Le juge des référés ne peut pas prononcer la résiliation du bail ! (lundi, 11 février 2019)
Cette décision rappelle à nouveau que le juge des référés ne peut pas prononcer la résiliation du bail et qu'il ne peut que la constater.
"Vu l’article 808 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Poitiers, 28 février 2017), rendu en référé, que M. et Mme Z…, qui ont consenti, le 15 mai 2004, un bail sur un local à usage commercial à la société Nuit des Monts, lui ont délivré, le 23 février 2016, un commandement, visant la clause résolutoire, d’avoir à justifier de la démolition de constructions érigées sans leur autorisation et de la souscription d’une assurance, puis l’ont assigné devant le juge des référés en résiliation du bail commercial ;
Attendu que l’arrêt confirme l’ordonnance prononçant, à compter de sa date, la résiliation du bail commercial du 15 mai 2004 ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’il n’entre pas dans les pouvoirs du juge des référés de prononcer la résiliation d’un bail, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 28 février 2017, entre les parties, par la cour d’appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Poitiers, autrement composée ;
Condamne M. et Mme Z… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme Z… et les condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Nuit des Monts représentée par M. X…, ès qualités ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Nuit des monts et M. X…, ès qualités,
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR déclaré recevable et bien fondée la demande des époux Z…, la décision étant opposable à la société Nuit des monts et monsieur X… ès qualités, d’AVOIR prononcé la résiliation du bail commercial du 5 mars 2014 à la date du 18 juillet 2016, d’AVOIR dit que la société Nuit des monts est occupante sans droit ni titre, d’AVOIR ordonné son expulsion et celle de tous occupants de son chef, et d’AVOIR fixé à 11 621,50 € le montant de l’indemnité trimestrielle d’occupation à la charge de la société Nuit des monts, payable d’avance à compter du 18 juillet 2016 et jusqu’au départ effectif des locaux ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « le juge des référés a prononcé la résiliation du bail en constatant trois manquements du preneur : l’absence de production de documents suffisamment explicites permettant au bailleur de vérifier que le preneur a contracté une assurance relative au bien loué ; la réalisation d’une cabane en bois destinée à la vente de sandwichs et frites installée sur la terrasse en contravention aux dispositions du bail et l’absence de paiement des loyers au 21 juin 2016 pour la somme de 11.621,50 €. Il n’a pas retenu les griefs relatifs au mur anti-feu et aux travaux d’accessibilité. – 1 – Sur l’assurance, Le 23 février 2016, Ginette et Pierre Z… ont délivré un commandement au preneur visant la clause résolutoire aux fins de justifier notamment d’une assurance pour les locaux loués. La SARL Nuit des Monts produit une attestation d’assurance Elite Assurance (pièces 7 et 8) qui concerne la période du 25 avril 2015 au 31 décembre 2015, soit une période antérieure au commandement. Elle ne satisfait donc pas aux exigences du commandement délivré. Concernant l’assurance AXA produite en pièce 5 quater, il s’agit de l’échéance annuelle du 1er août 2016, le contrat semble être en cours depuis le 28 octobre 2014, cependant les risques couverts ne sont pas décrits la seule mention s’y rapportant " Garanties : RC POL FIX est à cet égard sibylline. Il convient dès lors de constater que la SARL Nuit des Monts ne justifie pas d’une assurance pour les locaux loués conforme aux exigences du bail de sorte que le manquement reproché de ce chef par le bailleur est établi ce qui doit entraîner le constat de l’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail. – 2 – Sur la réalisation d’une cabane en bois, Au vu du constat d’huissier dressé le 6 juin 2016, produit par le bailleur en pièce 11, on constate la présence d’un chalet de bois prolongé d’un caillebotis en bois sur lequel est installé du mobilier de jardin. Sur le constat d’huissier dressé le 14 décembre 2016 produit par le preneur, on remarque toujours la présence du chalet litigieux, cependant il a été déplacé sur une autre partie de la terrasse attenante à l’immeuble, en effet cette terrasse se présente en deux parties une légèrement sur- élevée et une autre légèrement plus basse contiguë, il est évident que cette terrasse constitue un ensemble qui est bien compris dans le bail des locaux loués. Ainsi contrairement à ce que soutient le preneur, il n’a pas enlevé le chalet litigieux édifié sans autorisation du bailleur mais l’a simplement déplacé sur la partie basse de la dite terrasse.
