Un arrêt sur le changement d'affectation d'un lot de copropriété (jeudi, 25 octobre 2012)
Voyez aussi mon site sur :
La destination de l'immeuble et le statut de la copropriété
"Vu les articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 janvier 2011), statuant sur renvoi après cassation (5 décembre 2007, pourvoi n° Z 06-16.031) que le syndicat des copropriétaires de la résidence La Verboise (le syndicat) a, le 26 juin 1998, assigné M. X..., qui avait acquis en 1995 des locaux situés en sous-sol de l'immeuble et dont la demande d'autorisation de les affecter à l'habitation avait été refusée par l'assemblée générale des copropriétaires du 15 février 1996, en rétablissement de ces lots dans leur état d'origine ;
Attendu que, pour rejeter la demande du syndicat, l'arrêt retient que le groupe d'immeubles est destiné à usage d'habitation, que dans le règlement de copropriété - état descriptif de division, le terme de "local" utilisé pour définir les parties privatives des lots 27 à 30 est employé distinctement du terme "appartement" et des termes "cave", "box enterré à usage de garage" et "emplacement enterré à usage de parking", que les lots litigieux sont affectés d'une quote-part des parties communes supérieure à celle des caves, parkings et box et plus proche de celle qui aurait pu être attribuée à un studio ou un T1 et qu'en l'absence de toute restriction relative à la destination des lots, ceux-ci peuvent être affectés à toutes sortes d'usages, y compris l'habitation ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le changement d'affectation des lots n'était pas de nature à porter atteinte à la destination de l'immeuble ou aux droits des autres copropriétaires, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer au syndicat des copropriétaires La Verboise la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires La Verboise.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande tendant à obtenir la condamnation de Monsieur X... à rétablir les lots n° 27, 28, 29, 30 et 31 dans leur affectation et destination d'origine ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965, chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; qu'il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble qu'en l'espèce, l'ensemble immobilier LA VERBOISE est « destiné à usage d'habitation » ; que selon l'état descriptif de division - règlement de copropriété, le sous-sol du bâtiment A comprend « vingt six caves, quatre locaux, un appartement, un local vide-ordures, un local à bicyclettes et voitures d'enfants » ; que si le terme « local », utilisé pour définir la partie privative des lots n° 27, 28, 29 et 30, y est employé distinctement du terme « appartement », il l'est aussi des termes « cave », « box enterré à usage de garage », et « emplacement enterré à usage de parking » qu'on y trouve par ailleurs ; qu'au surplus, les lots litigieux sont affectés d'une quotepart de parties communes générales bien supérieure à celle des caves (2/10.000èmes), des parkings enterrés (5/10.000èmes) et des boxes (13/10.000èmes), et bien plus proche de celle qui aurait pu être attribuée à un studio ou à un T1 ; qu'un « local » étant une partie d'un bâtiment considérée selon sa disposition et sa destination, en l'absence de toute restriction concernant cette dernière, il peut être affecté à toutes sortes d'usages, y compris d'habitation ; que cependant, le fait que l'assemblée générale des copropriétaires du 15 février 1996 ait refusé à Monsieur X... l'« autorisation » d'utiliser les lots n° 27, 28, 29, 30 et 31 à usage d'habitation est sans emport, aucun accord des autres copropriétaires n'étant requis par le règlement de copropriété, et aucune interdiction formelle ne résultant de cette décision de rejet ; que par ailleurs, le syndicat des copropriétaires ne justifie pas que les logements créés dans les lots n° 27, 28, 29 et 30, dotés de fenêtres ouvrant sur l'extérieur, ne respecteraient pas les nonnes d'habitabilité en vigueur, l'huissier qui a visité les lieux le 11 septembre 1996 n'ayant rien relevé de tel ; qu'enfin, il ne prouve pas que l'usage que Monsieur X... en fait porterait atteinte aux droits des autres copropriétaires ; que le syndicat des copropriétaires sera donc débouté de sa demande tendant à obtenir sa condamnation a rétablir les lots litigieux dans leur affectation et destination d'origine ; que les travaux de construction ont fait l'objet d'un refus de certificat de conformité, au motif notamment que « les façades des bâtiments ont été modifiées, permettant ainsi la création en sous-sol de logements au lieu de garages prévus » ; qu'en outre, Monsieur X..., en sa qualité de marchand de biens, ne pouvait ignorer les tenants et les aboutissants de cette violation des règles d'urbanisme ;
1°) ALORS QUE si chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot et s'il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes, c'est à la condition de ne porter atteinte ni à la destination de l'immeuble, ni aux droits des autres copropriétaires ; que la création de nouveaux logements est susceptible de constituer une modification contraire à la destination de l'immeuble, dès lors qu'elle engendre des risques de surpopulation que les copropriétaires entendaient précisément éviter ; que dès lors, en omettant de rechercher, comme elle y était conviée par les conclusions d'appel du syndicat des copropriétaires, si la surcharge d'occupation induite par la création de logements supplémentaires en sous-sol, n'était pas de nature à porter atteinte à la destination de l'immeuble à l'habitation bourgeoise, au sein d'une copropriété qui n'avait ni prévu ni souhaité une telle augmentation de sa population, a fortiori dans la mesure où elle constatait que les travaux de construction litigieux avaient fait l'objet d'un refus de certificat de conformité, au motif notamment que « les façades des bâtiments avaient été modifiées, permettant ainsi la création en sous-sol de logements au lieu de garages prévus », et où les logements créés étaient des studios destinés à la location en meublé, quand les autres habitations de la résidence étaient au moins de type T2 et ne faisaient nullement l'objet de ce type de bail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 ;
2°) ALORS QU'en omettant d'expliquer en quoi la suppression d'emplacements de parkings concomitamment à l'accroissement du nombre logements, ce qui compliquait nécessairement le stationnement et l'accès aux réseaux et portait atteinte au standing et à la destination bourgeoise de l'ensemble immobilier, ne portait pas atteinte aux droits des autres copropriétaires, la Cour d'appel a à nouveau privé sa décision de base légale au regard des articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 ;
3°) ALORS QUE le syndicat des copropriétaires faisait valoir que le fait de transformer en logements des locaux qui n'étaient initialement pas destinés à l'habitation avait nécessairement une incidence sur le coefficient d'utilisation des sols de l'ensemble immobilier par l'utilisation de droits à construire attachés à celui-ci, et justifiait l'opposition du syndicat des copropriétaires à la transformation, par Monsieur X..., des locaux litigieux en studios ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions pertinentes, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du Code de procédure civile."