Cet arrêt juge que la transaction est une convention ayant entre les parties autorité de la chose jugée, stipulant des engagements réciproques interdépendants, dont la promesse de vente n'est qu'un élément, de sorte que l'article 1840 A du Code général des impôts est sans application (Cet article est désormais l'article 1589-2 du code civil).
"Vu l'article 1840 A du Code général des impôts, applicable à la cause, et les articles 2044 et 2052 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 26 mars 2003, Bull. 2003, III, n° 71), que la commune de Luçon et la Société de participation et de conseil (Soparco), qui étaient en litige au sujet d'une vente immobilière conclue en 1993, ont signé le 21 avril 1995 un protocole d'accord aux termes duquel la commune de Luçon s'est engagée à céder à la Soparco divers terrains et bâtiments sous condition suspensive de la construction d'un hôtel, les parties se désistant des instances en cours et la Soparco reconnaissant la caducité de la vente de 1993 et s'engageant à formaliser cette reconnaissance par acte authentique ; que la commune de Luçon soutenant que la promesse unilatérale de vente était nulle, faute d'avoir été enregistrée dans les dix jours de son acceptation par son bénéficiaire, la Soparco a engagé une action en justice afin de faire constater le caractère synallagmatique de l'accord ;
Attendu que pour déclarer nulle la promesse de vente, l'arrêt retient que le protocole d'accord ne comporte pas, en contrepartie de l'engagement de la commune de Luçon de vendre, un engagement corrélatif d'acheter à la charge de la Soparco, que la circonstance que la promesse est incluse dans une transaction ne peut avoir pour effet de remettre en cause son caractère unilatéral et n'implique nullement pour le bénéficiaire l'obligation d'acheter et que, s'agissant d'une promesse unilatérale, la commune de Luçon est bien fondée à opposer à la Soparco les dispositions de l'article 1840 A du Code général des impôts ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la transaction est une convention ayant entre les parties autorité de la chose jugée, stipulant des engagements réciproques interdépendants, dont la promesse de vente n'est qu'un élément, de sorte que l'article 1840 A du Code général des impôts est sans application, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 octobre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ; Condamne la commune de Luçon aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en Assemblée plénière, et prononcé par le premier président en son audience publique du vingt-quatre février deux mille six.
LE CONSEILLER RAPPORTEUR, LE PREMIER PRESIDENT, LE GREFFIER EN CHEF.
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux conseils, pour la société Soparco.
Moyen annexé à l'arrêt n° 534 P (Assemblée plénière)
MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué, statuant après cassation, d'avoir dit que la promesse de vente contenue dans la transaction signée le 21 avril 1995 par la commune de Luçon et la SARL Soparco avait un caractère unilatéral et qu'à défaut d'avoir été enregistrée dans les dix jours de l'acceptation, elle était nulle et de nul effet, et d'avoir en conséquence débouté la SARL Soparco de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE le "protocole d'accord" signé le 21 avril 1995 par la commune de Luçon et la SARL Soparco comportait en son article 3 les dispositions suivantes : " La ville de Luçon s'engage à céder à la SARL Soparco ou à toute personne physique ou morale que cette dernière pourra se substituer les terrains viabilisés représentés au plan annexé et les bâtiments quils comportent au prix principal de 600 000 francs nets. Cette promesse de vente est soumise à la condition suspensive de la construction d'un hôtel sur lesdits terrains. La date limite de validité de la présente promesse est fixée au 30 juin 1996" ; qu'un tel engagement ne peut constituer une promesse de vente au sens de l'article 1589, alinéa 1 du Code civil que dans la mesure où il comporte en contrepartie de l'engagement de vendre un engagement corrélatif d'acheter à charge du bénéficiaire (en ce sens Com. 25 avril 1989 B n° 136) ; que l'acte dont s'agit ne comporte aucune clause faisant corrélativement obligation à la SARL Soparco, bénéficiaire de la promesse de vente, d'acheter lesdits immeubles ; que bien au contraire, il est prévu à son profit un délai expirant le 30 juin 1996 pour donner suite à la promesse de vente ; que la SARL objecte que l'acte du 21 avril 1995 est une transaction comportant des obligations réciproques, lesquelles confèrent un caractère synallagmatique à la promesse de vente ; que l'acte du 21 avril 1995 constitue effectivement une transaction au sens de l'article 2044 du Code civil, ayant pour objet de mettre fin à un litige concrétisé notamment par une assignation délivrée par la commune de Luçon à la SARL Soparco le 28 décembre 1994 ; qu'une telle transaction n'est valable qu'à condition de comporter des concessions réciproques ; que la SARL Soparco s'est engagée à régulariser par acte authentique la constatation de la caducité de la vente conclue le 16 avril 1993 ;
qu'en contrepartie, la commune de Luçon s'est engagée à lui vendre certains terrains viabilisés et à prendre à sa charge des taxes foncières et impôts ainsi que les frais de l'acte authentique devant constater la caducité de la vente précitée ; que l'engagement souscrit par la SARL Soparco devait avoir pour contrepartie des engagements de la commune de Luçon ; que celle-ci a effectivement souscrit des engagements ; que la validité de la transaction est assurée par la seule existence concomitante des engagements respectifs des parties sans qu'il soit nécessaire qu'ils soient synallagmatiques ; que la circonstance que la promesse de vente est incluse dans une transaction ne peut pas avoir pour effet de remettre en cause son caractère unilatéral et n'implique nullement pour le bénéficiaire l'obligation corrélative d'acheter ; que, s'agissant d'une promesse unilatérale de vente, la commune de Luçon est bien fondée à opposer à la SARL Soparco les dispositions de l'article 1840-A du Code général des impôts ; que, comme elle le fait pertinemment valoir, la SARL Soparco a manifesté son acceptation de la promesse de vente en déposant une demande de permis de construire le 8 novembre 1995, qui a fait courir le délai prévu par l'article 1840-A du Code général des impôts à peine de nullité ; qu'il n'est pas contesté que cette promesse de vente n'a pas été enregistrée ; que, par conséquent, il y a lieu de constater que la promesse de vente est nulle et de nul effet et de débouter la SARL Soparco de l'ensemble de ses demandes ;
ALORS QUE la promesse de vente contenue dans une transaction comportant des concessions réciproques des parties n'est pas soumise à la formalité de l'article 1840 A du Code général des impôts ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que l'accord du 21 avril 1995 constituait une transaction au sens de l'article 2044 du Code civil et que l'engagement souscrit par la SARL Soparco devait avoir pour contrepartie les engagements de la commune de Luçon ; que dès lors, en déclarant nulle la promesse de vente contenue dans la transaction du 21 avril 1995 à défaut d'avoir été enregistrée dans les dix jours de l'acceptation, la cour d'appel a violé l'article 1103 du Code civil, ensemble l'article 1840 A du Code général des impôts."