Voici un arrêt qui rappelle que le syndic doit être autorisé à agir en justice, et qui cite les exceptions à ce principe.
"Vu l'article 55, alinéa 2, du décret du 17 mars 1967 ;
Attendu que le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale ; qu'une telle autorisation n'est pas nécessaire pour les actions en recouvrement de créance, la mise en oeuvre des voies d'exécution forcée à l'exception de la saisie en vue de la vente d'un lot, les mesures conservatoires et les demandes qui relèvent du juge des référés, ainsi que pour défendre aux actions intentées contre le syndicat ;
Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (juridiction de proximité de Saint-Martin, 11 décembre 2013), que les syndicats des copropriétaires des ensembles immobiliers Villas Macassi, Carribean Princess et La Varangue bleue (les syndicats) ont assigné la société Compagnie générale des eaux Guadeloupe (la société) en remboursement de sommes qu'ils estimaient avoir indûment payées pour assurer la réparation d'une fuite sur une canalisation d'adduction d'eau potable ;
Attendu que, pour rejeter le moyen d'irrecevabilité présenté par la société et condamner celle-ci à rembourser aux syndicats le montant des réparations et à leur payer des dommages-intérêts, le jugement retient que l'action des syndicats dirigée contre la société vise à faire reconnaître qu'ils ont payé sans devoir y être tenus ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'action du syndic en remboursement de sommes payées au titre de la réparation de la canalisation, qui supposait au préalable d'apprécier qui devait prendre en charge les travaux, nécessitait une autorisation de l'assemblée générale, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 11 décembre 2013, entre les parties, par la juridiction de proximité de Saint-Martin ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Pointe-à-Pitre ;
Condamne les syndicats des copropriétaires des ensembles immobiliers Villas Macassi, Carribean Princess et La Varangue bleue aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour la Société générale des eaux Guadeloupe.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR retenu la recevabilité de l'action introduite par les Syndicats de copropriétaires demandeurs ; dit que la Société GDEG, délégataire du service public de l'eau, est tenue de l'obligation d'entretien du réseau situé avant le compteur individuel ou le compteur général d'immeuble pour un immeuble collectif d'habitation ; dit que la réparation de la fuite sur la conduite principale située rue des Amers est à la charge exclusive de la Société GDEG sans exigence de paiement préalable à intervention ; en conséquence, condamné la Société GDEG à rembourser les sommes de : 915,83 € au SDC de l'ensemble immobilier VILLAS MACASSI, 915, 83 € au SDC de l'ensemble immobilier CARIBBEAN PRINCESS et 915, 83 € au SDC de l'ensemble immobilier LA VARANGUE BLEUE ; dit que ces sommes emporteront intérêts au taux légal à compter du jugement et condamné la Société GDEG à payer à chacun des Syndicats de copropriétés la somme de 750 € à titre de dommages et intérêts, outre la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « sur la recevabilité de l'action introduite par le syndicat des copropriétaires demandeurs : si la loi du 10 juillet 1965 prévoit expressément que le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires que s'il y a été autorisé par décision de l'assemblée générale des copropriétaires, en revanche, l'article 55 du décret du 17 mars 1967 l'autorise à exercer l'action en répétition de l'indu et en recouvrement des créances sans y avoir été autorisé ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que l'action des demandeurs dirigée contre la GDEG vise à obtenir la reconnaissance qu'ils ont payé sans devoir y être tenus, de sorte que l'action est parfaitement recevable »
