Ces décisions sont dignes d'intérêt parce que les locations de type Airbnb sont fréquentes à Paris et qu'elles concernent souvent des copropriétés qui s'y opposent, parfois avec succès.
Première décision :
" Au soutien de leur appel, MM. A et B Y font valoir, d’une part, que la location en meublé, même de tourisme, constitue une activité civile, d’autre part, que la mise en location par un tiers (société Locaflat) de ces biens, avec d’autres ne leur appartenant pas, ne confère pas à ces locations un caractère commercial, que la qualification fiscale de ces locations est sans incidence sur la nature civile de l’activité exercée ; ils dénient tous troubles anormaux de voisinage et font observer que ceux-ci ne pourraient, en tout état de cause, être invoqués que par les copropriétaires pris individuellement à condition que le locataire et l’appartement précis à l’origine de ce trouble fussent identifiables et identifiés ;
Le syndicat des copropriétaires excipe de l’article 6 du règlement de copropriété selon lequel « les appartements ou locaux ne pourront être occupés que bourgeoisement à l’exception des locaux du rez-de-chaussée qui pourront être occupés commercialement pourvu que les commerces ou industries exploités ne constituent pas des établissements dangereux ou insalubres de nature à incommoder par le bruit ou l’odeur les personnes habitant l’immeuble. L’exercice des professions libérales est toutefois toléré dans les appartements qui pourront être affectés aux études d’officiers publics ou ministériels, de cabinets d’avocats, d’architectes, médecins, agents d’assurances, arbitres de commerce, syndics de faillite et autres bureaux de ce genre, mais à l’exclusion de tous bureaux commerciaux ou administratifs » et en déduit que l’activité de loueur professionnel en meublé, assimilable à une activité commerciale, est prohibée par ladite clause ;
En droit, un règlement de copropriété peut comporter des dispositions restrictives des droits des copropriétaires sur leurs parties privatives, qui sont valables si elles sont justifiées par la destination de l’immeuble ; or, l’immeuble dont il s’agit est, selon le règlement, à destination bourgeoise exclusive, sauf dérogations pour des professions libérales et pour les locaux du rez-de-chaussée qui, seuls, peuvent être occupés commercialement ; or, lorsque un immeuble est à l’usage d’habitation et professionnel et que les lots considérés se trouvent dans un niveau affecté à l’habitation, comme au cas d’espèce, l’affectation à usage commercial est contraire à la fois aux dispositions du règlement de copropriété et à la destination de l’immeuble et implique une autorisation unanime de l’assemblée, non décernée ici ; de plus, l’activité exercée ne peut créer de troubles anormaux de voisinage ;
A cet égard, une location en meublé n’est pas, en elle-même, contraire à la destination de l’immeuble, à moins qu’elle ne s’exerce, comme ici, pour des locations de courte durée avec fournitures de services annexes (ménage, fournitures de literie, transferts vers l’aéroport) qui apparentent cette exploitation à une activité commerciale et non plus civile, étant observé que si l’activité de loueur en meublé est juridiquement de nature civile, elle est fiscalement de nature commerciale, étant imposée au titre des bénéfices industriels et commerciaux, en sorte que c’est sans abus ni dénaturation que le syndicat fait valoir que l’activité exercée par les consorts Y est contraire, dans l’esprit et dans les faits, aux prohibitions du règlement de copropriété ;
Il importe peu que le signataire des baux de courte durée soit l’un des propriétaires ou une société (agence de location) mandatée par le propriétaire, ou encore gérée par un porteur de parts de la société Locaflat et même alors que toutes les locations ne seraient pas systématiquement concédées à des « touristes » au sens du code du tourisme, elles répondent, toutefois, à la définition de l'article D 324-1 du code du tourisme selon lequel les meublés de tourisme sont des villas, appartements ou studios meublés à l’usage exclusif du locataire, offerts en location à une clientèle de passage qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, à la semaine ou au mois et qui n’y élit pas domicile ;
