Cet arrêt juge que le propriétaire bailleur est responsable pénalement de la violation des règles d'urbanisme par son locataire, dès lors que "s'il est constant que le prévenu n'a pas lui-même entreposé les conteneurs litigieux sur la parcelle dont il est propriétaire, il est responsable du respect sur son fonds de la réglementation en matière d'urbanisme, dont il a connaissance et qu'ayant conclu plusieurs contrats de location terrain nu avec diverses entreprises de travaux publics et de transport, il ne saurait s'exonérer de cette responsabilité pénale, dès lors qu'il avait le pouvoir, selon les stipulations des baux, de contraindre les preneurs à respecter les règles d'urbanisme lors de leurs travaux, dont il est donc le véritable bénéficiaire, du fait du cadre juridique qu'il a mis en place et des loyers qui en sont la contrepartie et que ses preneurs lui versent".
"Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1 du protocole additionnel n° 1 à ladite Convention, L. 121-1 du code pénal, L. 123-1 à 5, L. 123-19, L. 160-1 al. 1, L. 421-1, L. 480-4 al. 1, L. 480-5 et L. 480-7 du code de l'urbanisme, R. 421-1 et R. 421-14 du même code, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné le requérant du chef d'exécution de travaux sans permis et d'infraction aux dispositions du POS à une amende de 2 000 euros assortie d'un sursis partiel et de la peine complémentaire de mise en conformité des lieux sous astreinte dans un délai de dix-huit mois ;
"aux motifs que, sur la culpabilité sur l'infraction d'exécution de travaux non autorisés par un permis de construire, le prévenu fait valoir qu'il n'existe en réalité aucune construction sur le site, mais seulement des containers entreposés par les locataires du prévenu sans être attachés à perpétuelle demeure ; que l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme énonce que les constructions, même ne comportant pas de fondations, doivent être précédées de la délivrance d'un permis de construire ; qu'il en résulte qu'il importe donc peu que les constructions considérées comportent ou non des fondations ; que les constructions nouvelles ainsi visées pourraient avoir un caractère permanent ou temporaire ; que les ouvrages posés sur le sol (caravanes, maisons mobiles ou containers en fonction de leurs dimensions) sont soumis à permis de construire ; qu'il résulte du procès-verbal dressé par la DEAL versé à la procédure et pareillement du constat d'huissier du 28 juin 2016 dressé à la demande du prévenu, que sur plusieurs petites parcelles subdivisant la parcelle de terre cadastrée section n° 153 lui appartenant, se trouvent entreposés plusieurs containers de 20 et 40 pieds (entre 6 et 12 mètres - les conteneurs de ces séries ont la même largeur, soit 8 pieds (243,84 cm)) dont un, surmonté d'un toit, des socles en béton au sol sur lesquels sont généralement entreposées des constructions modulaires de 20 pieds ; que la DEAL relève dans son rapport qu'il existe une sorte de hangar à usage de bureaux ou d'atelier, dont la surface de l'emprise au sol est de 60 m2 environ et une surface de plancher de 55 m ; que l'entreposage permanent ou temporaire de ces constructions sur la parcelle du prévenu aurait donc dû être précédé de la délivrance d'un permis de construire pour les plus étendues ; que, sur l'infraction aux dispositions du plan local d'urbanisme ou du plan d'occupation des sols, il résulte de l'article L. 160-1 du code de l'urbanisme que la méconnaissance des dispositions des projets d'aménagement et des plans d'urbanisme ou les infractions aux dispositions des plans d'occupation des sols, des plans locaux d'urbanisme, sont sanctionnées par référence aux dispositions de l'article L. 480-4 du même code ; qu'il ressort du rapport de la DEAL versé à la procédure que l'existence de ces installations telles que décrites dans son procès-verbal sur la parcelle du prévenu est incompatible à la destination d'un site voué à l'agriculture et est non-conforme