Il appartient à celui qui soulève la nullité de mandats pour non-respect des exigences légales en matière de registre et de carte professionnelle de rapporter la preuve de ses allégations (mardi, 31 janvier 2012)
"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 juin 2010), que par actes sous seing privé du 17 janvier 2007 M. et Mme X... ont confié à la société Haut Var Immobilier (l'agent immobilier) deux mandats exclusifs, portant l'un sur la vente d'une villa au prix de 280 000 euros, l'autre sur la vente d'une parcelle de terrain à diviser en deux lots constructibles au prix de 138 000 euros chacun, soit 276 000 euros au total, la commission du mandataire étant fixée à la somme de 13 000 euros pour l'un et l'autre de ces lots et à celle de 20 000 euros pour la villa ; que les époux X... ayant signé, par actes des 11 avril et 24 mai 2007, deux promesses de vente relatives à ces biens avec un acquéreur ne leur ayant pas été présenté par l'agent immobilier, celui-ci les a assignés en paiement de la somme de 46 000 euros au titre de la clause pénale prévue par les mandats ; que la cour d'appel a accueilli sa demande ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu qu'ayant à juste titre affirmé, par motifs adoptés, qu'il appartient à celui qui soulève la nullité de mandats pour non-respect des exigences légales en matière de registre et de carte professionnelle de rapporter la preuve de ses allégations, la cour d'appel, devant laquelle les époux X... n'avaient pas présenté de demande de production de pièces et n'avaient pas versé aux débats les exemplaires des mandats litigieux restés en leur possession, a écarté , sans encourir les griefs des deux premières branches, leur exception de nullité après avoir constaté que les exemplaires produits par l'agent immobilier portaient leurs numéros respectifs d'inscription au registre des mandats ainsi que la mention du numéro de la carte professionnelle du mandataire dans l'emplacement prévu à cet effet ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu que M. et Mme X... n'ayant pas prétendu dans leurs conclusions d'appel qu'ils n'étaient pas débiteurs d'une partie de la somme réclamée par application d'une clause les ayant autorisés à faire visiter l'un des deux lots constructibles à une personne qui s'était déclarée intéressée, le moyen est nouveau, mélangé de fait, et partant irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils pour M. et Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné avec solidarité Monsieur et Madame X... à payer à la SARL HAUT VAR IMMOBILIER la somme de 46.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2007 ;
AUX MOTIFS QUE Jean-Pierre X... et Klara Y... épouse X... soulèvent la nullité des mandats par application des dispositions de l'article 72 du décret du 20 juillet 1972 au motif qu'il n'est pas versé aux débats le registre des mandats permettant de vérifier leur inscription régulière sur celui-ci et également, par application de l'article 3 du même décret dans la mesure où la S.A.R.L. HAUT VAR IMMOBILIER ne justifie pas de sa qualité de professionnelle ; qu'il convient d'objecter que les deux mandats, versés aux débats par l'intimée, portent bien leur numéro respectif d'inscription au registre des mandats : H 1096 pour celui concernant la villa et H 1097 pour celui concernant les deux terrains ; que par ailleurs, sur chacun d'eux, il est fait mention du numéro de la carte professionnelle du mandataire (n° 3800) dans l'emplacement prévu à cet effet ; qu'en l'état de ces mentions, ils apparaissent réguliers au regard des dispositions invoquées ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Jean-Pierre X... et Klara Y... épouse X... de leur exception de nullité des deux mandats en cause ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il appartient à celui qui soulève la nullité des mandats pour non-respect des exigences légales en matière de registre des mandats et de carte professionnelle de rapporter la preuve de ses allégations ; qu'il apparaît toutefois que M. et Mme X... procèdent par affirmations sans produire à cet effet un commencement de preuve ; qu'ils n'ont à cet égard délivré aucune sommation de communiquer ; que les deux mandats litigieux portent chacun un numéro, savoir H 1096 et H 1097, mentionnés comme étant le numéro d'enregistrement sur le registre des mandats ; que de plus la référence de la carte professionnelle de la S.A.R.L. HAUT VAR IMMOBILIER figure de façon claire et lisible sur le tampon apposé dans la case mandataire ; que par conséquent, le moyen tiré de la nullité des mandats par M. et Mme X... est inopérant ;