ALORS QUE l'action en recouvrement de charges du syndic, qui dispense le syndic de toute autorisation par assemblée générale, s'entend de la seule action dont l'objet direct et immédiat est le recouvrement de sommes et qui ne requiert pas au préalable l'appréciation de l'existence de la créance ; que l'action du syndic qui prétend au remboursement d'une facture de travaux en raison de ce que le syndicat n'en serait prétendument pas le débiteur, qui suppose d'apprécier la réalité de la créance litigieuse, ne peut s'analyser en une action en recouvrement de charges si bien qu'elle requiert une autorisation de l'assemblée générale du syndicat ; qu'en l'espèce il est constant que l'action en remboursement des travaux réalisés par l'exposante supposait d'apprécier le contenu de la convention de service public d'eau du 23 mars 2006 par laquelle la Collectivité d'outre-mer de Saint-Martin a délégué ce service public à la Société GDEG, pour déterminer s'il y avait bien lieu à répétition des sommes versées en faveur du syndicat ; qu'une telle action ne pouvait s'analyser en une action en recouvrement de charges au sens de l'article 55 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ; en retenant le contraire pour dire que cette action était recevable sans décision de l'assemblée générale des copropriétaires, la juridiction de proximité de Saint-Martin a violé ledit article.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR dit que la Société GDEG, délégataire du service public de l'eau, est tenue de l'obligation d'entretien du réseau situé avant le compteur individuel ou le compteur général d'immeuble pour un immeuble collectif d'habitation ; dit que la réparation de la fuite sur la conduite principale située rue des Amers est à la charge exclusive de la Société GDEG sans exigence de paiement préalable à intervention ; en conséquence, condamné la Société GDEG à rembourser les sommes de : 915,83 € au SDC de l'ensemble immobilier VILLAS MACASSI, 915, 83 € au SDC de l'ensemble immobilier CARIBBEAN PRINCESS et 915, 83 € au SDC de l'ensemble immobilier LA VARANGUE BLEUE ; dit que ces sommes emporteront intérêts au taux légal à compter du jugement et condamné la Société GDEG à payer à chacun des Syndicats de copropriétés la somme de 750 € à titre de dommages et intérêts, outre la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « sur la demande principale de remboursement : aux termes des débats, la GDEG oppose à la demande de remboursement qui lui est présentée à la fois la circonstance que les canalisations enfouies sous terre et devenues immeubles par destination sont la propriété du lotissement privé « les Résidence de la Baie Orientale » dont l'ASL aurait l'obligation d'entretien et réparation, ainsi que le caractère réglementaire du contrat de délégation de service public à l'égard des abonnés, prévoyant que le joint du compteur collectif implanté sur le domaine public matérialise la limite entre les réseaux publics et privés ; que cette analyse de la situation par la défenderesse qui aurait mérité discussion sur le premier postulat selon lequel l'ASL aurait sollicité puis contracté avec CDEG en vue d'obtenir un branchement collectif pour la fourniture de l'eau pour l'ensemble des copropriétés de l'association, et convenu aussi des modalités relatives à son installation, mais aussi sur le second selon lequel la dite installation revêtirait un caractère obligatoire, alors que rien de tel ne figure, ni dans le contrat de délégation du service public avec la Collectivité, ni non plus dans le règlement, seuls étant évoquées les conditions de branchement dans « les immeubles collectifs », sera par conséquent purement et simplement écartée comme moyen utile au règlement du présent litige, au profit de l'examen des clauses du contrat portant sur le branchement mais aussi le compteur, lesquelles constituent la loi des parties au sens de l'article 1134 du code civil ; qu'à cet égard, comme valablement exposé par les demandeurs, il ressort très clairement du paragraphe 4 du règlement du service de l'eau que d'une part : - le branchement fait partie du réseau public ; et que parmi ses éléments est comprise notamment par rapport à l'objet du litige : « la canalisation située tant en domaine public qu'en domaine privé » ; que figure également dans la définition du branchement, le dispositif d'arrêt, c'est-à-dire un robinet situé avant compteur, muni d'un système inviolable, ce qui permet de déterminer au même paragraphe, la limite de séparation avec le réseau privé qui commence donc « au joint situé après le système de comptage » correspondant à l'application du bon sens, puisque le distributeur doit s'assurer du calcul de la consommation de ses abonnés ; que ces éléments constitutifs du branchement sont ceux qui apparaissent dans le contrat de délégation de service public, en son article 5.4 qui précise : « la partie publique du branchement est la partie entre la canalisation principale le le compteur; y compris le compteur et les équipements complémentaires (robinets avant compteur; lés de purge, clapets anti-retour). La partie privée du branchement est constituée par le reste de l'installation jusqu'à l'immeuble » ; qu'appliquée aux immeubles