au plan d'occupation des sols qui classe la parcelle de terre en zone non-constructible ; que, sur la responsabilité pénale du prévenu, le conseil de M. X... demande à la cour de prononcer la relaxe des fins de la poursuite du prévenu au motif que selon l'article 121-1 du code pénal, nul n'est responsable que de son propre fait ; qu'il se prévaut de contrats de location de terrain nu qu'il a conclu avec des sociétés ayant entreposé les containers litigieux sur sa parcelle de terre, afin de s'exonérer de toute responsabilité pénale du chef des infractions au code de l'urbanisme reprochées ; qu'il est constant que le prévenu n'a pas lui-même entreposé les conteneurs litigieux sur les différentes sous-parcelles venant subdiviser la parcelle de terre cadastrée section n° 153 lui appartenant ; que toutefois, le prévenu, en tant que propriétaire de la parcelle de terre à vocation agricole sur laquelle les infractions au code de l'urbanisme ont été relevées et qui lui sont reprochées, est responsable du respect sur son fonds de la réglementation en matière d'urbanisme, dont il a connaissance ; qu'il a néanmoins conclu plusieurs contrats de location terrain nu avec diverses entreprises de travaux publics et de transport sur des terrains de 500 à 2 500 mètres carrés, pour des durées variables de 4 à 10 ans, moyennant des loyers de 250 à 1 000 euros ; qu'ainsi, par exemple ont été versés à la procédure des contrats de location de terrain nu avec la société STPP (société de travaux publics et privés) conclu le 7 février 2012 sur 2 000 m2 pour 600 euros de loyer ; la société Eurotrans - contrat du 29 novembre 2011 sur 2.500 m2 pour 500 euros de loyer ; la société Socotrans le 4 décembre 2013 sur une parcelle de 1 500 m2 pour 700 euros de loyer ; la société AR Constructions : contrat du 1er décembre 2016 pour 600 euros de loyer sur la parcelle 2 ; qu'il a admis lors de l'audience qu'il tirait ses moyens de subsistance de la location de ces terrains nus ; que dans la mesure où il loue, en toute connaissance de cause, tel que cela résulte de la procédure initiée par la DEAL, un terrain agricole non constructible à des entreprises de travaux publics et de transport afin qu'elles puissent y placer des conteneurs servant de bâtiments préfabriqués moyennant des loyers pouvant aller jusqu'à 1 000 euros par parcelle, il est en réalité le bénéficiaire de ces constructions illégales ; que de surcroît, dans tous les baux versés à la procédure qu'il a conclu avec divers preneurs, il est stipulé à l'article 6, «Urbanisme et servitude », que « le preneur fera son affaire personnelle de toute servitudes de nature administrative ou autres, qui peuvent ou pourront grever la propriété louée, sauf à s'en défendre et à profiter de celles actives, s'il y a lieu ; qu'à cet égard, le bailleur déclare qu'à sa connaissance, la propriété n'est grevée d'aucune autre servitude que celles pouvant résulter de la situation naturelle des lieux, des documents d'urbanisme tels qu'ils sont mentionnés dans la note de renseignements d'aménagement » ; que l'article 7, «Construction » stipule : « le preneur n'aura pas la faculté de faire édifier sur le terrain présentement loué, une maison à usage d'habitation et de faire sur ce terrain tous les aménagements qu'il jugera utile sans le consentement écrit du bailleur » ; que l'article 12, « Conditions résolutoires » est ainsi rédigé : « Toutes les conditions du présent bail sont de rigueur ; qu'à défaut par le preneur d'exécuter une seule d'entre elles, la résiliation du bail sera encourue de plein droit, si bon semble au bailleur, un mois après une mise en demeure de payer ou d'exécuter restée sans effet et énonçant la volonté du bailleur d'user du bénéfice de la présente clause... » ; que le prévenu ne saurait dès lors s'exonérer de sa responsabilité pénale sur les preneurs des baux qu'il a consentis en subdivisant sa parcelle, dès lors qu'il avait le pouvoir, selon les stipulations de ces mêmes baux, de