Pas de servitude de tour d'échelle ! (mardi, 08 décembre 2020)
Cet arrêt de la Cour de cassation juge que la servitude de tour d'échelle ne peut être mise en œuvre, car elle apparaît, dans son exercice au cas particulier, être une atteinte disproportionnée au droit de propriété.
" Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Metz, 4 juin 2019), la société SC [...], propriétaire d'un terrain contigu à celui appartenant à la SCI [...], a obtenu un permis de construire l'autorisant à édifier un immeuble en limite de sa propriété.
2. Soutenant que la pose et l'isolation des fondations de l'immeuble impliquaient la réalisation de travaux de terrassement sur la parcelle voisine, elle a assigné la SCI [...] en autorisation de tour d'échelle afin de pénétrer sur son fonds pendant la durée des travaux.
Examen du moyen
Sur le moyen unique pris en ses troisième, quatrième et sixième branches, ci-après annexé
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen unique pris en ses première, deuxième et cinquième branches
Enoncé du moyen
4. La société SC [...] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors :
« 1°/ que le propriétaire d'un fonds, qui justifie d'un permis de construire en limite de propriété, est en droit de solliciter du juge une autorisation provisoire de « tour d'échelle » sur le fonds voisin pour lui permettre d'effectuer sur son immeuble des travaux indispensables qui ne peuvent être effectués par un autre moyen, qu'il s'agisse de travaux de réparations ou d'entretien sur un bâti déjà existant ou qu'il s'agisse de travaux d'édification d'une construction nouvelle ; qu'en énonçant, pour rejeter la demande d'autorisation présentée par la société SC [...], que celle-ci revendique à son profit une servitude de tour d'échelle, non pas pour effectuer des travaux d'entretien ou de réparation, voire même des travaux de finition sur un ouvrage nouvellement construit, mais pour entreprendre purement et simplement la construction d'un bâtiment, et se situe par conséquent hors des hypothèses autorisant le passage sur le terrain voisin dans le cadre d'une servitude de tour d'échelle, la cour d'appel a violé l'article 544 du code civil ;
2°/ que le propriétaire d'un fonds, qui justifie d'un permis de construire en limite de propriété, est en droit de solliciter du juge une autorisation provisoire de « tour d'échelle » sur le fonds voisin pour lui permettre d'effectuer sur son immeuble des travaux indispensables qui ne peuvent être effectués par un autre moyen, qu'il s'agisse de travaux de réparations ou d'entretien sur un bâti déjà existant ou qu'il s'agisse de travaux d'édification d'une construction nouvelle ; qu'en énonçant, pour débouter la société S.C. [...] de sa demande d'autorisation, qu'il apparaît que l'appelante est propriétaire d'un vaste terrain situé entre plusieurs maisons d'habitation agrémentées de jardins et ne peut se prévaloir de contraintes particulières à cet égard, les photos ne rendant nullement compte d'un environnement urbain dense et qu'il lui était donc entièrement loisible de faire des choix architecturaux permettant de conjuguer la place (vaste) dont elle disposait et les impératifs de construction (fondations, sous-sol) propres au projet qui était le sien, quand il résultait par ailleurs des constatations de l'arrêt que la société S.C. [...] avait obtenu un permis de construire en limite de propriété, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs radicalement inopérants et a violé l'article 544 du code civil,
5°/ que le propriétaire d'un fonds, qui justifie d'un permis de construire en limite de propriété, est en droit de solliciter du juge une autorisation provisoire de « tour d'échelle » sur le fonds voisin pour lui permettre d'effectuer sur son immeuble des travaux indispensables qui ne peuvent être effectués par un autre moyen, qu'il s'agisse de travaux de réparations ou d'entretien sur un bâti déjà existant ou qu'il s'agisse de travaux d'édification d'une construction nouvelle ; que du fait de l'autorisation ainsi accordée et de l'atteinte au droit de propriété pouvant en résulter, il appartient au juge saisi de procéder à l'évaluation du préjudice subi par le propriétaire du fonds voisin ; qu'en rejetant la demande d'autorisation présentée par la société