collectifs cette définition participe du même bon sens que précédemment puisqu'il est précisé juste après que les installations privées de distribution, c'est-à-dire les canalisations et appareillages situés entre le compteur général d'immeuble et les compteurs individuels, appartiennent au propriétaire de l'immeuble, et n'impacte en rien non plus les obligations du délégataire qui suivent ; qu'en effet, l'article poursuit : « l'entretien, les réparations et le renouvellement ainsi que le maintien en conformité de la partie publique, et par conséquent selon la définition du branchement le dispositif qui va de la prise sur la conduite de distribution publique jusqu'au système de comptage, comprenant la canalisation située tant en domaine public qu'en domaine privé, sont à la charge du délégataire ; qu'il est encore précisé quelques lignes après que non seulement le délégataire « aura l'entière responsabilité du branchement depuis son raccordement à la canalisation de distribution jusqu'à son point d'entrée dans la propriété privée », mais encore « le délégataire étend cette obligation en matière d'entretien et de renouvellement de la partie du branchement public située à l'intérieur de la propriété privée jusqu'au compteur » ; que de l'ensemble de ces éléments, il apparaît donc parfaitement établi que CDEG, délégataire du service public de l'eau est tenue dans ses rapports contractuels avec la Collectivité à une obligation d'entretien du réseau situé avant le compteur individuel ou le compteur général d'immeuble pour un immeuble collectif d'habitation et que vis-à-vis des demandeurs, elle a par conséquent manqué à cette obligation en exigeant un paiement préalable à son intervention pour réparer une fuite sur une conduite principale située rue des Amers, et donc avant le compteur du lot des copropriétés concernées, lesquelles ne pouvaient en être tenues comme débitrices ; qu'il sera donc fait droit aux demandes des trois SDC en condamnant la CDEG à leur restituer le montant des factures émises de 915, 83 euros qu'elle a indûment perçu ; que s'agissant par ailleurs de la demande de dommages et intérêts résultant de la mauvaise foi de la CDEG dans l'exécution de ses obligations, en se reportant au contrat de délégation de service public de l'eau, que la CDEG a accepté, il est mis à sa charge, comme cela figure à l'article 1.5 Responsabilité du délégataire, le maintien des ouvrages et installations en état de fonctionnement afin d'assurer la qualité, la continuité et la bonne organisation de la mission qui lui est confiée et ceci selon les règles de l'art, en devant exploiter le service en professionnel compétent et y apporter tout son temps et ses soins ; qu'il doit encore intervenir dans les plus brefs délais suivant la connaissance d'un sinistre affectant la continuité du service public afin d'assurer le rétablissement et/ou le maintien de la continuité du service public ; que le délégataire est encore tenu d'entretenir en bon état de fonctionnement les compteurs et branchements et d'assumer la charge des travaux y correspondants ; que la CDEG ne peut pas invoquer valablement l'ignorance de l'ensemble des dispositions relatives à sa responsabilité et à ses obligations, et par conséquent en exigeant de façon délibérée et manifeste le paiement préalable à son intervention sur la partie du réseau dont elle a pourtant la charge de l'entretien, elle a agi de mauvaise foi à l'égard des usagers demandeurs ; qu'en réparation du préjudice moral ainsi subi, il y a lieu de condamner la CDEG à payer à chaque syndicat de copropriété la somme de 750 euros ; qu'il apparaît équitable d'allouer une somme de 1.500 euros à chacune des copropriétés au titre de l'article 700 du code de procédure civile »
ALORS QUE 1°) aux termes du point 6 du « Règlement du service » prévoyant « les obligations mutuelles du distributeur d'eau et de l'abonné du service », opposable aux SDC du lotissement privé « Les Résidences de la Baie Orientale » abonné au service public d'eau potable dont la Société GDEG assure la gestion en tant que délégataire de ce service public vis-à-vis de la commune de Saint-Martin, il est stipulé que « 6- Vos installations privées : On appelle « installations privées », les installations de distribution situées au-delà du système de comptage. Dans le cas de l'habitat collectif, elles désignent l'ensemble des équipements et canalisations situés au-delà du compteur général d'immeuble, hormis les systèmes de comptage individuels des logements. 