Voici un arrêt rendu par la Cour de cassation reproche aux premiers juges d'avoir omis d'examiner si les restrictions d'urbanisme posé par le plan local d'urbanisme pouvaient être considérées comme compatibles avec la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'elles interdisaient l'installation de caravanes et de cabanons sur un terrain.
"Vu l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 11 septembre 2013), que Mme Anne X...est propriétaire d'une parcelle cadastrée AL173 située à Herblay ; que, se plaignant de l'installation sur ce terrain de cabanons de jardin et de plusieurs caravanes occupées par Mmes Anne et Catherine X...et par MM. Louis et Jonathan X...et André Y...et leurs enfants et se fondant sur l'infraction aux dispositions du plan local d'urbanisme (PLU) tenant à l'installation de ces ouvrages, la commune d'Herblay les a assignés en référé pour en obtenir l'enlèvement ;
Attendu que, pour accueillir la demande de la commune, l'arrêt retient que la parcelle appartenant à Mme X...est située dans un espace boisé classé comme zone naturelle, dans laquelle le PLU interdit l'implantation de constructions à usage d'habitation, les terrains de camping ou de caravanage ainsi que l'implantation d'habitations légères de loisir et le stationnement de caravanes à l'usage de résidence principale ou d'annexe à l'habitation, qu'il est établi et non contesté que les consorts X..., après avoir défriché et aménagé le terrain, y ont installé cinq caravanes, une construction modulaire à usage de cuisine, sur un revêtement en ciment, et deux petits cabanons de jardin en tôle en violation des interdictions édictées par les dispositions du PLU et, s'agissant des algéco et cabanons de jardin, sans déclaration préalable, en infraction à l'article R. 421-9 du code de l'urbanisme, et que l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et le droit au logement ne peuvent faire obstacle au respect des règles d'urbanisme ni faire disparaître le trouble résultant de leur violation ou effacer son caractère manifestement illicite ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les mesures ordonnées étaient proportionnées au regard du droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile des consorts X..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 septembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la commune d'Herblay aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour Mme Anne X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné Madame X...à procéder à l'évacuation des caravanes stationnées sur la parcelle cadastrée AL 173, sis ...à Herblay et à procéder à la démolition de tous les ouvrages en dur (cabanon tôle et algeco) ainsi qu'à la remise en état initial dans un délai de 2 mois, à défaut passé ce délai autorisé la commune à se substituer à Madame X...pour y procéder à ses frais ;
AUX MOTIFS QU'à l'appui de leur recours et pour s'opposer aux demandes de la commune d'Herblay, les consorts X...soutiennent que le stationnement de leurs caravanes et les algéco et cabanons de jardin qu'ils ont installé sur leur terrain ne sont pas à l'origine d'un trouble manifestement illicite, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, dès lors que la légalité du PLU de la commune d'Herblay est contestable en l'absence de réalisation d'une aire de stationnement d'une capacité suffisante pour accueillir les gens du voyage ; qu'ils ajoutent que l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme de même que le droit au logement, principe à valeur constitutionnelle, doivent primer sur les dispositions du code de l'urbanisme et du PLU de la commune d'Herblay ; que cependant, il n'est pas discuté que le terrain appartenant à Madame Anne X..., cadastré AL 173, est situé dans un espace boisé classé et dans la zone classée N ¿ « zones naturelle » ¿ du PLU de la commune d'Herblay dont les dispositions applicables à cette zone interdisent notamment « l'implantation des constructions à usage d'habitation », « les terrains de camping ou de caravanage ainsi que ceux affectés à l'implantation d'habitations légères de loisirs », « le stationnement des caravanes à usage de résidence principale ou d'annexe à l'habitation », « dans les espaces boisés classés, tout changement d'affectation des terrains et tous modes d'occupation des sols de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création de boisements » ; qu'il est établi par le « rapport d'intervention » de la police municipale d'Herblay en date du 7 avril 2009 et les constats en date des 5 mets 2009, 11 juin 2010 et 16 novembre 2011 de Me Marc