"Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 22 février 1982 et 2 juin 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Roger X..., hôtelier, demeurant Rue des Fusillés du Revard à Aix-les-Bains Savoie , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1- annule le jugement du 10 décembre 1981 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du Préfet de la Savoie en date du 26 décembre 1978 accordant à la Société Civile Immobilière "Saint-Paul" un permis de construire un bâtiment à usage de clinique, à Aix-les-Bains, sur le terrain cadastré "Section BZ n° 37Q", contigü au terrain sur lequel est située la maison d'habitation du requérant ;
2- annule pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et le décret n° 65-29 du 11 janvier 1965 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Lambertin, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélémy, avocat de M. Roger X... et de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la Société Civile Immobilière "Saint-Paul",
- les conclusions de M. Boyon, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande au tribunal administratif :
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que les affichages réguliers du permis de construire délivré le 26 décembre 1978 à la société civile immobilière Saint-Paul ou de sa mention, à la mairie et sur le terrain, prescrits par l'article R.421-42 du code de l'urbanisme, ne peuvent être établis avant le 18 avril 1979, au plus tôt ;
Considérant, d'autre part, que la réponse faîte le 5 février 1979 par le préfet de la Savoie à la lettre de M. X... du 24 novembre 1978, antérieure à la délivrance du permis de construire litigieux, n'a constitué, ni par son objet, ni par son contenu, une notification à l'intéressé du permis de construire, susceptible de faire courir à son encontre le délai du recours contentieux contre ladite décision ; que si la lettre adressée le 9 janvier 1979 au ministre de l'environnement et du cadre de vie a revêtu les caractères d'un recours hiérarchique formé contre le permis délivré le 26 décembre 1978, et si les délais de recours contentieux ont commencé à courir à compter du 9 janvier 1979 à l'encontre de M. X..., ce recours a eu pour effet de proroger le cours du délai qui, en raison du silence gardé sur cette lettre, n'a commencé à courir que quatre mois plus tard ;
Considérant que dans ces conditions, le ministre de l'urbanisme et du logement et la société civile immobilière Saint-Paul ne sont pas fondés à soutenir que la demande de M. X... tendant à l'annulation de ce permis de construire, enregistrée au tribunal administratif de Grenoble le 15 juin 179, aurait été tardive et irrecevable ;
Sur la légalité du permis de construire litigieux :
Considérant que les dispositions des articles UD 10 et UD 14 du plan d'occupation des sols d'Aix-les-Bains, rendu public par arrêté du 19 janvier 1978 limitent, dans le secteur en cause, le coefficient d'occupation des sols à 0,15 et la hauteur des bâtiments en terrasse à 7 mètres ; que le permis attaqué autorise un coefficient de 0,327 et une hauteur de 10 mètres ;
Considérant, d'une part, que ces dérogations n'ont pas le caractère d'"adaptations mineures" aux règles d'un plan d'occupation des sols, seules autorisées par l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme et ne sauraient donc trouver un fondement légal dans cette disposition, quels que soient les motifs d'intérêt général invoqués pour les justifier ;
Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 123-4 du même code permettant de faire une application anticipée des prescriptions d'un plan d'occupation des sols en cours d'élaboration, ne peuvent, aux termes de l'article R. 123-35, être utilisées pendant la période qui sépare la publication d'un plan d'occupation des sols de son approbation ; que, par suite, les modifications qu'il aurait été envisagé d'apporter aux dispositions du plan d'occupation des sols publié ne permettaient pas, en tout état de cause, de méconnaître ces dispositions ;
Considérant que M. X... est, dans ces conditions, fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif et du permis de construire attaqués ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 10 décembre 1981 et l'arrêté du préfet de la Savoie, en date du 26 décembre 1978, accordant un permis de construire à la société civile immobilière Saint-Paul sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Roger X..., à la société civile immobilière Saint-Paul et au ministre del'urbanisme, du logement et des transports."