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Obligation de conseil du constructeur à l’égard de son client

Voici un arrêt qui juge que le constructeur doit attirer l'attention du maître de l'ouvrage sur les risques d'édifier une construction en violation des droits du propriétaire du fonds voisin.

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 20 mai 2014), que, par acte dressé par M. Y..., notaire, Mme Z... a vendu à Mme A... un immeuble situé sur un terrain voisin de la parcelle appartenant à M. et Mme X... ; que Mme A..., souhaitant réaliser une extension de sa maison, a confié les travaux au Groupement des entreprises du Bâtiment de la région de Châteaubourg (le GIE) ; qu'en cours de travaux, M. et Mme X... ont assigné Mme A... en démolition du bâtiment en cours de construction et paiement de sommes, que Mme A... a appelé en garantie la société civile professionnelle Y...- Aude de B...-C... (la SCP) et le GIE ;

Attendu que le GIE fait grief à l'arrêt de le condamner, in solidum avec la SCP, à garantir Mme A... des condamnations prononcées à son encontre et à lui payer diverses sommes, alors, selon le moyen :

1°/ que le maître d'oeuvre n'est pas tenu, sauf conventions spéciales, de vérifier les titres de son client ; que dès lors, en affirmant qu'en sa qualité de professionnel, il appartenait à la société GEB de vérifier si la construction était conforme avec les obligations conventionnelles afférentes à l'immeuble, qu'avant d'exécuter les travaux, elle avait omis de consulter le titre de propriété de Mme A... ou d'en tirer les conséquences et avait ainsi manqué à son obligation de conseil en n'attirant pas l'attention du maître de l'ouvrage sur le risque d'édifier une construction en violation des droits immobiliers du fonds voisin, pour condamner la société GEB à garantir Mme A... de toutes les condamnations prononcées contre elle, y compris les frais de démolition de l'extension, et à lui verser 35 338, 86 euros de dommages-intérêts, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

2°/ qu'en toute hypothèse, l'arrêt attaqué a retenu que l'acte d'acquisition de Mme A... du 8 septembre 2009 contenait des clauses relatives aux servitudes rédigées de manière contradictoire et de nature à ne pas permettre à l'acquéreur d'être clairement informé sur ses obligations vis-à-vis du fonds voisin ; qu'il en résultait une information ambiguë pour Mme A... sur les servitudes conventionnelles grevant son fonds ; que dès lors, en reprochant ensuite à la société GEB, avant d'exécuter les travaux, d'avoir omis de consulter le titre de propriété de Mme A... ou d'en tirer les conséquences, et de ne pas avoir attiré son attention sur le risque d'édifier une construction en violation des droits immobiliers du fonds voisin, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que, lors des travaux, il avait été pris appui sur un mur privatif contenant des ouvertures obturées par des parpaings et relevé qu'il était manifeste qu'avant d'exécuter les travaux le GIE avait omis de consulter le titre de propriété de Mme A... ou d'en tirer les conséquences, la cour d'appel a pu en déduire qu'il avait manqué à son obligation de conseil en n'attirant pas l'attention du maître de l'ouvrage sur les risques d'édifier une construction en violation des droits du propriétaire du fonds voisin ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;


Condamne le Groupement des entreprises du bâtiment de la région de Châteaubourg aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Groupement des entreprises du bâtiment de la région de Châteaubourg à payer à Mme A... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande du Groupement des entreprises du bâtiment de la région de Châteaubourg ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze octobre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour le Groupement des entreprises du bâtiment de la région de Châteaubourg

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné le GROUPEMENT DES ENTREPRISES DU BATIMENT DE LA REGION DE CHATEAUBOURG, in solidum avec la SCP ERIC Y...- AUDE DE B...- CORINE C..., à garantir Madame Véronique A... de toutes les condamnations prononcées contre elle en première instance, y compris les frais de démolition de l'extension, soit la somme de 3. 588 ¿, et à lui verser la somme de 35. 338, 86 ¿ à titre de dommages-intérêts ; outre celle de 6. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

