Faculté de substitution dans la promesse de vente immobilière (lundi, 24 juillet 2023)

Faculté de substitution dans la promesse de vente immobilière : il faut respecter les modalités prévues contractuellement pour l'exercer correctement.

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"La société GI 50, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° C 21-24.443 contre l'arrêt rendu le 31 août 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1), dans le litige l'opposant à la société Flammarion, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société GI 50, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Flammarion, après débats en l'audience publique du 4 janvier 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 31 août 2021), par acte du 12 juin 2019, la société civile immobilière Flammarion (la SCI) a consenti à la société AFG une promesse unilatérale de vente avec faculté de substitution expirant le 15 novembre 2019, portant sur des lots de copropriété.

2. La SCI ayant refusé de régulariser la vente par acte authentique, la société GI 50, invoquant une substitution dans les droits et actions de la société AFG, l'a assignée aux fins de condamnation sous astreinte à signer cet acte.

3. Par des conclusions d'incident, la SCI a soulevé une fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société GI 50.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La société GI 50 fait grief à l'arrêt de la déclarer irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir, alors :

« 1°/ que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ; qu'en se fondant pour dire que la société GI 50 serait sans qualité à agir en régularisation de la vente, sur la circonstance que les conditions contractuelles de sa substitution à la société AFG dans le bénéfice de la promesse de vente avec faculté de substitution n'ayant pas été respectées, elle n'aurait pas la qualité d'acquéreur substitué, et en excluant ainsi le droit de la société GI 50 à invoquer la régularisation de la promesse de vente à son profit, quand l'existence du droit invoqué par le demandeur n'est pas une condition de recevabilité de son action, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile ;

2°/ qu' il résulte de la promesse de vente du 12 juin 2019 que le bénéficiaire aura la possibilité de substituer en totalité en pleine propriété, une tierce personne dans le bénéfice de la présente promesse de vente sous réserve que l'acte de substitution soit notifié par lettre recommandée avec accusé de réception au promettant, s'il n'intervient pas à un acte authentique pour l'accepter ; que la substitution pouvait dès lors valablement opérer par la signature de l'acte authentique de vente constatant cette substitution, même en l'absence de notification préalable de l'acte de substitution au promettant, par lettre recommandée avec accusé de réception ; qu'en se fondant pour exclure le droit pour la société GI 50 de demander la régularisation de la vente par acte authentique à son profit, en qualité d'acquéreur substitué, sur l'absence de notification préalable de l'acte de substitution par lettre recommandée avec accusé de réception à la société Flammarion, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil ;

3°/ que dès lors que la promesse unilatérale de vente comportait une faculté de substitution et qu'elle justifiait avoir été autorisée par la société AFG, bénéficiaire, à se porter acquéreur en ses lieu et place, ce qui n'était pas contesté par le promettant, la société GI 50 était en vertu des droits qui lui avaient été ainsi conférés par la société AFG, fondée à solliciter l'exécution de cette promesse et la régularisation de la vente à son profit ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a encore violé l'article 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a relevé qu'il résultait du seul acte signé par les parties, la promesse de vente du 12 juin 2019, que la faculté de substitution y était clairement et précisément encadrée et qu'il revenait à celui qui l'exerçait, soit de notifier sa substitution par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au promettant, soit de la faire accepter par celui-ci dans l'acte authentique.

6. Ayant constaté que la société GI 50 ne justifiait pas avoir procédé à une notification de sa substitution par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au promettant et relevé que l'acte authentique n'avait pas été signé, la cour d'appel a retenu à bon droit que la substitution n'avait pas pu intervenir à ce stade, le fait que le notaire eût préparé cet acte avec la mention de ce que l'acquéreur était la société GI 50 et qu'il en avait avisé le promettant étant inopérant au regard des exigences contractuelles, lesquelles n'avaient pas été respectées.

7. Elle en a déduit, à bon droit, que la société GI 50 n'avait pas la qualité à agir, seule la société AFG ayant cette qualité.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société GI 50 aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille vingt-trois.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par laSCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société GI 50

La SCI GI 50 fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déclarée irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité ;

1°- ALORS QUE l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ; qu'en se fondant pour dire que la société GI 50 serait sans qualité à agir en régularisation de la vente, sur la circonstance que les conditions contractuelles de sa substitution à la société AFG dans le bénéfice de la promesse de vente avec faculté de substitution n'ayant pas été respectées, elle n'aurait pas la qualité d'acquéreur substitué, et en excluant ainsi le droit de la société GI 50 à invoquer la régularisation de la promesse de vente à son profit, quand l'existence du droit invoqué par le demandeur n'est pas une condition de recevabilité de son action, la Cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile ;

2°- ALORS QU'il résulte de la promesse de vente du 12 juin 2019 que le bénéficiaire aura la possibilité de substituer en totalité en pleine propriété, une tierce personne dans le bénéfice de la présente promesse de vente sous réserve que l'acte de substitution soit notifié par lettre recommandée avec accusé de réception au promettant, s'il n'intervient pas à un acte authentique pour l'accepter ; que la substitution pouvait dès lors valablement opérer par la signature de l'acte authentique de vente constatant cette substitution, même en l'absence de notification préalable de l'acte de substitution au promettant, par lettre recommandée avec accusé de réception ; qu'en se fondant pour exclure le droit pour la société GI 50 de demander la régularisation de la vente par acte authentique à son profit, en qualité d'acquéreur substitué, sur l'absence de notification préalable de l'acte de substitution par lettre recommandée avec accusé de réception à la société Flammarion, la Cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil ;

3°- ALORS QUE dès lors que la promesse unilatérale de vente comportait une faculté de substitution et qu'elle justifiait avoir été autorisée par la société AFG, bénéficiaire, à se porter acquéreur en ses lieu et place, ce qui n'était pas contesté par le promettant, la société GI 50 était en vertu des droits qui lui avaient été ainsi conférés par la société AFG, fondée à solliciter l'exécution de cette promesse et la régularisation de la vente à son profit ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a encore violé l'article 1103 du code civil."