titre du présent bail par ledit preneur à la date de la cession", l'arrêt en déduit, à bon droit, que les bailleurs étaient fondés à se prévaloir de ces stipulations contractuelles, peu important qu'elles n'aient pas été reproduites dans l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la cession ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et la société Les Dernanes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la SCI Fondecave fils et à la SARL Central presse quatre pavillons la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Les Dernanes et de M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SARL LES DERNANES et Monsieur Abdelkader X... à payer à la SCI FONDECAVE ET FILS et la SARL CENTRAL PRESSE 4 PAVILLONS la somme de 159.734 euros au titre du rappel de loyer du 1er avril 2004 au 1er janvier 2008, avec intérêts de droit et anatocisme des intérêts ;
AUX MOTIFS QUE les preneurs font valoir que l'acte de cession du fonds de commerce prévoit que Monsieur Abdelkader X... est parfaitement informé de l'existence et de l'état de la procédure en fixation de loyer pendante devant le Tribunal de grande instance de BORDEAUX et qu'il est expressément convenu, entre les parties, que les sommes éventuellement dues au titre de la révision du loyer ayant couru entre le 1er mai 2004 et le 18 octobre 2006 date de l'ordonnance autorisant la cession du fonds de commerce seront traitées par le cédant selon les règles relatives aux procédures collectives et que le cessionnaire fera son affaire personnelle du paiement des sommes dues au titre de la révision du loyer à compter du 18 octobre 2006 ; que c'est à juste titre que les bailleurs observent que cet acte, auxquels ils ne sont pas parties, ne leur est pas opposable, en vertu de l'effet relatif des contrats ; qu'en revanche, les bailleurs sont fondés à opposer aux cessionnaires les dispositions des deux baux, lesquels ont été annexés à l'acte de cession du fonds de commerce, qui prévoient que « en cas de cession régulière, le preneur restera, sauf le cas où le bailleur aurait usé de son droit de préférence, garant et conjoint avec son cessionnaire et tous cessionnaires successifs, du paiement des loyers et charges échus ou à échoir et de l'exécution des conditions du présent bail » et que « le cessionnaire sera dans tous les cas, du seul fait de la cession, garant du paiement par le preneur de la totalité des sommes dues au titre du présent bail par ledit preneur à la date de la cession » ; qu'en application de ces dispositions, les bailleurs sont habilités à solliciter la condamnation des cessionnaires, Monsieur Abdelkader X... et la SARL LES DERNANES, à solliciter le paiement des sommes dues par le cédant, la SARL PRESSE VIDEO RIVE DROITE, à la date de la cession ; que cette dernière cession s'entend, contrairement à ce que soutiennent les appelants, des sommes dont le principe d'exigibilité est fixé à la date de la cession, qui résulte de l'existence de la procédure en fixation de loyer pendante visée par l'acte de cession, quand bien même le montant n'en a été liquidé que par l'effet du jugement du 9 janvier 2008, dès lors qu'il n'est pas contestable que la révision du loyer prend effet à la date du renouvellement du bail commercial soit en l'espèce le 1er avril 2004 ; que c'est donc à bon droit que le premier juge a considéré que les appelantes étaient redevables du loyer à compter du 1er avril 2004 (et non 1er mai 2004 comme indiqué dans l'acte de cession) ;
1) ALORS QUE l'acquéreur d'un bien appartenant à un débiteur placé en liquidation judiciaire ne saurait être tenu d'exécuter d'autres obligations que celles fixées par l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente de gré à gré de ce bien ; qu'en jugeant, pour condamner la SARL LES DERNANES et M. Abdelkader X... à payer aux bailleurs la somme de 159.734 euros au titre du rappel des loyers du 1er avril 2004 au 1er janvier 2008, que les acquéreurs du fonds de commerce ayant appartenu au débiteur étaient responsables du paiement des sommes dues par ce dernier, à la date de la cession, quand l'ordonnance du juge-commissaire du 18 octobre 2006 autorisant la vente de gré à gré du fonds de commerce se bornait à prévoir que l'acquéreur serait tenu de payer le prix d'achat du fonds de commerce du débiteur et qu'il avait pris l'engagement de faire son affaire personnelle de la procédure pendante relative à la fixation des loyers, sans mettre à sa charge le paiement de la dette constituée du solde de l'arriéré des loyers non payés par le débiteur, la Cour d'appel a violé l'article L. 642-19 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 ;
2) ALORS QUE en cas de cession du bail d'une société en liquidation judiciaire, toute clause imposant au cédant des dispositions solidaires avec le cessionnaire est réputée non écrite ; qu'en se fondant, en l'espèce sur des clauses aux termes desquelles « en cas de cession régulière, le preneur restera, sauf le cas où le bailleur aurait usé de son droit de préférence, garant et conjoint avec son cessionnaire et tous cessionnaires successifs, du paiement des loyers et charges échus ou à échoir et de l'exécution des conditions du présent bail » et « le cessionnaire sera dans tous les cas, du seul fait de la cession, garant du paiement par le preneur de la totalité des sommes dues au titre du présent bail par ledit preneur à la date de la cession »(arrêt, p.6, al. 8) pour condamner les repreneurs d'un bail à supporter le montant des loyers échus avant la date à laquelle ils ont repris le bail, la Cour d'appel a violé les articles L 622-15 et L 641-12 du Code de commerce, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008."