AUX MOTIFS QUE « l'acte reçu par Me Y..., notaire associé à Chateaugiron, le 8 septembre 2009, contenait des clauses relatives aux servitudes, rédigées de manière contradictoire et de nature à ne pas permettre à l'acquéreur d'être clairement informé sur ses obligations vis-à-vis du fonds voisin ¿. Le rappel de ces servitudes aurait dû conduire le notaire rédacteur à supprimer de son acte la première clause relative aux déclarations du vendeur selon lesquelles il n'existait pas d'autres servitudes que celles résultant de la situation des lieux, mention qui aurait dû être admise en présence d'une servitude légale mais non de servitudes conventionnelles de vue et de droit d'échelle. En rédigeant ainsi son acte et en fournissant une information ambigue à Mme A... sur les servitudes conventionnelles grevant son fonds, le notaire a commis une faute engageant sa responsabilité vis-à-vis de Mme A..., par manquement à son obligation d'information et de conseil » (arrêt, p. 5-6).
« le Groupement des Entreprises du Bâtiment de la région de Chateaubourg avait reçu de Mme A... une mission de maître d'oeuvre par contrat du 23 octobre 2009. Il avait notamment pour mission de concevoir le projet de construction.
En sa qualité de professionnel, il lui appartenait de vérifier si cette construction était conforme avec les obligations légales, réglementaires mais aussi conventionnelles afférentes à l'immeuble.
Sachant au surplus que lors des travaux, il a été pris appui dans un mur privatif contenant des ouvertures obturées par des parpaings, il est manifeste qu'avant d'exécuter les travaux de construction, le Groupement des Entreprises du Bâtiment de la région de Chateaubourg a omis de consulter le titre de propriété de Mme A... ou d'en tirer les conséquences, et a ainsi manqué à son obligation de conseil en n'attirant pas l'attention du maître de l'ouvrage sur le risque d'édifier une construction en violation des droits immobiliers du fonds voisin.
En conséquence, le jugement sera infirmé de ce chef et le Groupement des Entreprises du Bâtiment de la région de Chateaubourg sera condamné à garantir, in solidum avec la SCP Y...- DE B...-C..., Mme A... des condamnations prononcées contre elle, y compris les frais de démolition de l'ouvrage exposés, au titre de l'exécution provisoire, s'étant élevés à la somme de 3. 588 ¿ » (arrêt, p. 7-8) ;

ET QUE « Mme A..., qui a fait réaliser l'extension de sa maison dont elle a été condamnée à démolir les travaux exécutés et interrompus depuis mars 2010, non seulement a dû faire démolir ces travaux dont il n'est pas contesté qu'elle les ait réglés à concurrence de 25. 338, 86 ¿, selon facture du 4 février 2013, mais encore n'a pu occuper cette partie nouvelle de son immeuble en raison de l'inachèvement des travaux puis la démolition.
Aussi, elle est fondée à obtenir réparation du préjudice qu'elle subit ainsi à la SCP Y...- DE B...¿ C..., et au Groupement des Entreprises du Bâtiment de la région de Chateaubourg.
Le préjudice s'élève, outre la somme de 25. 338, 86 ¿ à la somme de 10. 000 ¿ en raison du préjudice de jouissance qu'elle subit depuis quatre années, soit au total 35. 338, 86 ¿.
En revanche, pour le surplus de sa demande, Mme A... ne démontre pas qu'elle a subi en outre une perte de chance de ne pas avoir acquis l'immeuble car elle ne démontre pas qu'elle ne peut pas envisager une reconstruction de l'extension en respectant les droits immobiliers du fonds voisin et qu'ainsi elle peut toujours réaliser le projet en raison duquel elle a acquis l'immeuble bâti existant.
En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté Mme A... de sa demande de dommages et intérêts et son préjudice, dont la SCP Y...- DE B...¿ C... et le Groupement des Entreprises du Bâtiment de la région de Chateaubourg lui doivent in solidum garantie, sera fixé à la somme de 35. 338, 86 ¿ » (arrêt, p. 8) ;

1°/ ALORS QUE le maître d'oeuvre n'est pas tenu, sauf conventions spéciales, de vérifier les titres de son client ; que dès lors, en affirmant qu'en sa qualité de professionnel, il appartenait à la société G. E. B. de vérifier si la construction était conforme avec les obligations conventionnelles afférentes à l'immeuble, qu'avant d'exécuter les travaux, elle avait omis de consulter le titre de propriété de Madame A... ou d'en tirer les conséquences et avait ainsi manqué à son obligation de conseil en n'attirant pas l'attention du maître de l'ouvrage sur le risque d'édifier une construction en violation des droits immobiliers du fonds voisin, pour condamner la société G. E. B. à garantir Madame A... de toutes les condamnations prononcées contre elle, y compris les frais de démolition de l'extension, et à lui verser 35. 338, 86 ¿ de dommagesintérêts, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

2°/ (Subsidiaire) ET ALORS QU'en toute hypothèse, l'arrêt attaqué a retenu que l'acte d'acquisition de Madame A... du 8 septembre 2009 contenait des clauses relatives aux servitudes rédigées de manière contradictoire et de nature à ne pas permettre à l'acquéreur d'être clairement informé sur ses obligations vis-à-vis du fonds voisin ; qu'il en résultait une information ambiguë pour Madame A... sur les servitudes conventionnelles grevant son fonds ; que dès lors, en reprochant ensuite à la société G. E. B., avant d'exécuter les travaux, d'avoir omis de consulter le titre de propriété de Madame A... ou d'en tirer les conséquences, et de ne pas avoir attiré son attention sur le risque d'édifier une construction en violation des droits immobiliers du fonds voisin, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 1147 du Code civil."

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