L'illégalité du permis de construire ne peut être fondée sur un empiétement de la construction objet du permis : c'est une application du principe selon lequel le permis de construire est délivré sous réserves des droits des tiers.
"Vu la requête, enregistrée le 6 avril 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Floréal Y..., demeurant ... ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 14 décembre 1990 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 14 juin 1989 par lequel le maire de Chateaurenard (Bouches-du-Rhône) a accordé un permis de construire à Mme X..., d'autre part, à l'abrogation de l'article 7 du plan d'occupation des sols de ladite commune et à la modification de son article 5 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 juin 1989 du maire de Chateaurenard et l'article UD 5 du plan d'occupation des sols de la commune de Chateaurenard ;
3°) de modifier au besoin ce même article UD 5 et l'article UD 7 du plan d'occupation des sols ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Roul, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'article 11 D 5 du plan d'occupation des sols de Chateaurenard :
Considérant que les conclusions à fin d'annulation de l'article 11 D 5 du règlement approuvé le 3 novembre 1988 du plan d'occupation des sols de Chateaurenard ont été présentées par M. Y... pour la première fois en appel par mémoire enregistré le 6 avril 1990 ; que de telles conclusions nouvelles en appel sont irrecevables ;
Sur les conclusions à fin d'abrogation et de modification des articles 11 D 5 et 11 D 7 du plan d'occupation des sols :
Considérant que M. Y... demande au juge d'ordonner l'abrogation de l'article 7 et la modification de l'article 5 du plan d'occupation des sols de la commune de Chateaurenard ; que de telles conclusions tendent à ce que le juge administratif adresse des injonctions à la commune ; qu'elles ne sont dès lors pas recevables ;
Sur les conclusions dirigées contre le permis de construire délivré le 14 juin 1989 à Mme X... :
Sur l'exception d'illégalité des articles UD 2, UD 5 et UD 7 du plan d'occupation des sols :
Considérant qu'en édictant, par les articles UD 2 et UD 5 du règlement du plan d'occupation des sols, des règles d'utilisation du sol différentes selon que les constructions se trouvent situées à l'intérieur ou à l'extérieur d'un lotissement, les auteurs du plan d'occupation des sols n'ont pas porté une atteinte illégale au principe d'égalité ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier qu'en imposant des règles moins restrictives pour les constructions situées hors lotissement, et en permettant par l'article UD 7 l'édification de bâtiments en limite séparative, ils aient commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation des lieux et des contraintes susceptibles d'être imposées en matière d'urbanisme dans la zone UD a ; que, dès lors, M. Y... n'est pas fondé à soutenir, par voie d'exception, que les articles UD 2, UD 5 et UD 7 du plan d'occupation des sols de Chateaurenard seraient entachés d'illégalité ;
Sur les moyens tirés de la violation du règlement du plan d'occupation des sols :
Considérant, en premier lieu, qu'en l'espèce le préambule du chapitre IV zone UD-zone d'habitat pavillonnaire se borne à une description des secteurs de la zone et ne comporte aucune disposition de portée réglementaire dont la méconnaissance serait susceptible d'être utilement invoquée à l'encontre d'un permis de construire ;
Considérant, en deuxième lieu, que le terrain sur lequel Mme X... a été autorisée à construire une maison d'habitation par l'arrêté attaqué n'est pas situé dans un lotissement, au sens de l'article R. 315-1 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles UD 2 et UD 5 applicables aux constructions situées dans un lotissement sont inopérants ;
Considérant, en troisième lieu, que l'article UD 7 du plan d'occupation des sols autorise la construction de bâtiments en limite séparative des terrains ; que le permis de construire est délivré sous réserve des droits des tiers et n'a pas pour objet d'assurer le contrôle de la réglementation des servitudes de droit privé ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que le permis de construire attaqué autoriserait une construction empiétant sur la propriété de M. Y... et aurait pour effet d'instituer une servitude de droit privé est inopérant et doit être rejeté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., à Mme X... et au ministre de l'équipement, des transports et du tourisme."