Z...., huissier de justice, et n'est, au demeurant, pas contesté par les appelants, que ceux-ci, après avoir défriché et aménagé le terrain litigieux, y ont installé, tel que relevé lors du dernier constat dressé le 16 novembre 2011, une caravane immatriculée ...occupée par les époux Anne et Louis X...ainsi que leur fille Medy et leur servant de résidence principale, deux caravanes immatriculées ...et ..., occupées par M. Jonathan X...et sa fille Jennifer, et deux autres caravanes immatriculées ...et ... occupées par Madame Catherine X..., Monsieur André Y...et leurs enfants Logan et Rayley qu'ont aussi été installés un algéco à usage de cuisine, sur un revêtement ciment, et deux « petits cabanons de jardin en tôle » ; que de tels aménagements, stationnement et installations en violation des interdictions édictées par les dispositions précitées du PLU et, s'agissant des algécos et cabanons de jardin, sans déclaration préalable, en infraction à l'article R421 ¿ 9 du code de l'urbanisme, caractérisent un trouble manifestement illicite, contrairement à ce que soutiennent les consorts X...qui n'établissent en aucune manière l'illégalité du PLU qu'ils invoquent ; qu'en outre et comme l'a retenu le premier juge, l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et le droit au logement ne peuvent faire obstacle au nécessaire respect des règles d'urbanisme ni faire disparaître le trouble résultant de leur violation ou effacer son caractère manifestement illicite ; que c'est ainsi par une juste appréciation des faits qui lui étaient soumis que le premier juge a, par application des dispositions de l'article 809 alinéa 1 du code de procédure civile, ordonné les mesures propres à mettre un terme à ce trouble, mesures non critiquées par la commune d'Herblay et qui doivent donc être confirmées ; que le premier juge a exactement statué sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en conséquence l'ordonnance entreprise doit être confirmée en toutes ses dispositions déférées ;
1°) ALORS QUE toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile ; qu'il ne peut être porté atteinte à ce droit que par des mesures nécessaires à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; que ne relève pas de ces mesures strictement nécessaires, une décision ordonnant en référé l'évacuation des caravanes et la destruction de tous les ouvrages en dur appartenant à un habitant du voyage, propriétaire de la parcelle sur laquelle est ainsi établi son domicile, quand la commune a toléré cette situation depuis des années et qu'elle n'est pas en mesure de fournir un nombre suffisant de places de stationnement pour les gens du voyage, conformément aux dispositions légales relatives aux conditions d'accueil spécifiques des gens du voyage ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 809 du code de procédure civile et 544 du code civil ;
2°) ALORS QUE toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale et de son domicile ; qu'il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que les intéressés ont bénéficié d'un examen de la proportionnalité de l'ingérence conforme aux exigences de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en ordonnant en référé l'évacuation des caravanes et la destruction de tous les ouvrages en dur appartenant à un habitant du voyage, propriétaire de la parcelle sur laquelle est ainsi établi son domicile, sans procéder, comme elle y était pourtant invitée par la requérante dans ses conclusions d'appel, à un examen de la proportionnalité de la mesure au regard notamment de l'ancienneté de l'occupation dans les lieux, de la longue tolérance de la commune, de l'absence de possibilité de relogement, et de l'absence de droits de tiers en jeu, la cour d'appel a violé l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile ; qu'il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que les intéressés ont bénéficié d'un examen de la proportionnalité de l'ingérence conforme aux exigences de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en ordonnant en référé l'évacuation des caravanes et la destruction de tous les ouvrages en dur appartenant à un habitant du voyage, propriétaire de la parcelle sur laquelle est ainsi établi son domicile, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée par la requérante dans ses conclusions d'appel, si la mesure était proportionnée au regard notamment de l'ancienneté de l'occupation dans les lieux, de la longue tolérance de la commune, et de l'absence de possibilité de relogement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 809 du code de procédure civile."