SC [...] aux motifs que les travaux projetés impliquaient la destruction pure et simple du mur propriété de la SCI [...] puis le creusement dans sa propriété d'une fouille d'environ 3 mètre de large et 2,70 mètre de profondeur tout au long du chemin d'accès à l'arrière de l'immeuble, rendu impraticable pendant au moins six semaines quand, en l'absence de sujétion intolérable et excessive constatée par la cour d'appel, ces circonstances n'étaient pas de nature à faire obstacle au droit de la société SC [...] de se voir autoriser à pénétrer sur le terrain propriété de la SCI [...], situé [...] , afin de lui permettre de réaliser les travaux de construction de l'immeuble bâti en limite de propriété, tel que visé dans le permis de construire délivré le 24 décembre 2014 par la commune de [...], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 544 du code civil. »
Réponse de la Cour
5. La cour d'appel a souverainement retenu, d'une part, que, l'environnement urbain étant peu dense et la société SC [...] disposant d'un terrain étendu lui permettant de modifier l'implantation de son immeuble en retrait de la limite séparative, la réalisation de son projet ne rendait pas indispensable une intervention sur le terrain voisin et, d'autre part, que les travaux envisagés, qui impliquaient la démolition d'un mur, le creusement d'une tranchée de 2,70 mètres de profondeur et de 3 mètres de large tout le long du chemin d'accès à la parcelle voisine et la privation de l'usage de son parking pendant au moins six semaines, étaient de nature à porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété de la SCI [...].
6. Elle a déduit, à bon droit, de ces seuls motifs, que la demande d'autorisation de tour d'échelle devait être rejetée.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société SC [...] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société SC [...] et la condamne à payer à la SCI [...] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour la société SC [...]
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé en toutes ses dispositions le jugement déféré et débouté en conséquence la société S.C. [...] de sa demande tendant à se voir autorisée à pénétrer sur le terrain propriété de la SCI [...], sis à [...] , afin de lui permettre de réaliser des travaux de la construction de l'immeuble visés à l'autorisation de permis de construire délivrée le 24 décembre 2014 par la commune de [...] et décrits dans la correspondance de la société I... datée du 10 octobre 2016 et complétée par le rapport MS Conseils, Monsieur W... Y..., du 30 octobre 2018, dire et juger que ce tour d'échelle de six semaines est accordé et à exécuter dans un délai de quatre mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir à la SCI [...], à l'initiative de la société S.C. [...] , dire et juger que la société S.C. [...] fera réaliser à ses frais exclusifs un constat d'huissier afin de conster l'état existant des lieux avant travaux, donner acte à la société S.C. [...] qu'elle fera son affaire personnelle des éventuels travaux de remise en état du terrain, propriété de la SCI [...], dans son état initial, sauf meilleur accord des parties et qu'elle offrira réparation en cas de dommages, puis, ajoutant au jugement déféré, d'avoir condamné la société S.C. [...] à payer à la SCI [...] la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code procédure civile,
Aux motifs propres qu'il est constant qu'à défaut d'être fixée conventionnellement entre les parties, la « servitude de tour d'échelle », qui n'est pas une servitude légale, ne peut être revendiquée par un propriétaire à son profit et à l'encontre du propriétaire du fonds voisin, que dans des conditions dégagées par la jurisprudence, en considération du fait qu'elle porte atteinte, bien que de façon momentanée, au droit de propriété ; qu'ainsi que rappelé par le premier juge, une autorisation judiciaire de pénétrer sur la propriété d'autrui pour effectuer des travaux ne sera délivrée qu'en fonction de critères d'appréciation stricts, qui doivent se trouver réunis, à savoir : - les travaux que souhaite réaliser le propriétaire requérant doivent avoir un caractère indispensable, - il doit être établi qu'ils ne peuvent être réalisés qu'en passant provisoirement sur la propriété