Ce chalet ne peut en aucun cas être considéré ainsi que le soutient le preneur comme un meuble de terrasse qui serait autorisé par le bail et ce quelles que soient les considérations relatives à son poids au m2, il s’agit bien d’une construction fût-elle démontable pour laquelle le preneur aurait dû solliciter l’autorisation du bailleur avant de l’édifier. Il en résulte que le manquement reproché par les époux Z… est bien établi et que la SARL Nuit des Monts n’a pas justifié de l’enlèvement de la construction litigieuse. – 3 – Sur le non paiement des loyers, taxe foncière et primes d’assurance, Il convient de relever que si les bailleurs font encore état dans leurs écritures des loyers impayés ou en retard, ils ne demandent rien à ce titre dans le cadre de la présente procédure se bornant à solliciter, dans le dispositif des conclusions qui seul saisit la cour en application de l’article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la confirmation de l’ordonnance qui n’a pas prononcé de condamnation à paiement d’une provision au titre des loyers et qui les a déboutés de leurs demandes de provision à valoir sur leurs préjudices. Il n’est pas nécessaire dès lors d’entrer dans la discussion des parties relative aux sommes éventuellement dues à ce titre, étant précisé que ceci excéderait la compétence du juge des référés. – 4 – Sur le mur anti-feu Le mur anti-feu a été réalisé en mai 2014 (pièces appelants n°2 photo et n° 15 constat d’huissier), de même au vu des autres pièces invoquées ,l’acte de cession, l’acte de renouvellement du bail , le commandement du 23 février 2016 , et l’arrêté de la ville de St Jean de Monts du 13 juillet 2015, il apparaît que les preneurs avaient une option entre le mur coupe-feu et la porte coupe-feu, option acceptée par les bailleurs. Ainsi la cour ne retiendra pas de manquement du preneur de ce chef. – 5 – Sur les travaux d’accessibilité La main courante pour l’escalier principal de la discothèque a été installée ceci ressortant de l’examen de la photo produite par les appelants en pièce 2 et du constat d’huissier du 16 décembre 2016 produit en pièce 15. Concernant les WC et l’accessibilité handicapé au vu des préconisations de la commission de sécurité et du rapport SOCOTEC, la cour ne retiendra pas le manquement reproché par les bailleurs. – 6 – Sur la résiliation du bail et ses conséquences Comme il a été démontré supra la résiliation du bail est justifiée par les deux manquements du preneur retenus par la cour à savoir le défaut de justification de l’assurance des locaux loués et l’édification d’une construction sans autorisation , la décision entreprise sera donc confirmée en ce qu’elle a prononcé la résiliation du bail à compter du 18 juillet 2016. Il sera en conséquence fait droit à la demande des époux Z… tendant à la fixation de l’indemnité d’occupation due à compter du 18 juillet 2016 par la SARL Nuit des Monts occupante sans droit ni titre. Elle sera fixée au montant trimestriel de 11.621.50 € par trimestre, payable d’avance à compter de la résiliation du bail et jusqu’au départ effectif des lieux » :
ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « dans tous les cas d’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. Il est reproché au preneur quatre manquements : le défaut de réalisation des travaux de sécurité, le défaut d’assurance, le défaut de paiement des loyers à compter du 4 avril 2016 et la réalisation de travaux non autorisés sur la terrasse. Le juge des référés, juge de l’évidence et du provisoire, au vu des pièces régulièrement produites aux débats, constate : – l’absence de production de documents suffisamment explicites permettant au bailleur de vérifier que le preneur a contracté une assurance relative au bien loué et non simplement une assurance de responsabilité civile. – la réalisation d’une cabane en bois destinée à la vente de sandwichs et frites installée sur la terrasse, le bail ne permettant que la mise en place de « mobiliers légers (style meubles de terrasse) ». [
] Ces manquements flagrants aux dispositions contractuelles doivent entraîner la résiliation du bail commercial à la date du prononcé de la présente décision » ;
ALORS 1°) QU’il n’entre pas dans les pouvoirs de la juridiction des référés de prononcer la résiliation d’un bail ; qu’en confirmant l’ordonnance de référé du 18 juillet 2016 ayant prononcé, à compter de sa date, la résiliation du bail conclu entre la société Nuit des monts et les époux Z…, la cour d’appel a violé l’article 808 du code de procédure civile ;
ALORS 2°) QU’en énonçant, dans les motifs de son arrêt, que le défaut d’assurance justifiait le constat de l’acquisition de la clause résolutoire, tout en confirmant l’ordonnance de référé du 18 juillet 2016 ayant prononcé, à compter de sa date, la résiliation du bail conclu entre la société Nuit des monts et les époux Z…, la cour d’appel s’est contredite et a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 3°) QU’en énonçant tout à la fois, dans les motifs de son arrêt, qu’elle constatait l’acquisition de la clause résolutoire et qu’elle confirmait l’ordonnance de référé du 18 juillet 2016 ayant prononcé, à compter de sa date, la résiliation du bail conclu entre la société Nuit des monts et les époux Z…, la cour d’appel a laissé incertain le fondement juridique de sa décision, en violation de l’article 12 du code de procédure civile."