contraindre les preneurs à respecter les règles d'urbanisme dont la violation a été constatée ; qu'or, force est de constater qu'il ne justifie pas d'avoir usé de ses prérogatives de bailleur auprès des preneurs à l'effet de faire cesser les atteintes les dispositions du code de l'urbanisme qui lui sont reprochées et dès lors qu'il en est le véritable bénéficiaire, du fait du cadre juridique qu'il a mis en place et des loyers qui en sont la contrepartie et que ses preneurs lui versent ; qu'il sera donc retenu dans les liens de la prévention s'agissant des deux infractions reprochées ; que, sur les peines, les faits imputés au prévenu revêtent une certaine gravité eu égard à l'ampleur des infractions aux règles de l'urbanisme constatées dans la zone litigieuse et en ce qu'ils portent atteinte à la protection d'une zone naturelle à préserver en raison de sa richesse intrinsèque telle que souligné par la DEAL ; que le casier judiciaire de M. X... ne porte trace d'aucune condamnation ; qu'il est père de famille avec quatre enfants à charge et se dit sans ressources, hormis les loyers perçus sur la location des parcelles de son terrain ; que dans ce contexte, il convient de confirmer la peine d'amende avec sursis partiel prononcée par les premiers juges ; qu'afin de garantir l'effectivité de la condamnation et la restauration des lieux conformément à leur destination, le jugement entrepris sera en outre confirmé en ce qu'il a ordonné à M. X... la mise en conformité des lieux ou des ouvrages dans un délai de dix-huit mois et ce sous astreinte de cinq euros par jour de retard ;
"1°) alors qu'en matière pénale, nul n'est responsable que de son propre fait ; qu'ainsi, le bailleur n'est pas pénalement responsable du fait de son preneur, lui-même tenu par son bail de respecter la réglementation d'urbanisme applicable ; qu'en retenant néanmoins la culpabilité du requérant qui n'avait ni entrepris ni autorisé les travaux litigieux, à raison seulement du caractère onéreux de la location de sa propriété, réputant ainsi le bailleur « bénéficiaire » desdits travaux, la cour a méconnu le principe de personnalité de la responsabilité pénale et violé les textes visés au moyen ;
"2°) alors qu'en retenant la culpabilité du bailleur qui n'avait cependant ni entrepris ni autorisé les travaux litigieux, aux motifs qu'il n'avait pas utilisé ses prérogatives auprès des preneurs à l'effet de faire cesser les infractions litigieuses, la cour a derechef violé le principe de personnalité de la responsabilité pénale, ensemble les textes visés au moyen ;
"3°) alors qu'en prêtant le caractère d'une "construction" au sens de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme à des containers dont elle relève qu'ils peuvent être posés sur place de façon permanente ou temporaire, sans autrement s'expliquer sur leur mobilité, laquelle était de nature à interdire la qualification de "construction", la cour a privé son arrêt de toute base légale au regard du texte précité ;
"4°) alors qu'en l'état du classement des lieux par le POS en zone non constructible, réserve faite des ouvrages techniques d'exploitation agricole et forestière (art. NC1 al. 1-1 du règlement du POS tel que cité dans le PV des services), la cour, qui n'a pas recherché si la destination des terrassements visés à la prévention n'était pas conforme aux prévisions du POS, a derechef privé son arrêt de toute base légale au regard de l'article L. 160-1 du code de l'urbanisme ;
"5°) alors qu'aux termes de l'article L. 480-5 du code de l'urbanisme, le juge correctionnel qui retient une infraction en matière d'urbanisme ne peut statuer sur la mise en conformité qu'au vu des observations écrites ou après audition du maire ou du fonctionnaire compétent ; que les énonciations de l'arrêt n'établissent pas qu'il ait été satisfait en l'espèce aux formalités substantielles imposées par le texte précité ;