d'autrui, ce caractère provisoire impliquant que ne peuvent être posées et utilisées sur le fonds d'autrui que des installations provisoires (échafaudages, échelles) ne portant pas atteinte à la propriété, - la gêne et le préjudice en résultant pour le propriétaire voisin doivent rester proportionnés à l'intérêt des travaux, - le propriétaire devant supporter le passage provisoire sur son fonds doit être justement indemnisé du trouble résultant de ces travaux ; que s'agissant de la nature des immeubles sur lesquels des travaux de réparation ou d'entretien doivent être effectués, il est constant que la jurisprudence a réservé longtemps la possibilité d'user d'une servitude de tour d'échelle, aux réparations ou à l'entretien à réaliser sur un ouvrage déjà existant, excluant en revanche que le propriétaire d'une construction nouvelle puisse revendiquer à son profit une telle servitude ; que tel était effectivement encore le sens des réponses ministérielles apportées en janvier 2007 et février 2008 à la question de savoir si, dans le cadre d'une construction neuve, une telle servitude peut être créée ex nihilo ; que rappelant les conditions habituellement posées par la jurisprudence pour autoriser la mise en oeuvre de cette « servitude », la réponse ministérielle (JO Sénat Q 28 février 2008) indique que « la délivrance d'un permis de construire un bâtiment en limite séparative, s'il peut rendre nécessaire l'usage de cette pratique, ne dispense pas du respect des conditions d'institution de ce droit résultant des règles du droit civil », étant rappelé que le permis de construire est toujours délivré sous réserve des droits des tiers ; qu'elle rappelle enfin que « la jurisprudence, considérant la servitude comme un droit portant atteinte à la propriété, paraît la réserver aux seules réparations sur des constructions existantes et refuse de l'appliquer pour l'édification de constructions nouvelles » ; que la SC [...] se prévaut à cet égard d'une évolution de la jurisprudence ; que force est cependant de constater qu'aucune des décisions qu'elle produit n'est assimilable au cas de l'espèce, à savoir la revendication d'une telle servitude, non pas pour effectuer un entretien, des réparations, voire des travaux de finition sur une construction déjà existante, quelle que soit la date de sa construction qui peut être très récente, mais pour construire purement et simplement un bâtiment n'ayant encore aucune existence ; qu'aucune des décisions produites ne s'affranchit des critères antérieurement dégagés en jurisprudence, et s' il a été admis par certaines que la servitude de tour d'échelle puisse être utilisée pour des travaux de finition sur une construction nouvelle (bardage notamment), pour autant, et outre que ces décisions restent des cas d'espèce, il s'agissait toujours d'hypothèses dans lesquelles la construction en elle-même avait été édifiée sans aucun recours à la notion de servitude de tour d'échelle, laquelle n'était revendiquée qu'à la fin des travaux pour une construction, qui, de de fait, était donc déjà existante, et de surcroît dans un environnement urbain particulièrement dense impliquant que les constructions se réalisent habituellement en limite de propriété ; qu'en l'espèce, et bien que la S.C. [...] ait obtenu un permis de construire en limite de propriété, les documents et notamment les photos produites ne permettent nullement de considérer que la construction projetée se situerait dans un environnement urbain d'une densité telle qu'elle impliquerait des contraintes particulières susceptibles de s'appliquer à tous les propriétaires ; qu'il apparaît en réalité que l'appelante est propriétaire d'un vaste terrain situé entre plusieurs maisons d'habitation agrémentées de jardins et ne peut se prévaloir de contraintes particulières à cet égard, les photos ne rendant nullement compte d'un environnement urbain dense ; qu'il lui était donc entièrement loisible de faire des choix architecturaux permettant de conjuguer la place (vaste) dont elle disposait et les impératifs de construction (fondations, sous-sol) propres au projet qui était le sien ; qu'en tout état de cause, il est constant que la S.C. [...] revendique à son profit une servitude de tour d'échelle, non pas pour effectuer des travaux