Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Urgence, droit de propriété et atteinte à une liberté fondamentale

Le Conseil d'État déclare dans cette décision que le droit de propriété a pour corollaire le droit de disposer de son bien et que le refus de prêter le concours de la force publique pour assurer l'exécution d'une décision d'expulsion porte atteinte à cette liberté fondamentale :

 

« Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ( ) aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale ; qu'aux termes de l'article L. 522-3 du même code : Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. et Mme A ont demandé en octobre 2003, en mai 2004 et en mai 2005 le concours de la force publique pour assurer l'exécution du jugement du 2 juin 2003 du tribunal d'instance de Forcalquier ordonnant l'expulsion de M. B de l'appartement dont ils sont propriétaires à Saint-Michel-l'Observatoire (Alpes de Haute-Provence) ; qu'ils ont conclu en août 2004 un compromis de vente de cet appartement incluant une condition suspensive tenant à la libération des locaux, dont la date de réalisation avait été fixée au 30 juin 2005 par un avenant en date du 1er décembre 2004 ; que par suite, en jugeant, par son ordonnance du 24 juin 2005, que l'existence du compromis de vente soumis à cette condition suspensive ne suffisait pas à caractériser une situation d'urgence au sens des dispositions précitées, au motif que l'Etat est tenu d'indemniser le préjudice résultant pour le propriétaire d'un refus de concours de la force publique, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de droit ; que M. et Mme A sont, dès lors, fondés à demander l'annulation de l'ordonnance du 24 juin 2005 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a, sur le fondement de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, rejeté leur demande ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant que le droit de propriété a pour corollaire la liberté de disposer d'un bien ; que le refus de prêter le concours de la force publique pour assurer l'exécution d'une décision juridictionnelle ordonnant l'expulsion d'un immeuble porte atteinte à cette liberté fondamentale ; qu'en l'espèce, l'intention de M. et Mme A de procéder à la vente de l'immeuble en cause est établie ; que l'administration ne saurait utilement se prévaloir, à cet égard, de ce que le compromis de vente susmentionné serait devenu caduc dès lors qu'une telle circonstance, à la supposer établie, serait en l'espèce directement imputable à ses propres carences ; que le refus de concours opposé aux requérants depuis plus de trois ans est constitutif, pour ces personnes, d'une situation d'urgence ; qu'eu égard à l'absence de motifs invoqués par l'administration pour justifier ce refus, celui-ci apparaît en l'état de l'instruction, entaché d'une illégalité manifeste et constitutif d'une situation d'urgence au sens et pour l'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'ordonner au préfet des Alpes de Haute-Provence, sur le fondement desdites dispositions, de prendre toutes mesures nécessaires pour assurer l'exécution du jugement du tribunal d'instance de Forcalquier en date du 2 juin 2003 ordonnant l'expulsion de M. B de l'appartement dont M. et Mme A sont propriétaires à Saint-Michel-l'Observatoire, dans les trois mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'en cas d'inexécution de cette injonction au terme de ce délai, l'Etat est condamné à une astreinte de 100 euros par jour de retard »

 

(Conseil d'État 9 février 2007)

 

Les commentaires sont fermés.