Il est manifeste que les indications du site internet de Locaflat dédié aux locations afférentes aux locaux dont il s’agit ainsi que les baux de durée supérieure à trois mois dont font état les appelants sont postérieurs à l’assignation et au procès-verbal de constat du 28 janvier 2011 et ont été confectionnés pour les besoins de la cause par les intéressés, une des occupantes d’un lot donné en location par M. A Y, Mme Z, de nationalité mexicaine ayant d’ailleurs répondu à la sommation interpellative du 31 janvier 2013 « qu’elle ne donnerait aucune réponse dans la mesure où elle s’était engagée vis-à-vis de l’agence qui lui avait trouvé cet appartement à ne révéler aucun élément quant à ses conditions d’occupation » ;
Enfin, les nuisances diverses occasionnées par les fréquentes rotations de locataires dans l’immeuble nuisent à la tranquillité des copropriétaires et contreviennent ainsi au règlement de copropriété qui interdit tous bruits ou activités dans les appartements de nature à gêner les voisins, cette seule constatation justifiant la cessation de l’activité locative de meublé de courte durée exercée par MM. A et B Y ;
Le syndicat des copropriétaires justifiant par les procès-verbaux des assemblées générales de copropriétaires ayant successivement évoqué ces nuisances depuis l’année 2003 et par une lettre de la présidente du conseil syndical (Mme X) que les locataires des appelants, par la sur-occupation des logements, leurs arrivées tardives ou matinales avec de grosses valises encombrant l’ascenseur, leurs fréquentes allées et venues, leurs bruits nocturnes, les cris et galopades d’enfants jusqu’à tard dans la nuit, leur manque de soins et de considération pour les voisins, le jet de détritus par les fenêtres ou dans les parties communes, les odeurs de cuisine à toute heure, occasionnent des troubles anormaux de voisinage dans l’immeuble, lesquels sont subis par l’ensemble des copropriétaires et sont imputables tant aux locataires de M. A Y qu’à ceux de M. B Y, d’où il suit que, le jugement étant réformé en ce qu’il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages-intérêts, la Cour, statuant à nouveau, condamnera M. A Y, d’une part, M. B Y, d’autre part, à payer au syndicat la somme de 7.000 € chacun, à titre de dommages-intérêts ;
L’équité commande de les condamner également in solidum, au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement dont appel, sauf en ce qu’il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages-intérêts,
Statuant à nouveau de ce chef,
Condamne M. A Y, d’une part, M. B Y, d’autre part, à payer, chacun, au syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé XXX la somme de 7.000 €, à titre de dommages-intérêts,
Les condamne in solidum à payer audit syndicat la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel,
Rejette toute autre demande,
Condamne in solidum MM. A et B Y aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile."
Deuxième décision :
"Vu le jugement du 9 juin 2011 du TGI de Paris, qui a dit que la location saisonnière n’est pas autorisée par le règlement de copropriété et contrevient également à la clause d’habitation bourgeoise qui y est stipulée, a condamné X Y à supprimer les locations saisonnières des appartements Lescot 01, 02, 03&Lescot 01. 02.03 sur les sites internet 'benoitgeorge.com’ et 'escaleaparis.com’ et ce sous astreinte de 500€ par jour d’infraction constatée sur le site, passé le délai de 7 jours suivant la signification du jugement, condamné X Y au paiement de la même astreinte de 500 € par appartement et par jour illicite d’occupation saisonnière dans les lieux constatée par huissier de justice, passé le délai de 7 jours suivant la signification du jugement, condamné X Y à payer à Z A la somme de 3500 € en indemnisation du préjudice subi, et à cette dernière ainsi qu’à la SCI CAPDOMI , chacune une indemnité de 2500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à régler les dépens, le surplus des demandes étant rejeté et l’exécution provisoire étant ordonnée,
vu l’appel du 15 juillet 2011 de X Y,