d'entretien ou de réparation, voire même des travaux de finition sur un ouvrage nouvellement construit, mais pour entreprendre purement et simplement la construction d'un bâtiment, et se situe par conséquent hors des hypothèses autorisant le passage sur le terrain voisin dans le cadre d'une servitude de tour d'échelle ; que l'expertise qu'elle produit confirme effectivement que, compte tenu du projet architectural de la S.C. [...] , il est indispensable de réaliser des fondations profondes et un complexe d'étanchéité nécessitant la réalisation de fouilles sur le côté extérieur du futur bâtiment ; que ceci n'implique pas cependant que ces fouilles doivent nécessairement se situer sur le terrain d'autrui, et la nécessité de passer sur le terrain de la S.C. [...] ne résulte que du choix fait par l'appelante, malgré de telles contraintes architecturales, de construire jusqu'à la limite des propriétés dans se ménager sur le côté du bâtiment la distance nécessaire aux fouilles à prévoir ; qu'il lui était possible, devant ces contraintes, de faire le choix d'un projet différent notamment en termes d'implantation, de sorte qu'il ne peut être soutenu que le passage sur le terrain de la SCI [...] serait la seule solution possible pour permettre à l'appelante de réaliser son projet ; qu'enfin, il est également constant que « le passage » que revendique à son profit l'appelante, consiste en réalité dans la démolition pure et simple du mur propriété de la SCI [...] puis dans le creusement, dans sa propriété, d'une fouille qui, aux dires de la société I..., sera d'environ 3 mètres de large et 2,70 m de profondeur tout au long du chemin d'accès à l'arrière de l'immeuble, de sorte que celui-ci sera impraticable ; que si l'expert mandaté par l'appelante indique une largeur de 2 mètres en raison de l'utilisation de blindages, ceci ne change rien au fait que le chemin d'accès sera dégradé et inutilisable pendant au moins six semaines ; qu'une servitude de tour d'échelle, qui ne peut occasionner au propriétaire qu'une gêne momentanée, ne peut avoir pour conséquence d'imposer à un propriétaire la destruction pure et simple d'un élément de sa propriété et la mise en oeuvre de travaux de terrassement sur son propre terrain ni le priver de l'usage d'un chemin d'accès durant plusieurs semaines, l'atteinte au droit de propriété étant dans cette hypothèse manifeste et très largement excessif ; qu'enfin, il n'apparaît pas davantage que la S.C. [...] ait eu le projet d'indemniser la SCI [...] à hauteur de l'ensemble des désagréments et préjudices occasionnés ; que la « convention de droit de passage temporaire droit d'échelle » qu'elle avait élaborée et soumise à la signature de son adversaire ne contenait qu'un engagement de remise en état sans aucune prise en compte des éventuels préjudices annexes subis ; qu'à cet égard, l'appelante indique qu'elle « se propose même » de reconstruire le mur de la SCI [...], ce qui en tout état de cause aurait relevé de ses obligations minimales ; que sur ce point également, les conditions de mise en oeuvre d'une servitude de tour d'échelle n'étaient en tout état de cause pas respectées ; qu'il apparaît dès lors que les travaux projetés par la S.C. [...] portent une atteinte certaine au droit de propriété de la SCI [...] et n'entend pas dans le cadre des travaux pouvant justifier la mise en oeuvre d'une servitude dite de tour d'échelle de sorte que c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté l'ensemble de ses demandes ; qu'il convient donc de confirmer dans son intégralité le jugement déféré ;
Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges que la S.C. [...] expose que sur le terrain dont elle est propriétaire à [...], elle a été autorisée, selon permis de construire délivré le 24 décembre 2014 à construire un immeuble sur toute la longueur en limite de le propriété de la SCI [...] afin de pouvoir réaliser des travaux en sous-sol, soit un coffrage étayé dans lequel le béton armé doit être coulé, expliquant que venant en limite de propriété, les étaies et renforts doivent prendre appui sur les terrains adjacents et voisins de la SCI [...] ; que celle-ci a refusé de signer une « convention dite de servitude de tour d'échelle » qui lui était proposée et destinée à autoriser la S.C. [...] à