6-1 Les caractéristiques : La conception et l'établissement des installations privées sont exécutés à vos frais et par l'entrepreneur de votre choix. Ces installations ne doivent présenter aucun inconvénient pour le réseau public et doivent être conformes aux règles d'hygiène applicables aux installations de distribution d'eau destinée à la consommation humaine. (...) 6-2 L'entretien et le renouvellement : L'entretien, le renouvellement et la mise en conformité des installations privées n'incombent pas au distributeur d'eau. Il ne peut être tenu pour responsable des dommages causés par l'existence ou le fonctionnement des installations privées ou par leur défaut d'entretien, de renouvellement ou de mise en conformité » ; qu'il résulte clairement de ces dispositions faisant la loi des parties que les « installations privées », dont l'entretien doit être supporté par l'abonné du service public d'eau potable, sont déterminées par l'emplacement du « compteur général d'immeuble », lesdites installations privées étant l'ensemble des équipements et canalisations « situés au-delà du compteur général d'immeuble » ; qu'en se contentant d'affirmer que la Société GDEG a manqué à son obligation d'entretien du réseau « (...) en exigeant un paiement préalable à son intervention pour réparer une fuite sur une conduite principale située rue des Amers, et donc avant le compteur du lot des copropriétés concernées, lesquelles ne pouvaient en être tenues comme débitrices » (p. 7, alinéa 5), sans rechercher, ainsi qu'il était invoqué par l'exposante (pp. 9 et 10), si la réparation litigieuse conformément au devis du mois de Juillet 2013 n'était pas intervenue, après le compteur général installé par la Société GDEG au mois de Juin 2013, et devait être supportée par les SDC du lotissement privé « Les Résidences de la Baie Orientale » qui devaient prendre en charge les frais d'entretien des installations privées dudit lotissement, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard du point 6 du « Règlement du service » précité, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
ALORS QUE 2°) aux termes de ses conclusions, l'exposante a régulièrement fait valoir que les compteurs mis en place pour chacune des copropriétés ne pouvaient servir en tant qu'élément venant délimiter l'installation privée de distribution de l'eau potable du lotissement « Les Résidences de la Baie Orientale » et que seule la pose du compteur collectif général pouvait servir de délimitation entre les réseaux public et privé du réseau de distribution de l'eau potable ; qu'il a été soutenu sur ce point (pp. 9 et 10) « Ce lotissement privé, habitat collectif au sens réglementaire de la délégation du service de l'eau et de son règlement, doit donc, pour accéder au service, faire l'objet d'un branchement collectif sur le réseau public, puis, pour chaque lot, de raccords individuels au réseau privé interne au lotissement, éventuellement groupés, pour les lots abritant des copropriétés. Le compteur collectif, dernièrement implanté sur le domaine public en limite de la propriété privée du lotissement à défaut d'accord de l'ASL pour l'installer à l'intérieur de celle-ci, constitue par conséquent un ouvrage, dont le joint de sortie matérialise la limite théorique entre les réseaux public et privé. Le compteur a donc, sur le terrain, le même rôle qu'une borne ou une clôture : il révèle sur le site une limite, sans pour autant modifier le droit fondamental de propriété. L'absence de compteur, tout comme celui de borne ou de clôture, n'a jamais pour effet de modifier la propriété de l'immeuble ¿ sol ou canalisation. (...) La pose tardive du compteur collectif desservant le lotissement, n'a donc imposé aucune modification des droits fondamentaux, et, corrélativement, des obligations, incombant aux propriétaires-lotis » ; qu'en se contentant d'affirmer que la Société GDEG a manqué à son obligation d'entretien du réseau « (...) en exigeant un paiement préalable à son intervention pour réparer une fuite sur une conduite principale située rue des Amers, et donc avant le compteur du lot des copropriétés concernées, lesquelles ne pouvaient en être tenues comme débitrices » (p. 7, alinéa 5), sans répondre au moyen de l'exposante soutenant que le « compteur du lot des copropriétés » mis en place pour chacune des copropriétés du lotissement ne pouvait servir de référentiel utile de délimitation entre le réseau public et privé et que seul le compteur général collectif devait être pris en compte, la juridiction de proximité a violé les articles 455 et 458 du Code de procédure civile."