1°) ALORS QUE l'agent immobilier doit, à peine de nullité, mentionner tous les mandats par ordre chronologique sur un registre des mandats à l'avance coté sans discontinuité et relié, et reporter le numéro d'inscription sur l'exemplaire du mandat qui reste en la possession du mandant ; qu'en énonçant, pour débouter les époux X... de leur exception de nullité des mandats, «que les deux mandats, versés aux débats par l'intimée, portent bien leur numéro respectif d'inscription au registre des mandats : H 1096 pour celui concernant la villa et H 1097 pour celui concernant les deux terrains », tandis d'une part que l'inscription d'un numéro sur un exemplaire du mandat n'établit pas que ce dernier a été régulièrement mentionné sur le registre des mandats, et d'autre part que le numéro d'inscription sur le registre des mandats doit être reporté sur l'exemplaire qui doit être remis au mandant et non sur celui qui reste en possession du mandataire, la Cour d'appel a violé les articles 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et 72 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;
2°) ALORS QUE les activités visées à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1972 ne peuvent être exercées que par les personnes physiques ou morales titulaires d'une carte professionnelle, délivrée par le préfet, précisant celles des opérations qu'elles peuvent accomplir ; qu'à l'occasion de l'une des opérations spécifiées à cet article, toute personne intéressée peut exiger la présentation, suivant le cas, de la carte professionnelle, du récépissé de la déclaration d'activité ou de l'attestation prévue à l'article 9 du décret du 20 juillet 1972 ; qu'en énonçant que sur chacun des mandats «il est fait mention du numéro de la carte professionnelle du mandataire (n°3800) dans l'emplacement prévu à cet effet», pour dire que ces mandats « apparaissent réguliers » et rejeter le moyen par lequel les époux X... faisaient valoir que, la SARL HAUT VAR IMMOBILIER ne versant aux débats aucun justificatif relatif à la carte professionnelle ou à l'attestation requise par le décret du 20 juillet 1972, les mandats étaient frappés de nullité, tandis que la seule mention d'un numéro sur les mandats n'établit pas que le mandataire est autorisé à exercer les activités visées à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1972, la Cour d'appel a violé les articles 1er, 3, 4 et 6 de la loi du 2 janvier 1972 et 10 du décret du 20 juillet 1972 ;
3°) ALORS QU'il incombe à celui qui se réclame du statut des agents immobiliers d'établir qu'il est en possession de la carte professionnelle l'autorisant à exercer cette activité, dont toute personne intéressée peut exiger la présentation, de même qu'il lui incombe d'établir qu'il a exécuté les obligations que la loi met à sa charge ; qu'en énonçant, pour condamner les époux X... à payer à la SARL HAUT VAR IMMOBILIER le montant des commissions que cette dernière réclamait qu' «il appartient à celui qui soulève la nullité des mandats pour non-respect des exigences légales en matière de registre des mandats et de carte professionnelle de rapporter la preuve de ses allégations », la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé les articles 1315 du Code civil, 1, 3 et 6 de la loi du 2 janvier 1972, 10 et 72 du décret du 20 juillet 1972.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné avec solidarité Monsieur et Madame X... à payer à la SARL HAUT VAR IMMOBILIER la somme de 46.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2007 ;