passer et pénétrer temporairement sur son terrain aux fins de pouvoir réaliser les travaux ; que la S.C. [...] allègue préalablement que l'implantation d'un bâtiment en limite de la propriété de la SCI [...] a été autorisée par un permis de construire à l'encontre duquel la SCI [...] n'avait fait valoir aucune observation à l'époque où la procédure administrative lui aurait donné la possibilité d'en faire et que désormais les délais de recours sont purgés ; qu'à cet égard, la SCI [...] indique à bon droit que ces considérations relatives au permis de construire accordé à la SCI [...] sont sans incidence au litige, rappelant que comme tout permis de construire, celui-là a été accordé sous réserve des droits des tiers ; que la SCI [...] soutient qu'il appartenait à la S.C. [...] de tenir compte des sujétions techniques particulières que la dimension de l'immeuble qu'elle entendait construire sur son propre terrain à la limite de propriété pouvaient générer quant aux travaux qui seraient éventuellement nécessaires sur le fonds voisin consistant à creuser sur plus de 3 mètres de largeur de propriété de la SCI [...] alors que le chemin d'accès au parking de l'institut J..., institut de beauté exploité dans le local appartenant à la SCI [...], fait moins de 5 mètres de largeur ; qu'elle tire notamment argument du courrier produit par la demanderesse elle-même, émanant de l'entreprise I..., et indiquant que le désordres qui seraient engendrés pour la SCI [...] par les travaux envisagés : « Cela engendrera une emprise de terrassement sur la parcelle voisine d'environ 3,00 m et une démolition du mur en limite (remplacé à terme par la nouvelle construction) » ; que la SCI [...] souligne également que la réalisation des fondations de l'immeuble à construire « aboutirait de surcroît à la destruction du réseau d'assainissement qui passe sous son terrain » ; qu'alors que la S.C. [...] allègue que les travaux de terrassement et de réalisation d'un mur de soutènement en béton pendant une durée limitée sont des « travaux simples à mettre en oeuvre » sur une emprise limitée, la SCI [...] considère qu'elle n'a pas à supporter les contraintes de ces travaux générant la destruction du mur séparatif qui lui appartient et la disparition partielle du chemin d'accès à son parking et l'impossibilité par contre-coup de jouir de l'immeuble dans lequel cet institut de beauté est exploité dans le respect d'une réglementation relative à l'accessibilité aux personnes handicapées ; qu'à cet égard, le tribunal considère qu'il ne peut être invoqué au regard de la réglementation impérative de l'accessibilité du cadre bâti aux personnes handicapées, qu'il suffirait aux clients de l'établissement de trouver ailleurs sans problème des places de stationnement car ce serait l'exploitation même de l'établissement qui serait mis en péril si la réglementation spécifique d'accès aux personnes en situation de mobilité réduite n'était plus respectée pendant la durée des travaux ; que si l'entreprise chargée des travaux envisagés souligne que la méthodologie qui serait mise en oeuvre par elle devrait permettre de limiter la durée de talutage provisoire à environ 1 mois et demi, la défenderesse considère que l'atteinte à son droit de propriété et les conséquences sur l'activité de l'institut de beauté excèderaient largement les limites admises par la jurisprudence en ce qui concerne la demande tendant à obtenir judiciairement « un droit d'échelle » invoqué par la demanderesse ; que le tribunal observe que la convention proposée par la S.C. [...] en vue de l'établissement d'un droit de passage temporaire a été refusée par la SCI [...] sans que celle-ci commette un abus de son droit de propriété dont elle a fait l'usage qu'elle estime conforme à ses intérêts mais qui n'a pas contrevenu aux prescriptions légales ou réglementaires ; qu'il est vrai qu'un « droit d'échelle », hors cadre contractuel, que le juge judiciaire peut reconnaître, autorise le passage sur une propriété voisine à des conditions strictes, comme le rappelle le conseil de la défenderesse, sur la base de la jurisprudence et des réponses ministérielles qu'elle a soumises à l'examen du tribunal : « Il doit d'agir d'une réparation sur un ouvrage existant et non la réalisation d'une nouvelle