vu les conclusions du 5 octobre 2011 de l’appelant qui demande à la cour de constater que le règlement de copropriété n’ interdit pas la location saisonnière et que cette dernière ne contrevient pas à la clause d’habitation bourgeoise que stipule ce règlement de copropriété, dire que le trouble anormal de voisinage n’est pas caractérisé, de débouter Z A et la SCI CAPDOMI de toutes leurs demandes, subsidiairement dire la condamnation sous astreinte excessive et injustifiée, constater que X Y a cessé son activité et dire n’y avoir lieu à condamnation sous astreinte, à titre infiniment subsidiaire réduire le montant de l’astreinte et dire qu’elle commence à courir le 8 septembre 2011, en tout état de cause condamner la SCI CAPDOMI et Z A à payer à X Y une somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à régler les entiers dépens,
vu les conclusions des intimés du 15 décembre 2011,
vu l’ordonnance du 22 février 2012 par laquelle le conseiller de la mise en état a dit irrecevable ces conclusions des intimés faute pour eux d’avoir conclu dans le délai de l’article 909 du code du procédure civile,
vu l’ordonnance du 9 janvier 2013 par laquelle le conseiller de la mise en état a dit irrecevables les conclusions prises le 9 et le 22 novembre par les intimées et toutes pièces communiquées par ces dernières et interrogé les parties sur la recevabilité des écritures de l’appelant du 15 février 2012,
vu l’ordonnance du 20 février 2013 par laquelle le conseiller de la mise en état a dit irrecevables les conclusions de l’appelant du 15 février 2012 et dit que la cour n’est saisie que des seules écritures de l’appelant du 5 octobre 2011 et a fixé les dates de clôture et de plaidoiries,
vu l’ordonnance de clôture du 6 mars 2013,
SUR CE
Considérant, au vu des pièces produites, que X Y, après avoir acquis le lot 16, a obtenu l’autorisation de le subdiviser en quatre lots 42 à 45 constitué chacun d’un appartement distinct qu’il a proposé à la location saisonnière, que la SCI CAPDOMI dont Z A est cogérante, qui est propriétaire des lots 21 et 22 constitués d’un appartement en duplex situé au 4e et 5 ème étage qui est mitoyen de l’ancien lot 16, s’est plainte de nuisances olfactives et sonores qui seraient le fait des locataires de X C, et a assigné ce dernier en réparation du préjudice subi, en se prévalant notamment de ce que ces locations saisonnières étaient contraires aux dispositions du règlement de copropriété et notamment à la clause d’habitation bourgeoise qu’il stipule ;
Considérant que, pour critiquer le jugement, X Y prétend que :
— il a créé un site internet ' benoitgeoge.com ' en vue de louer des appartements meublés pour de courtes périodes,
— le règlement de copropriété, s’il interdit expressément 'la transformation des appartements en chambres meublées destinées à être louées à des personnes distinctes, ne vise en aucun cas la location saisonnière, tandis que si l’obligation faite par ce règlement au bailleur d’informer le syndic dans les quinze jours de l’entrée en jouissance d’un locataire met en évidence les difficultés de mise en application de ce règlement et son inadaptation à l’activité qu’il exerce, on ne saurait déduire de cette clause une interdiction de la location saisonnière,
— la location saisonnière n’est pas, par principe, incompatible avec une clause d’occupation bourgeoise dont la finalité est de faire obstacle à des usages illicites ou contraire aux bonnes moeurs alors surtout que la clause de l’article 7 qui se réfère à l’occupation bourgeoise des appartements admet dans l’immeuble l’exercice d’activités commerciales, que si l’intention des copropriétaires avait été d’interdire les locations, ils auraient interdit de façon générale la division des lots ou leur aliénation autrement qu’en totalité,
— l’anormalité du trouble de voisinage n’a pas été caractérisée, au regard de la rénovation et de l’insonorisation des appartements, d’attestations dénuées de pertinence comme émanant de la famille de Z A seule à se plaindre, de la simple reconnaissance par X Y d’un fait ponctuel, de l’absence d’élément objectif, des diligences accomplies par le bailleur pour faire respecter la tranquillité des voisins,
— les condamnations sous astreintes sont injustifiées et disproportionnées, le tribunal n’ayant pas donné un délai suffisant pour que X C puisse s’exécuter ce qu’il fera néanmoins puisqu’il a définitivement cessé son activité en septembre2011 en supprimant les appartements des sites internet,
