Servitude de passage et droit de se clore (vendredi, 15 janvier 2010)
La question :
M. Gérard Longuet attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la nécessité de moderniser les dispositions du code civil relatives aux servitudes de passage, et notamment celles de l'article 701, pour tenir compte de l'existence fréquente en milieu urbain, plus particulièrement dans les zones pavillonnaires et lotissements, de servitudes légales et conventionnelles.
Plus spécialement, en prenant en compte les impératifs de sécurité des personnes et des biens, il lui demande de lui indiquer s'il existe des raisons pour interdire au propriétaire d'un fonds servant de se clore en fermant à clé l'accès à la voie publique, en remettant naturellement une clé au propriétaire du fonds dominant et en l'autorisant à disposer d'un portier électronique.
Il apparaît en effet choquant que, non seulement le propriétaire du fonds servant ne puisse fermer à clé l'accès à sa propriété alors que celui du fonds dominant peut le faire, mais encore que l'absence de serrure fermée à clé, qui permet de facto à n'importe quelle personne d'entrer chez lui, en violation du caractère très limitatif de la servitude de passage, ne transforme en réalité la servitude en droit de passage des tiers, et ce sans indemnisation.
Il lui demande les dispositions qu'elle compte prendre pour faire en sorte que les droits fondamentaux des propriétaires du fonds servant ne soient pas inférieurs à ceux du fonds dominant.
Les dispositions de l'article 638 du code civil selon lesquelles « la servitude n'établit aucune prééminence d'un héritage sur l'autre » reconnaissent un principe d'égalité entre fonds dominant et fonds servant. La recherche d'un équilibre entre la contrainte imposée au propriétaire grevé et les droits du propriétaire du fonds dominant sous-tend l'ensemble des dispositions du livre II titre IV du code civil. En application des articles 647 et 701 de ce code, le propriétaire d'un fonds grevé d'une servitude de passage conserve le droit de se clore à la condition de ne pas porter atteinte, au droit de passage et de ne pas en rendre l'exercice plus incommode. L'appréciation des circonstances modificatives de l'usage de la servitude entre dans les pouvoirs souverains du juge du fond. Ainsi, a-t-il, d'ores et déjà, été reconnu que l'installation d'une porte avec remise des clés au bénéficiaire du droit de passage n'occasionnait aucune gêne à l'exercice de la servitude (Cass. 1re civ, 3 décembre 1962). Les impératifs de sécurité des personnes et des biens sont donc assurés par les dispositions légales et la jurisprudence de la Cour de cassation. En conséquence, il n'apparaît pas nécessaire de prendre de nouvelles dispositions dès lors que la réglementation actuelle préserve totalement les droits fondamentaux des propriétaires de fonds servants.