construction. Les travaux doivent être indispensables, soit qu'ils soient imposés par une décision administrative ou une réglementation d'urbanisme, soit qu'ils revêtent un caractère de nécessité afin d'éviter une dégradation grave, ou même la destruction de l'immeuble ; impossibilité d'effectuer les travaux sans passer chez autrui (l ne peut s'agir d'une simple commodité, ni de réaliser une économie). Le droit d'échelle confère simplement le droit d'occuper temporairement une partie du fonds voisin (par des échelles, des échafaudages, etc.) afin d'effectuer des travaux de réparation ou d'entretien sur un bâtiment existant, ou de contourner certaines difficultés d'accessibilité » ; qu'or, « les ouvrages nouvellement édifiés en bordure de propriété ne bénéficient pas d'un traitement comparable aux bâtiments existants, notamment au regard des possibilités d'adaptation et d'anticipation du projet de construction, et des responsabilités qui en découlent. Il appartient en effet à celui qui entend réaliser un ouvrage de tenir compte des sujétions techniques et de la disposition des lieux avant d'envisager la construction de cet ouvrage » ; que le tribunal constate que les conditions ne sont pas réunies pour que le juge judiciaire puisse imposer à la SCI [...] un « droit d'échelle » au bénéfice de la S.C. [...] afin que celle-ci puisse réaliser les travaux de terrassement et de construction qu'elle prétend nécessaires pour la construction de l'immeuble pour lequel elle a obtenu un permis de construire sans qu'il soit tenu compte des sujétions particulièrement lourdes qui seraient ainsi imposées à la SCI [...], propriétaire du fonds et de l'immeuble voisins, ni de la nécessaire sauvegarde du droit de propriété de celle-ci ; qu'en conséquence, il convient de débouter la S.C. [...] de l'ensemble de ses prétentions,
1° Alors en premier lieu que le propriétaire d'un fonds, qui justifie d'un permis de construire en limite de propriété, est en droit de solliciter du juge une autorisation provisoire de « tour d'échelle » sur le fonds voisin pour lui permettre d'effectuer sur son immeuble des travaux indispensables qui ne peuvent être effectués par un autre moyen, qu'il s'agisse de travaux de réparations ou d'entretien sur un bâti déjà existant ou qu'il s'agisse de travaux d'édification d'une construction nouvelle ; qu'en énonçant, pour rejeter la demande d'autorisation présentée par la société S.C. [...] , que celle-ci revendique à son profit une servitude de tour d'échelle, non pas pour effectuer des travaux d'entretien ou de réparation, voire même des travaux de finition sur un ouvrage nouvellement construit, mais pour entreprendre purement et simplement la construction d'un bâtiment, et se situe par conséquent hors des hypothèses autorisant le passage sur le terrain voisin dans le cadre d'une servitude de tour d'échelle, la cour d'appel a violé l'article 544 du code civil,
2° Alors en deuxième que le propriétaire d'un fonds, qui justifie d'un permis de construire en limite de propriété, est en droit de solliciter du juge une autorisation provisoire de « tour d'échelle » sur le fonds voisin pour lui permettre d'effectuer sur son immeuble des travaux indispensables qui ne peuvent être effectués par un autre moyen, qu'il s'agisse de travaux de réparations ou d'entretien sur un bâti déjà existant ou qu'il s'agisse de travaux d'édification d'une construction nouvelle ; qu'en énonçant, pour débouter la société S.C. [...] de sa demande d'autorisation, qu'il apparaît que l'appelante est propriétaire d'un vaste terrain situé entre plusieurs maisons d'habitation agrémentées de jardins et ne peut se prévaloir de contraintes particulières à cet égard, les photos ne rendant nullement compte d'un environnement urbain dense et qu'il lui était donc entièrement loisible de faire des choix architecturaux permettant de conjuguer la place (vaste) dont elle disposait et les impératifs de construction (fondations, sous-sol) propres au projet qui était le sien, quand il résultait par ailleurs des constatations de l'arrêt que la société S.C. [...] avait obtenu un permis de construire en limite de propriété, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs radicalement inopérants et a violé l'article 544 du code civil,