AUX MOTIFS QUE les deux mandats avaient une durée initiale irrévocable qui expirait le 17 avril 2007 ; que devant la Cour, Jean-Pierre X... et Klara Y... épouse X... ne soutiennent plus avoir manifesté leur volonté de mettre fin aux mandats de manière anticipée le 2 avril 2007 et ne produisent aux débats aucun document en ce sens ; que s'agissant de mandat exclusif de vente, il était expressément prévu à l'article 4-C : «le mandant s'interdit de négocier directement ou indirectement, s'engageant à diriger sur le mandataire toutes demandes qui lui seront adressées personnellement », étant ajouté qu'à défaut « il s'engage expressément à verser au mandataire une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération prévue au recto » ; qu'en exécution de cette clause, il importe peu que Jean-Pierre X... et Klara Y... épouse X... aient signé les promesses de vente, pour chacun des biens concernés, avec une personne qui ne leur avait pas été présentée par le mandataire ; que ne se trouvant pas déliés du mandat d'exclusivité, ils avaient l'obligation de négocier la vente avec le mandataire qui pouvait prétendre à l'intégralité de sa commission ; que c'est donc par des moyens exacts en fait et pertinents en droit qui seront adoptés par la Cour que le premier juge a fait droit à la demande de la SARL HAUT VAR IMMOBILIER au titre de la clause pénale, équivalente au montant des commissions auxquelles elle aurait pu prétendre, soit à hauteur de 46.000 euros ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les époux X... ne peuvent se prévaloir utilement de la clause particulière insérée dans le mandat H 1097 les autorisant à faire visiter un lot le 19 janvier 2007 à un particulier sans intervention de l'agence dans la transaction ; que cette autorisation était limitée à un seul lot mis en vente au prix de 138.000 €, correspondant à une commission d'agence de 13.000 € ; que les époux X... ont vendu au candidat acquéreur ayant visité les lieux le 19 janvier 2007 deux lots pour le prix de 300.000 €, correspondant à une commission d'agence de 26.000 € ; que les époux X... n'ont pas respecté dès lors la clause particulière d'exclusivité ; qu'au regard des développements qui précèdent, il convient par conséquent de faire application de la clause pénale insérée dans chacun des mandats signés le 17 janvier 2007, aux termes de laquelle le mandant s'engage expressément à verser au mandataire une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération en cas de non respect des obligations contractuelles, savoir l'interdiction de négocier directement ou indirectement et l'obligation de diriger sur le mandataire toutes demandes qui lui sont adressées personnellement, et ce à la fois pendant la durée du mandat expirant le 17 avril 2007 et pendant une période de trois mois suivant son expiration, soit jusqu'au 17 juillet 2007 ; qu'en l'occurrence, M. et Mme X... ont signé un compromis de vente le 11 avril 2007 portant sur les terrains faisant l'objet du mandat H 1097, et un second compromis de vente le 24 mai 2007 portant sur la villa objet du mandat H 1096 ; que ces deux compromis de vente ont été signés avant le 17 juillet 2007, à l'intérieur du délai initialement convenu dans les contrats d'exclusivité et dans le cadre desquels les mandants s'interdisaient de négocier directement ou indirectement, s'engageant à diriger sur le mandataire toutes les demandes qui lui seraient adressées personnellement, avec pour unique dérogation la possibilité d'écarter la société HAUT VAR IMMOBILIER pour la vente d'un seul des deux lots, selon des conditions particulières ; que le non respect de cette obligation par les mandants entraîne l'application de la clause pénale contractuellement convenue, de sorte qu'il convient de faire droit à la demande en paiement solidaire de la somme de 46.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2007, date de mise en demeure des époux X... par voie recommandée ;
ALORS QU'il résulte des constatations des juges du fond que les époux X... étaient autorisés par une clause particulière du mandat n° H 1097 à faire visiter et éventuellement à vendre l'un des deux terrains objets de ce mandat à une personne qui s'était déjà déclarée intéressée, sans intervention de l'agence immobilière dans la transaction ; qu'en condamnant les époux X... à payer à la SARL HAUT VAR IMMOBILIER la somme de 26.000 € pour avoir vendu à cette personne intéressée non pas un seul des terrains, mais les deux, tandis que la méconnaissance par les mandants de leur obligation n'avait fait perdre à l'agence que la commission prévue pour un terrain, soit 13.000 €, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du Code civil."