Considérant que selon le règlement de copropriété, l’immeuble est destiné à un usage mixte commercial et d’habitation (art. 5 ), que les appartements ne pourront être occupés que bourgeoisement à l’exception des locaux à usages commerciaux qui seront occupés commercialement ( art. 7 ), que les copropriétaires pourront louer leur lot comme bon leur semblera à condition que les locataires soient de bonne vie et moeurs et qu’ils respectent les prescriptions du règlement ainsi que la destination de l’immeuble, que lorsqu’un bail ou un engagement de location a été consenti, le copropriétaire devra, dans les quinze jours de l’entrée en jouissance du locataire, en aviser le syndic par lettre recommandée, que la transformation des appartements en chambres meublées destinées à être louées à des personnes distinctes est interdite, en revanche la location en meublé est autorisée,
Considérant que s’évince de ces dispositions que l’activité commerciale ne pouvait être exercée que dans les locaux commerciaux distincts des appartements soumis à une clause d’occupation bourgeoise faisant obstacle à une utilisation des dits appartements à des fins professionnelles, ce que ne contredit pas la faculté de louer l’appartement hors toute activité de loueur professionnel ;
Considérant que, de plus, la location n’était autorisée que par appartement entier avec faculté de location en meublé, que celle – ci est réglementée notamment par l’article L 632-1 du CCH et implique une certaine durée, qui l’oppose à la location saisonnière ;
Considérant que selon le site internet benoîtgeorge.com, ce dernier était dédié à la location d’appartements meublés à titre professionnel, pour de courtes périodes, ce que confirme une tarification à la semaine ;
Considérant que ce mode de location tant par son exercice à titre commercial dans des appartements qui excluaient l’activité commerciale que par la durée limitée de la location confirmée notamment par la production d’un contrat pour quatre nuits générant une rotation importante du nombre de locataires, aggravée par le fait que X C se réservait la faculté de louer l’ensemble des 4 lots soit deux studios, un deux pièces de façon groupée jusqu’à 14 personnes, est incompatible avec la clause d’occupation bourgeoise stipulée au règlement de copropriété ;
Considérant qu’il y a lieu par voie de conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné X Y à supprimer sous astreinte de 500 € de son site l’offre de location saisonnière des appartements concernés, et à payer une astreinte de 500 € par infraction constatée de journée illicite d’occupation,
Considérant que si le fait d’imposer à un copropriétaire mitoyen une location saisonnière illicite comme contraire à une clause d’occupation bourgeoise stipulée au règlement de copropriété est susceptible de provoquer un trouble dépassant les inconvénients normaux du voisinage, c’est à la condition que ce trouble soit caractérisé par des circonstances de fait précises et objectives, ce qui n’est pas en l’espèce le cas, du fait que les pièces communiquées par les intimés devant la cour ont été déclarées irrecevables, et que le jugement ne s’est référé qu’à des attestations de la famille ou d’amis d’Z A dont la pertinence et l’objectivité peuvent être de ce fait mises en cause ;
Considérant que par suite, Z A, par réformation du jugement, est déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour trouble de jouissance ;
Considérant que les conditions d’application de l’article 700 du code de procédure civile ne sont pas réunies, le jugement étant confirmé surcet article ;
Considérant que X Y est condamné aux dépens d’appel, le jugement étant confirmé en ses dispositions relatives aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Réforme le jugement sur la condamnation prononcée contre Benoit Y au profit de Z A pour trouble de jouissance ;
Le confirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant ,
Déboute Z A de sa demande de dommages et intérêts pour trouble de jouissance,
Rejette le surplus des demandes,
Condamne X Y aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile."