Pas d'urgence à suspendre le permis de construire (mardi, 02 novembre 2021)
Les juges considèrent qu'il n'y a pas d'urgence à suspendre un permis de construire dès lors que : "Eu égard au caractère difficilement réversible de la construction d'un bâtiment, la condition d'urgence doit en principe être constatée lorsque les travaux vont commencer ou ont déjà commencé sans être pour autant achevés ; il peut toutefois en aller autrement dans le cas où le pétitionnaire ou l'autorité qui a délivré l'autorisation justifie de circonstances particulières.
Il résulte de l'instruction que la construction d'une maison de sauvetage autorisée par le permis de construire accordé à la commune de Saint-Cast-le-Guildo dont la requérante demande la suspension est déjà très avancée, seule la végétalisation du toit n'ayant pas encore été réalisée. Dans ces conditions, la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie."
"Vu la procédure suivante :
La Fédération des Associations de Protection de l'Environnement et du Littoral des Côtes-d'Armor (FAPEL 22) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rennes de suspendre l'exécution de l'arrêté du 16 septembre 2019 par lequel le maire de Saint-Cast-le-Guildo a accordé à la commune un permis de construire pour la réalisation d'une maison de sauvetage sur le port d'Armor. Par une ordonnance n° 2002070 du 5 juin 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 22 juin, 7 juillet et 1er décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération des Associations de Protection de l'Environnement et du Littoral des Côtes d'Armor demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) statuant au référé, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Cast-le-Guildo la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme B... A..., conseillère d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Brouchot, avocat de la Fédération des Associations de Protection de l'Environnement et du Littoral des Côtes-d'Armor et à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de la commune de Saint-Cast-le-Guildo ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le maire de Saint-Cast-le-Guildo a délivré le 16 septembre un permis de construire pour une maison de sauvetage. La Fédération des Associations de Protection de l'Environnement et du Littoral des Côtes-d'Armor se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 5 juin 2020 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a refusé de faire droit à sa demande tendant à ce que soit ordonnée la suspension de l'exécution de ce permis de construire en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative.
2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
3. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ".
4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés, notamment des constats d'huissier réalisés les 19 septembre 2019, 21 octobre 2019 et 20 novembre 2019, que si le permis de construire en litige a fait l'objet d'un affichage au moins du 19 septembre au 21 octobre, il n'est pas établi que l'affichage ait été poursuivi du 21 octobre au 19 novembre. En estimant que l'affichage du permis de construire avait fait courir le délai du recours contentieux à l'encontre du permis de construire, le juge des référés a dénaturé les pièces du dossier.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que la requérante est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du 5 juin 2020 qu'elle attaque.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande de suspension en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
7. Eu égard au caractère difficilement réversible de la construction d'un bâtiment, la condition d'urgence doit en principe être constatée lorsque les travaux vont commencer ou ont déjà commencé sans être pour autant achevés ; il peut toutefois en aller autrement dans le cas où le pétitionnaire ou l'autorité qui a délivré l'autorisation justifie de circonstances particulières.
8. Il résulte de l'instruction que la construction d'une maison de sauvetage autorisée par le permis de construire accordé à la commune de Saint-Cast-le-Guildo dont la requérante demande la suspension est déjà très avancée, seule la végétalisation du toit n'ayant pas encore été réalisée. Dans ces conditions, la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition tenant à l'existence d'un doute sérieux sur la légalité du permis en cause, que la requérante n'est pas fondée à demander la suspension du permis de construire en litige.
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Saint-Cast-le-Guildo qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée par la commune de Saint-Cast-le-Guildo au titre des mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Rennes du 5 juin 2020 est annulée.
Article 2 : La demande de suspension présentée par la Fédération des Associations de Protection de l'Environnement et du Littoral des Côtes-d'Armor devant le juge des référés du tribunal administratif de Rennes est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Fédération des Associations de Protection de l'Environnement et du Littoral des Côtes-d'Armor et à la commune de Saint-Cast-le-Guildo."