3° Alors en troisième lieu que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en page 10 de son rapport d'expertise régulièrement versé aux débats, la société MS Conseils indiquait : « Travaux de protection des murs du sous-sol : Pour ces travaux l'installation des protections contre les venues d'eau consistent à mettre en oeuvre : * Isolation thermique type polystyrène expansé. * Une protection type DELTA MS pour protéger le mur des terres et de l'humidité qu'il véhicule. * Un drain en pied de fondation pour recueillir les eaux et les évacuer pour protéger le fond de la fondation qui peut en son absence pour générer de forts désordres ; Affaissements, gonflements, etc. » puis exposait dans un encadré : « Avis de l'expert : Pour la construction du bâtiment tel que prévu au permis de construire, le maître de l'ouvrage devra au préalable faire la dépose du mur de clôture ; car l'intervention sur le fonds voisin est indispensable pour satisfaire aux règles de l'art ainsi qu'aux règles de sécurité pour les travailleurs » ; qu'il était ajouté en page 11 de ce même rapport : « Travaux de second OEuvre : La hauteur du pignon donnant sur le fonds voisin est de 15ml environ. Pour réaliser les travaux de finition des murs bruts il est impératif d'installer un échafaudage. Les travaux consisteront à mettre en oeuvre : * Polystyrène collé, * Enduit de finition » puis exposait dans un encadré : « Avis de l'expert : Le complexe isolant avec sa finition est posé à la limite de propriété. Il ne peut être posé qu'à l'aide d'un échafaudage sur toute la hauteur du pignon. Tout autre solution n'est pas acceptable. Ces travaux sont indispensables pour que le bâtiment puisse bénéficier de l'agrément de la RT 2012 ; qu'il était spécifié en « Conclusion du rapport » : « (...) Sur les moyens, il s'avère qu'il est indispensable d'intervenir sur le fonds voisin pour la réalisation des travaux suivants : * Terrassement pour la réalisation des fouilles pour fondation, * Blindage des fouilles pour sécurisation des travailleurs et de l'intervention sur le fonds voisin, * Réalisation des fondations et des ouvrages de protection contre les venues d'eau, * Réalisation de l'isolation par l'extérieur du mur pignon (15 ml de haut) avec installation d'un échafaudage. L'ensemble de ces travaux peuvent être réalisés sur une emprise maximum de 2 ml du fait de l'utilisation des blindages et de l'échafaudage. Il y a lieu de préciser que ces travaux seront réalisés dans l'emprise d'une clôture permettant la protection du fonds voisin de la SCI [...] » ; qu'en énonçant que « ceci n'implique pas cependant que ces fouilles doivent nécessairement se situer sur le terrain d'autrui » et que « la nécessité de passer sur le terrain de la SCI [...] ne résulte que du choix fait par l'appelante, malgré de telles contraintes architecturales, de construire jusqu'à la limite des propriétés sans se ménager sur le côté du bâtiment la distance nécessaire aux fouilles à prévoir », quand le rapport d'expertise excluait toute alternative et venait justifier le caractère indispensable des différents travaux nécessitant une intervention sur le fonds voisin, la cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise établi le 30 octobre 2018 par la société MS Conseils et a violé le principe susvisé,
4° Alors en quatrième lieu que dans ses conclusions d'appel, la société S.C. [...] faisait valoir que pour la réalisation des travaux dans le respect des règles de l'art, il est nécessaire de mettre en oeuvre entre le mur et la limite de propriété un film étanche delta MS, un isolant, des graviers filtrants et un drain au pied des fondations, ces travaux ne pouvant être réalisés autrement qu'en ayant accès temporairement sur le fonds voisin pour réaliser la fondation mais également de mettre en oeuvre le complexe isolant et étanchant ; qu'il était ajouté que sans la mise en place de ce dispositif, la fondation sera exposée aux écoulements d'eaux pluviales entraînant des désordres importants pouvant atteindre sa solidité dès lors qu'il n'existe aucun autre moyen technique pour réaliser cet ouvrage sans avoir accès temporairement au terrain voisin ; qu'il était précisé qu'en tout état de cause, même si cette technique avait été envisageable, il serait tout de même nécessaire de creuser sur le fonds voisin afin de disposer de l'espace suffisant pour permettre n'intervention d'ouvriers chargés de la mise en place des éléments d'étanchéité et de drainage susvisés, sachant que lesdits éléments sont strictement indispensables pour assurer la parfaite étanchéité de l'ouvrage et qu'à défaut le bâtiment serait soumis à des infiltrations d'eau continues et donc à une dégradation accélérée ; qu'il en était déduit que ces exigences techniques indispensables tenant à l'isolation, l'étanchéité ainsi qu'à un drainage conforme protégeant la construction d'infiltration d'eaux, rendaient indispensable un passage temporaire par le fonds voisin pour réaliser ces travaux identifiés par l'expert dans son rapport établi le 30 octobre 2018 ; qu'en ne répondant pas à ce moyen déterminant la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,
5° Alors en cinquième lieu que le propriétaire d'un fonds, qui justifie d'un permis de construire en limite de propriété, est en droit de solliciter du juge une autorisation provisoire de « tour d'échelle » sur le fonds voisin pour lui permettre d'effectuer sur son immeuble des travaux indispensables qui ne peuvent être effectués par un autre moyen, qu'il s'agisse de travaux de réparations ou d'entretien sur un bâti déjà existant ou qu'il s'agisse de travaux d'édification d'une construction nouvelle ; que du fait de l'autorisation ainsi accordée et de l'atteinte au droit de propriété pouvant en résulter, il appartient au juge saisi de procéder à l'évaluation du préjudice subi par le propriétaire du fonds voisin ; qu'en rejetant la demande d'autorisation présentée par la société S.C. [...] que les travaux projetés impliquaient la destruction pure et simple du mur propriété de la SCI [...] puis le creusement dans sa propriété d'une fouille d'environ 3 mètre de large et 2,70 mètre de profondeur tout au long du chemin d'accès à l'arrière de l'immeuble, rendu impraticable pendant au moins six semaines quand, en l'absence de sujétion intolérable et excessive constatée par la cour d'appel, ces circonstances n'étaient pas de nature à faire obstacle au droit de la société S.C. [...] de se voir autoriser à pénétrer sur le terrain propriété de la SCI [...], situé [...] , afin de lui permettre de réaliser les travaux de construction de l'immeuble bâti en limite de propriété, tel que visé dans le permis de construire délivré le 24 décembre 2014 par la commune de [...], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 544 du code civil,
6° Alors en sixième lieu que le propriétaire d'un fonds, qui justifie d'un permis de construire en limite de propriété, est en droit de solliciter du juge une autorisation provisoire de « tour d'échelle » sur le fonds voisin pour lui permettre d'effectuer sur son immeuble des travaux indispensables qui ne peuvent être effectués par un autre moyen, qu'il s'agisse de travaux de réparations ou d'entretien sur un bâti déjà existant ou qu'il s'agisse de travaux d'édification d'une construction nouvelle ; que du fait de l'autorisation ainsi accordée et de l'atteinte au droit de propriété pouvant en résulter, il appartient au juge saisi de procéder à l'évaluation du préjudice subi par le propriétaire du fonds voisin ; qu'en rejetant la demande d'autorisation présentée par la société S.C. [...] aux motifs inopérants « qu'il n'apparaît pas que la S.C. [...] ait eu le projet d'indemniser la SCI [...] à hauteur de l'ensemble des désagréments et préjudices occasionnés, que la « convention de droit de passage temporaire droit d'échelle » qu'elle avait élaborée et soumise à la signature de son adversaire ne contenait qu'un engagement de remise en état sans aucune prise en compte des éventuels préjudices annexes subis, qu'à cet égard l'appelante indique qu'elle « se propose même » de reconstruire le mur de la SCI [...], ce qui en tout état de cause aurait relevé de ses obligations minimales et que sur ce point également, les conditions de mise en oeuvre d'une servitude de tour d'échelle n'étaient en tout état de cause pas respectées », l'évaluation du préjudice allégué par la SCI [...] relevant de la seule appréciation du juge, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 544 du code civil, ensemble l'article 1240 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016."