En fait c'est l'article L. 443-15 du code de la construction et de l'habitation applicable aux copropriétés issues de la vente de certains appartements par un organisme d'habitations à loyer modéré qui est l'objet de cette décision. Aux termes du quatrième alinéa de cet article : « Les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article 22 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée ne s'appliquent pas à l'organisme d'habitations à loyer modéré vendeur ».
"Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ;
Vu les observations produites pour les requérants par la SCP Morel - Chadel - Moisson, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 10 juin 2014 ;
Vu les observations produites pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis. . . à Paris, partie en défense, représenté par Paris Habitat OPH, son syndic, par la SCP Meier-Bourdeau Lécuyer, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 10 juin 2014 ;
Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 10 juin 2014 ;
Vu les pièces produites et jointes au dossier ;
Me François Morel, avocat au barreau de Paris, pour les requérants, Me Patrice Lebatteux, avocat au barreau de Paris, pour la partie en défense, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 1er juillet 2014 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que l'article L. 443-15 du code de la construction et de l'habitation est applicable aux copropriétés issues de la vente de certains appartements par un organisme d'habitations à loyer modéré ; qu'aux termes du quatrième alinéa de cet article : « Les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article 22 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée ne s'appliquent pas à l'organisme d'habitations à loyer modéré vendeur » ;
2. Considérant que, selon les requérants, en écartant les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 qui limitent le nombre de voix dont un copropriétaire majoritaire dispose en assemblée générale, les dispositions contestées permettent à un tel copropriétaire d'imposer ses décisions à l'ensemble des autres copropriétaires et portent une atteinte disproportionnée à l'exercice du droit de propriété de ces derniers ;
3. Considérant que la propriété figure au nombre des droits de l'homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; qu'aux termes de son article 17 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » ; qu'en l'absence de privation du droit de propriété au sens de cet article, il résulte néanmoins de l'article 2 de la Déclaration de 1789 que les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi ;
4. Considérant qu'il appartient au législateur compétent en application de l'article 34 de la Constitution pour fixer les principes fondamentaux de la propriété et des droits réels, de définir les droits de la copropriété d'un immeuble bâti sans porter d'atteinte injustifiée aux droits des copropriétaires ;
5. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée : « Chaque copropriétaire dispose d'un nombre de voix correspondant à sa quote-part dans les parties communes. Toutefois, lorsqu'un copropriétaire possède une quote-part des parties communes supérieure à la moitié, le nombre de voix dont il dispose est réduit à la somme des voix des autres copropriétaires » ; qu'en prévoyant que ces dispositions ne s'appliquent pas à l'organisme d'habitations à loyer modéré vendeur, les dispositions contestées ont pour seul effet d'écarter l'application de la deuxième phrase du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965 qui réduit le nombre des voix du copropriétaire majoritaire par exception à la règle de proportionnalité ;
6. Considérant que le Conseil constitutionnel n'est pas saisi des dispositions qui énumèrent les décisions qui peuvent être adoptées par l'assemblée générale des copropriétaires et fixent les différentes règles de majorité applicables pour l'adoption de ces décisions ; que la disposition contestée par la présente question prioritaire de constitutionnalité est relative au nombre des voix dont disposent les copropriétaires en assemblée générale ; que, s'il appartient aux juridictions compétentes de faire obstacle aux abus de majorité commis par un ou plusieurs copropriétaires, ni le droit de propriété ni aucun autre principe ou règle de valeur constitutionnelle n'interdit qu'un copropriétaire dont la quote-part dans les parties communes est majoritaire puisse disposer, en assemblée générale, d'un nombre de voix proportionnel à l'importance de ses droits dans l'immeuble ; que, par suite, doivent être écartés les griefs tirés de ce que le quatrième alinéa de l'article L. 443-15 du code de la construction et de l'habitation porterait atteinte au droit de propriété ;
7. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires ni au principe d'égalité ni à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution,
D É C I D E :
Article 1er.- Le quatrième alinéa de l'article L. 443-15 du code de la construction et de l'habitation est conforme à la Constitution.
Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 juillet 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
Rendu public le 11 juillet 2014."