"6°) alors, en tout état de cause, que le juge correctionnel qui ordonne la mise en conformité des lieux sous astreinte doit impartir un délai d'exécution et préciser son point de départ ; que les énonciations de l'arrêt fixant, par adoption des motifs du tribunal, un délai d'exécution de dix-huit mois sous astreinte, ne sont assorties d'aucune précision utile sur le point de départ du délai ; qu'ainsi, les dispositions de l'article L. 480-7 du code de l'urbanisme ont derechef été violées" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que M. X..., propriétaire d'une parcelle de terre classée par le plan d'occupation des sols en zone non constructible, réserve faite des bâtiments et équipements techniques d'exploitation agricole, l'a divisée et donnée à bail à divers entrepreneurs pour y déposer des matériaux, engins, véhicules hors d'usage, moyennant un loyer ; que des agents de la direction de l'environnement de l'aménagement et du logement ont constaté la construction d'un hangar et la pose de conteneurs, outre des travaux de terrassement ; que poursuivi pour constructions sans permis et violation du plan d'occupation des sols, M. X... a été condamné au paiement d'une amende, la mise en conformité des lieux ou des ouvrages dans un délai de dix-huit mois sous astreinte étant en outre ordonnée ; qu'il a relevé appel, ainsi que le ministère public ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable des deux infractions poursuivies et confirmer le jugement tant sur la peine que sur la mesure de remise en état dans les dix-huit mois de la décision, la cour d'appel énonce que s'il est constant que le prévenu n'a pas lui-même entreposé les conteneurs litigieux sur la parcelle dont il est propriétaire, il est responsable du respect sur son fonds de la réglementation en matière d'urbanisme, dont il a connaissance et qu'ayant conclu plusieurs contrats de location terrain nu avec diverses entreprises de travaux publics et de transport, il ne saurait s'exonérer de cette responsabilité pénale, dès lors qu'il avait le pouvoir, selon les stipulations des baux, de contraindre les preneurs à respecter les règles d'urbanisme lors de leurs travaux, dont il est donc le véritable bénéficiaire, du fait du cadre juridique qu'il a mis en place et des loyers qui en sont la contrepartie et que ses preneurs lui versent ; que les juges ajoutent qu'un hangar et des conteneurs de grande taille (6 m ou 12 m) déposés sur une dalle ad hoc, constituent des constructions, au sens de l'article L.421-1 du code de l'urbanisme, qui sont soumises à permis de construire, le prévenu n'ayant invoqué ni la faible emprise au sol ni le caractère d'habitation ou de loisir des édifices et aménagements litigieux ; qu'enfin, s'agissant de la violation du plan d'occupation des sols, l'arrêt décrit précisément les ouvrages litigieux, pour en déduire qu'ils n'ont manifestement rien d'agricole :
Sur le moyen, pris en ses cinq premières branches :
Attendu qu'en statuant comme elle l'a fait, dès lors qu'elle a, d'une part, apprécié par des motifs dépourvus d'insuffisance comme de contradiction que le prévenu avait la qualité de bénéficiaire des travaux au sens de l'article L.480-4 du code de l'urbanisme et, d'autre part, démontré le caractère de constructions soumises à l'obtention d'un permis et d'aménagements prohibés par le plan d'occupation des sols la cour d'appel a justifié sa décision, abstraction faite de la qualification erronée de peine complémentaire donnée à la remise en état ;
Sur le moyen, pris en sa sixième branche :
Attendu qu'ayant déterminé le délai dans lequel la remise en état devrait être effectué, et dès lors que ce délai commençait nécessairement à courir, par application des articles 569, 708 et 617 du code de procédure pénale, à compter du jour où la décision sera passée en force de chose jugée ou, en cas de pourvoi, à compter du jour où la décision, devenue définitive, est exécutoire, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre octobre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre."